La filière automobile abasourdie par la nouvelle prime à la conversion
Après la découverte de la parution du décret sur les nouvelles conditions d'accès à la prime à la conversion au Journal officiel du 17 juillet 2019, les professionnels de l'automobile, industriels et distributeurs, ne décolèrent pas. "Il est inadmissible de sortir un décret mi-juillet, sans concertation aucune, pour une mise en application au 1er août", s'insurge Xavier Horent, délégué général du CNPA.
Ce texte signé par François de Rugy, alors démissionnaire de son poste de ministre de la Transition écologique, laisse également sa remplaçante, Elisabeth Borne, mal à l'aise. Au micro de RTL, ce 18 juillet 2019, celle-ci a laissé entendre qu'une solution "clé en main" était à l'étude pour que tous les Français puissent utiliser ce levier qui permet un renouvellement du parc automobile français dont l'âge moyen frôle les 10 ans. "On peut ajuster les critères quand on voit un certain nombre d'effets que l'on n'a pas prévu", a-t-elle ajouté.
Aucune visibilité pour les industriels
Une remarque qui n'a pas manqué de faire bondir à la Plateforme automobile (PFA). "Le sujet est global et c'est bien l'équation budgétaire globale incluant le malus automobile qui nous intéresse. C'est une question de cohérence et de mesure de l'impact sur le secteur" précise-t-on à la PFA. "Certes il est trop tôt pour apprécier la portée concrète du texte à ce stade : cela exige des discussions et une analyse de l'impact potentiel en nombre de bénéficiaires. Or, dire qu'à ce stade on ne dispose d'aucune visibilité à laquelle s'est pourtant engagé le gouvernement, est peu dire ..."
Les conditions d'accès à la prime à la conversion ont été changées notamment à cause de son succès auprès des Français. Alors qu'un million de dossiers a été budgété sur l'ensemble du quinquennat, 550 000 demandes ont été déposées depuis le début de l'année 2018, sur 18 mois. Le déficit est donc d'ores et déjà annoncé, même si aucun chiffre n'a été confirmé par le gouvernement. Selon nos confrères du Parisien, celui-ci pourrait s'élever à plus de 300 millions d'euros.
Aucune logique pour les distributeurs
Mais visiblement, personne ne mesure réellement l'impact de ce nouveau tour de vis. Comment le bonus et le malus seront-ils touchés ? Plus personne ne se risque aujourd'hui à des pronostics. Et la passation de pouvoir entre François de Rugy et Elisabeth Borne ne va pas faciliter les choses. Le CNPA s'est fendu d'un courrier à son intention s'étonnant de découvrir le contenu des arbitrages réalisés, dans le Journal officiel, 5 jours après la réunion du comité stratégique de filière où le sujet avait justement été évoqué mais sans information sur les délais, ni les mesures. Si le CNPA a demandé à être reçu en urgence par la nouvelle ministre de la Transition écologique, l'organisation professionnelle doit cependant s'armer de patience puisque celle-ci n'a pas encore de secrétariat !
Pour les distributeurs automobiles, au-delà de la brutalité de la mesure et du sentiment de non prise en considération, persiste l'étonnement quant aux délais annoncés. En effet, la prime entre en vigueur dès le 1er août mais ne prendra en compte que les véhicules électriques, Crit'Air 1 et 2, émettant moins de 117 g de CO2, immatriculés à compter du 1er septembre 2019. "Clairement cela veut dire que les véhicules de démonstration immatriculés au mois d'août ne pourront être éligibles à la prime. Mais d'ores et déjà certains constructeurs nous sollicitent pour placer en démonstration des véhicules qui seront abimés fiscalement lors du passage du NEDC corrélé en WLTP au 1er janvier 2020", explique ce distributeur.
Les mesures qui entrent en vigueur au 1er août 2019 :
- L’abaissement du niveau maximum d’émission des véhicules de 122 à 117 g de CO2/km (seuil actuel du malus automobile pour les véhicules neufs) et l’exclusion des véhicules de plus de 60 000 € qui, bien que marginaux (65 véhicules en 2018 sur 300 000 dossiers), ne justifient pas un soutien public ;
- La fin de l’éligibilité des véhicules Crit’Air 1 pour les ménages plus aisés ;
- La fin de l’éligibilité des véhicules Crit’Air 2 à l’exception de ceux immatriculés après le 1er septembre 2019 ;
- L’ajustement des critères de revenus des ménages, pour être plus juste socialement (les ménages des 5 premiers déciles de revenu fiscal de référence par part auront des primes plus élevées) ;
- Le ciblage du dispositif vers les véhicules les plus propres :
* prime à 2 500 € pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables à autonomie suffisante, neuf ou d’occasion et quel que soit le niveau de revenu ;
* prime de 1 500 € pour les véhicules Crit'Air 1 ou les véhicules Crit'Air 2 immatriculés après le 1er septembre 2019 pour la moitié des Français les moins aisés ;
* le maintien du doublement des primes (5 000 € et 3 000 €) pour les ménages très modestes (deux premiers déciles de revenu fiscal de référence par part, soit jusqu’à 6 300 €/an et par part fiscale) et pour les ménages des 5 premiers déciles habitant à plus de 30 km de leur lieu de travail.
Sur le même sujet
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.