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Industrie

Quand les technologies embarquées peuvent faire la différence

Publié le 14 mai 2014

Par Clotilde Chenevoy
9 min de lecture
Aujourd’hui, les véhicules regorgent d’électronique embarquée, qu’il s’agisse d’aides à la conduite ou de systèmes multimédia, et ces solutions peuvent permettent de faire la différence pour conclure une vente. Pour autant, leur promotion reste encore mal maîtrisée. L’avènement des tablettes en concessions pourrait bien venir changer la donne.

Design, bonne expérience dans la marque et prix. Voici le top 3 des critères qui rentrent en ligne de compte lors de l’achat d’un véhicule. La connectivité et plus globalement l’électronique embarquée ne pèsent pas, encore, dans la décision, mais représentent un point d’entrée pour le client. Dernièrement, on a pu voir sur le petit écran le dernier Nissan Note se défendant des “dangers” de la ville grâce à son Safety Shield (bouclier de sécurité) ou encore une cascadeuse testant le système de Ford pour se garer automatiquement.

“L’électronique embarquée représente un argument supplémentaire à l’achat, estime Thierry Gennetay, directeur marketing GM France. Par exemple, aujourd’hui, il faut être connecté, surtout pour toucher la clientèle professionnelle. Autre exemple, dans la publicité de l’Opel Adam, nous mettons en avant que le véhicule dispose de la reconnaissance vocale Siri. C’est un argument fort. Plus que l’électronique embarquée, l’innovation, globalement, fait vendre.”

Même son de cloche chez Seat, qui estime également que les attentes des automobilistes ont changé. “Aujourd’hui, il y a des technologies que les automobilistes considèrent comme obligatoires, à savoir le Bluetooth ou encore la radio, explique David Gendry, directeur marketing Seat France. Après, il y a les équipements “Nice to have”, comme le Lane Assist ou encore les suspensions pilotées. Et demain, d’autres systèmes deviendront des prérequis, comme la navigation. Mais, pour vendre de l’électronique embarquée, il faut réaliser un énorme travail de pédagogie. Certaines technologies se révèlent très anciennes, comme l’ESP, mais ne sont toujours pas très bien comprises. Elles se trouvent noyées sous des acronymes et le bénéfice client ne ressort pas. Il faut les comprendre pour les valoriser et les faire payer.”

Guillaume Pierre, directeur de la concession Auto Diffusion Saint-Etienne (Renault-Dacia), appartenant au groupe Thivolle, assure que les “équipes de ventes présentent les différents équipements disponibles de série et également ceux en option auxquels le client n’aurait pas pensé. C’est à ce stade que l’on peut faire la différence par rapport à un modèle de la concurrence. Les technologies embarquées pouvaient auparavant sembler exotiques, alors qu’aujourd’hui, sans solution de navigation par exemple, vous pouvez rater une vente. C’est une condition nécessaire, mais non suffisante”.

Et dans un contexte économique morose, où les ventes ralentissent, il convient de travailler davantage les montées en gamme. Un point non négligeable pour le vendeur, car les commissions peuvent s’avérer supérieures à celle de la voiture ! On retrouve d’ailleurs cette situation dans le monde de l’électronique grand public. Les magasins comme Darty ou encore Boulanger vendent parfois des produits à des prix très proches du prix d’achat si le client souscrit à une assurance ou encore à une extension de garantie. Sur ce type de services, les marges se révèlent plus attractives que le produit lui-même.

Formations régulières

Les constructeurs mettent donc en place des plans de formation pour informer leurs troupes des dernières technologies. Ils sont conçus en interne, bien souvent par les équipes de la première monte. “Nous proposons des formations à l’attention du réseau pour accompagner toutes les évolutions de nos produits : Sensus Connect, Connected Touch, Volvo On Call, City Safety, Détection piéton, Volvo ID, My Volvo…, détaille Thomas Pichard, Network Competence Development Manager chez Volvo Car France. Ainsi, charge aux commerciaux et réceptionnaires d’en faire la promotion durant leurs entretiens de vente, lorsque cela est opportun. Nos commerciaux mettent en avant nos avantages concurrentiels, de la même façon qu’ils mettent en avant nos nouveaux moteurs. Mais il n’y a pas de règle, si cela n’intéresse pas le client, nous n’insisterons pas.”

La logique reste relativement similaire chez les autres constructeurs. A chaque lancement de nouveaux produits, les vendeurs suivent un module dédié à l’électronique embarquée, se focalisant surtout sur les nouveautés, avec un pendant e-learning en complément. Généralement, un modèle inaugure une solution avant que celle-ci ne se généralise à la gamme. Autrement dit, des piqûres de rappel sont faites régulièrement. Par exemple chez Nissan, la technologie Google Send-to-Car permet de programmer son itinéraire depuis une tablette ou un ordinateur, puis de l’envoyer à son véhicule. Inauguré sur le nouveau Note, il équipe désormais tous les modèles du constructeur. Le schéma se reproduit avec les systèmes embarqués R-Link chez Renault ou encore IntelliLink chez GM.

Malgré ces programmes, quelques distorsions peuvent se faire sentir sur le terrain… “Lors du dernier salon de Genève, tous les systèmes d’infotainment se trouvaient particulièrement mis en valeur, résume Stéphane Lagresle, directeur marketing infotainment chez Harman. Malgré tout, on constate que les velléités des sièges de mettre en avant ces systèmes ne se retrouvent pas toujours sur le terrain. D’autant que, pour un véhicule comme une Audi A3, trois systèmes sont présents au catalogue, le premier étant simplement un dispositif audio, et les deux autres couplant audio et navigation. Et les vendeurs ne disposent pas toujours des bons arguments pour expliquer les différences.” Le directeur marketing regrette également que les configurateurs des marques sur Internet décrivent parfois en seulement quelques lignes des solutions d’infotainment valant 2 500 euros. “Un client doit pleinement comprendre ce qu’il achète pour ce prix, et il pourra ensuite tester en concession les options qui l’intéressent, assure-t-il. Les informations sur Internet doivent bénéficier de toute l’attention des marques, car les chiffres démontrent qu’il y a dix ans, un client venait en concession 5,6 fois avant d’acheter son véhicule. Aujourd’hui, ce chiffre a chuté à 1,4 fois. Autrement dit, le vendeur ne verra le client qu’une à deux fois seulement pour convaincre et peut-être conclure sa vente. Ce dernier s’est déjà largement renseigné depuis les sites Internet des constructeurs.”

Le constat se révèle identique chez Bosch, qui fournit des technologies de sécurité et des systèmes d’infotainement. En effet, pour Franck Cazenave, directeur marketing chez Bosch, “peu de constructeurs font appel à nos services pour former leur réseau aux différentes technologies que nous proposons en aides à la conduite ou en infotainment. Pourtant, pour emporter l’adhésion du client final, les vendeurs doivent saisir les enjeux. Bien souvent, les technologies sont commercialisées dans des packs, sans plus de détail”.

Nouveaux comportements d’achats

Le fait que les clients disposent d’une mine d’informations en ligne, couplé à l’avènement des tablettes en support de communication, a poussé les constructeurs à revoir leur copie quant à la présentation du produit. Depuis désormais trois ans, dans le cadre du projet Connected People, Seat a mis en place des Genius. Comme sur le schéma des Apple Store, les clients dialoguent avec des experts qui présentent les technologies et les guideront dans leur choix. “Par exemple, si l’automobiliste roule beaucoup, avec des risques d’endormissement, on lui conseillera la fonction Lane Assist, illustre David Gendry, directeur marketing Seat France. Et au-delà du prix de 250 euros, on lui explique le bénéfice qu’il pourra en retirer.

Par ailleurs, depuis un mois, tous les chefs de vente et vendeurs reçoivent leur client équipés d’un iPad qui contient les brochures et les vidéos des différents modèles et des options disponibles. Ils peuvent ainsi s’appuyer dessus pour donner un complément d’informations au client. Au final, nous disposons de beaucoup de matériels, mais il se révèle complexe de l’amener aux clients. Nous pouvons mettre 40 vidéos en ligne, présentant tous les aspects d’un système embarqué. Toutefois, les retours restent peu probants. Il faut amener la bonne information au client, selon ses besoins. Enfin, l’usage de tablettes valorise l’image du réseau auprès des clients qui ne nous connaissaient pas. De plus, cela permet d’élever la discussion sur la technologie.”

Le groupe Thivolle déploie une démarche similaire, initiée par Renault. Ainsi, Guillaume Pierre explique que “dans le nouveau concept Renault Store, le parcours client se trouve au cœur de la réflexion. Nous disposons de nouveaux outils, comme les tablettes, pour guider le client dans son acte d’achat et lui montrer concrètement son véhicule définitif en le configurant devant lui. On peut également dupliquer l’écran sur un média plus grand, par exemple pour choisir la teinte ou encore les jantes. Attention toutefois, on nous demande encore des catalogues papier !

Dans ces tablettes, nous disposons aussi de modules qui servent à former les équipes. Le vendeur doit pouvoir expliquer avec aisance les différentes options que le client aura déjà repérées en ligne. Et l’autre moment capital se situe lors de la prise en main du véhicule par le client. Les metteurs en mains, souvent les assistants commerciaux, partent maintenant également en formation pour appréhender les différents systèmes des véhicules. La remise des clés clôture la vente, et il se révèle important que le client sache connecter son smartphone ou utiliser l’appareil de navigation. Il doit prendre conscience de la richesse de la voiture qu’il vient d’acquérir”.

Et demain, toujours plus connecté

Cette montée en puissance de l’électronique embarquée continuera dans les années à venir. Du côté des aides à la conduite, Franck Cazenave, de Bosch, explique “pour obtenir 5 étoiles aux nouvelles normes EuroNCap, certains véhicules devront être équipés de l’aide au freinage d’urgence. Des capteurs anticiperont les collisions et si, après un signal envoyé au conducteur, aucune réaction ne se passe, le véhicule freinera de lui-même. Autrement dit, les véhicules disposent d’aides à la conduite de plus en plus poussées, qui nécessitent de former correctement l’utilisateur final. Si une vague information lui est transmise, son expérience de conduite pourra être très surprenante. D’ailleurs, dans le futur, les formations aux nouvelles technologies se multiplieront. Et nous nous tenons prêts à accompagner les constructeurs afin de donner une vision cohérente des systèmes à l’acheteur”.

Du côté de l’infotainment, la voiture connectée se profile à l’horizon, chaque constructeur proposant déjà des solutions et réfléchissant à des applications futures. Ainsi, le système IntelliLink représente la connectivité vue par General Motors, s’appuyant sur un principe de miroir du smartphone. “Le smartphone représente la vie digitale du client, avec ses contacts, ses rendez-vous, sa messagerie ou encore sa musique, explique Thierry Gennetay. Il a créé tout un écosystème, et nous voulons qu’il puisse le retrouver dans son véhicule.”

Même si les constructeurs s’attachent à ne pas perdre l’automobiliste en lui laissant un univers connu – celui de son smartphone –, le besoin de pédagogie, particulièrement lors d’essais ou au moment de la prise en main du véhicule, sera plus que jamais nécessaire. “Nous avons des clients qui demandent expressément des informations sur nos systèmes embarqués, notamment R-Link, explique le directeur marketing. Notre grande chance, c’est que le client a déjà lu beaucoup de choses en ligne, mais doit se rendre en concession pour se rendre compte visuellement du produit. D’où l’importance des essais, afin d’éprouver tout le contenu technologique et vraiment faire la démonstration de l’intérêt de ces solutions.”
 

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