Paquet automobile européen : ce que la France est prête à accepter pour l'après-2035

À quelques jours de la présentation par Bruxelles de ses arbitrages sur le paquet automobile, le 16 décembre 2025, la France affine sa position.
Dans un courrier adressé le 8 décembre 2025 à la Commission européenne, que Le Journal de l'Automobile a pu consulter, cinq ministres français (Roland Lescure, ministre de l’Économie, Monique Barbut, pour la Transition écologique, Philippe Tabarot, aux Transports, Sébastien Martin, ministre délégué chargé de l’Industrie, et Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe) se disent prêts à accepter des "flexibilités ciblées" dans l’interdiction de la vente de voitures thermiques et hybrides neuves à partir de 2035.
Mais Paris pose une condition ferme : ces flexibilités ne doivent bénéficier qu’aux véhicules effectivement produits au sein de l’Union européenne, au sens géographique strict. Un détail en apparence technique, mais qui pourrait redistribuer les équilibres industriels du Vieux Continent.
Même à ce stade de la négociation, la précision a son importance. Ainsi, les usines du Maroc ou de Turquie, pourtant centrales dans les stratégies industrielles de Renault, Stellantis ou Ford, ne seraient pas prises en compte, à ce jour, dans les critères de valeur ajoutée européenne.
Neutralité technologique sous conditions
Pour la première fois, le gouvernement français soutient un relâchement mesuré des règles fixées en 2022 : maintien limité des hybrides rechargeables, prise en compte des carburants synthétiques, ou encore assouplissement temporaire des trajectoires CO₂ pour les voitures particulières et les utilitaires. Une position qui prouve l'avancée des discussions entre Paris et Berlin.
Cette ouverture répond à une réalité politique : l’Allemagne, l’Italie, plusieurs pays d’Europe centrale, mais aussi plusieurs constructeurs réclament, depuis des mois, une révision de l’échéance 2035, dans un contexte de baisse des volumes, de ralentissement de la demande électrique et de pression de la concurrence chinoise.
Mais le courrier français place immédiatement un garde-fou. Toute flexibilité doit être conditionnée à des "mécanismes clairs d’incitations réglementaires à la production en Europe", afin de protéger l’emploi industriel et d’ancrer les investissements sur le territoire européen.
Le courrier insiste longuement sur les investissements massifs déjà engagés dans la filière électrique en France et en Europe comme les gigafactories en cours de déploiement, les usines de moteurs électriques et l'électronique de puissance.
Paris craint qu’un assouplissement trop large de 2035 ne déstabilise ces investissements. D'où la ligne défendue par Roland Lescure chez nos confrères de RTL : "Si vous voulez vendre encore un peu de moteurs thermiques en 2035, très bien, mais il faut qu’ils soient faits en Europe. C'est ce qu'on appelle la préférence européenne, avec au moins 75 % de la valeur ajoutée faite en Europe."
Le report du plan européen Made in Europe
Mais ces discussions se voient contrariées à ce jour par le report par la Commission européenne à fin janvier 2026 de la présentation de son projet de loi Made in Europe. Ce texte doit notamment y préciser les contours d'un contenu local afin d'ouvrir un accès aux marchés publics, les aides à l'achat ou encore le verdissement des flottes.
Face à ce report, la France tente ainsi d'obtenir au moins des garanties sur ce contenu local qui devraient être précisées lors de l'annonce du paquet automobile européen. Le 16 décembre 2025 pourrait devenir une date pivot : celle où l’Union amendera sa trajectoire vers le tout-électrique, tout en définissant les contours d’une préférence industrielle.
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