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Industrie

Une force tranquille à l’allemande

Publié le 29 mars 2012

Par Alexandre Guillet
6 min de lecture
Analyste chez IHS, Carlos Da Silva décrypte pour vous le plan produits de Volkswagen et surtout le formidable défi de la nouvelle plate-forme MQB. Extraits.
Analyste chez IHS, Carlos Da Silva décrypte pour vous le plan produits de Volkswagen et surtout le formidable défi de la nouvelle plate-forme MQB. Extraits.

Dans le périmètre européen, après la Polo, actuellement en milieu de cycle, la Beetle cabriolet et la up!, le plan produits de la marque Volkswagen comprend des lancements névralgiques pour les années à venir. Cette année, Golf et Golf Plus sont au programme, en attendant la 1 liter car l’an prochain, les Passat, Scirocco et Caddy en 2014 et enfin, les Touran et Tansporter en 2015. “En somme, la marque va donc renouveler plus de la moitié de sa gamme, avec les enjeux colossaux que représentent la Golf et la Passat”, indique Carlos Da Silva, analyste chez IHS Automotive, avant d’ajouter qu’il ne faut pas s’attendre à une révolution sur les nouveautés. On ne change pas radicalement une recette qui fonctionne auprès des clients. Cependant, la 1 liter car constitue une véritable nouveauté. C’est un peu un concept-car dans la rue, mais le volume restera confidentiel. “C’est avant tout un véhicule d’image. Il s’agit de capitaliser sur l’image de la marque dans la haute technologie et l’aptitude à relever le défi de la basse consommation et des faibles émissions. Mais précisément, vu les technologies exploitées, le véhicule sera coûteux à produire et son prix sera donc vraisemblablement élevé”, souligne Carlos Da Silva.

Toujours plus de localisation de la production en Chine

Sur les autres grands marchés, la marque a aussi un agenda chargé. En Amérique du Nord, deux jalons importants sont annoncés, Golf et Tiguan. “Pour ce dernier modèle, les dirigeants de la marque devraient utiliser la méthode qui a fait ses preuves sur la Passat. Même s’il gardera le nom Tiguan, il s’agira d’un crossover plus gros avec des motorisations et des équipements adaptés au marché”. En Amérique du Sud, une nouvelle génération de Gol, l’actuel co-leader du marché, sera lancée. Sans oublier la Fox, la berline Voyage et l’arrivée de la up!, prévue en 2013, afin d’anticiper l’évolution de certains marchés dans cette région. “Là encore, dans les années à venir, la marque va s’atteler à renouveler le cœur de sa gamme”. Enfin, en Chine, la gamme s’inscrira dans la continuité et la priorité sera de parvenir à une localisation de plus en plus forte. Selon Carlos Da Silva, d’ici 2015, quasiment tous les produits de la marque seront ainsi produits sur place. De nouvelles usines vont en effet voir le jour, surtout que contrairement à d’autres constructeurs, le groupe maîtrise bien l’équation politique de la Chine et peut faire valoir une relation de confiance avec l’administration pour s’être implanté tôt dans le pays.

“Avec MQB, on parle de milliards d’euros d’économies potentielles !”

Si le plan produits va donc s’inscrire dans la continuité, même si la cadence des nouveautés est élevée, entendons-nous bien, l’enjeu central des années à venir réside dans la montée en puissance de la nouvelle plate-forme MQB. Pour Carlos Da Silva, avec ce projet, le groupe se dote d’un atout considérable pour réduire les coûts : “Et comme cela concerne aussi le groupe motopropulseur, nous parlons en milliards d’euros d’économies potentielles !”. Et d’ajouter : “Si le groupe tient ses promesses, il fera un bond en avant considérable par rapport à la concurrence. Sous l’angle de la “communalisation”, il avait déjà un coup d’avance, fruit de son statut de pionnier dans le domaine, mais avec le projet MQB, il peut clairement changer de dimension”. Ce levier s’inscrit de surcroît dans un cercle vertueux : baisse des coûts, amélioration de la qualité, et hausse de la rentabilité, dans des proportions très significatives si les gains de parts de marché annoncés sont transformés. “Le groupe dispose de vraies possibilités de conquête, même en Europe, et cette conquête se fera de surcroît à un coût moindre par rapport aux concurrents”, estime Carlos Da Silva. Un coût moindre qui tient aussi à l’alchimie qualité-image qui permet au groupe d’appliquer un pricing plus élevé que la plupart de ses concurrents.

Un facteur risque somme toute faible

On peut toutefois se demander si ce projet pharaonique n’est pas risqué, dans la mesure où le moindre grain de sable peut avoir des conséquences d’une ampleur colossale. “Les avantages sont énormes, mais le risque existe bel et bien. Il suffit de regarder ce qui est arrivé à Toyota ces derniers temps pour en prendre la mesure”, souligne Carlos Da Silva, avant d’ajouter : “Cependant, le savoir-faire du groupe est une garantie sérieuse, au même titre que sa capacité d’investissement qui est à la hauteur de l’ambition. Par conséquent, le facteur risque demeure bien moins important que ce qu’il aurait pu être chez d’autres constructeurs…”. En outre, la plate-forme MQB présente aussi un avantage déterminant par rapport aux énergies alternatives et notamment à l’électrification des véhicules. “Son horizon de conception est arrivé au bon moment et les dirigeants du groupe ont pu intégrer les briques Hybrides et VE”. Et là encore, comme les notions de taille critique et de capacité d’investissements sont au rendez-vous, ce qui manquait par exemple à PSA pour son projet d’hybridation, la force de frappe s’en trouve décuplée.

Une excellente visibilité au-delà de 2020 !

“Contrairement à de nombreux constructeurs, le groupe Volkswagen est riche et dispose du cash-flow nécessaire pour développer plusieurs projets d’envergure de front”, note Carlos Da Silva, avant de poursuivre : “Par conséquent, le groupe dispose d’une excellente visibilité pour les années à venir, au-delà de 2020. Fort peu de concurrents sont dans ce cas de figure, hormis peut-être l’Alliance Renault Nissan, Toyota et GM. Bref, ceux qui sont dans le wagon de tête de l’industrie automobile”. Dans ce club fermé, relevons aussi que Volkswagen n’a pas de problème majeur de surcapacité et qu’il évoque plutôt des ouvertures d’usines pour plusieurs de ses marques, en Amérique comme en Chine. En outre, “le groupe a la force de savoir parfaitement gérer l’invisible et d’attribuer ensuite des territoires bien définis à ses marques. C’est aussi l’effet d’une véritable vision à long terme, il n’y a eu aucun zigzag dans la stratégie mise en œuvre ces dernières années”. Dès lors, en ergotant un brin, on peut se demander si le groupe a des faiblesses ? Seat ? Pour Carlos Da Silva, c’est clairement le maillon-faible du groupe, “tout simplement, parce qu’on ne sait pas vraiment ce que vient faire la marque dans le portefeuille du groupe. On ne sait pas ce que cette marque veut dire ni ce qu’elle apporte au marché”. En revanche, avec les récentes décisions prises par le groupe, le site de Martorell n’est plus un problème. Le low-cost ? “Si on veut vraiment être tatillon, on peut dire que le groupe présente une faille, toute relative cependant, au niveau de l’offre Entry. La solution qui avait été envisagée avec Suzuki n’est plus d’actualité, mais Volkswagen peut actionner d’autres leviers”. Le préjudice apparaît tout à fait secondaire et vu la taille du groupe, le mouvement vers l’Entry n’est pas le plus complexe à mettre en œuvre. Le mouvement inverse, vers le Premium ou le luxe est plus délicat et coûteux comme chacun sait. Mais sur ce versant du marché, le plus rentable soit dit en passant, Volkswagen est bien pourvu.

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