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Industrie

“Nous étions des discounters et devenons des acteurs de marché”

Publié le 4 mars 2014

Par Frédéric Richard
4 min de lecture
Avec des progressions à deux chiffres chaque année, Allopneus occupe désormais une place de choix sur le marché. Mais Didier Blaise sait qu’il faut rester prudent et innover sans cesse pour rester dans la course.
Didier Blaise, fondateur et directeur ­général d’Allopneus.com.

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Quel est votre sentiment concernant la vente aux professionnels sur Internet ?
DIDIER BLAISE.
Nous avons eu des demandes émanant d’enseignes qui ne disposent pas de leur propre structure et s’approvisionnent uniquement en direct chez les manufacturiers pour leurs centres de montage. Mais notre configuration de stock est aujourd’hui adaptée à notre besoin “grand public”. Nous avons des limites en termes de rotation, de nombre de marques… Se lancer dans le B-to-B reste assez complexe, il nous faudrait plus de souplesse. Je ne veux pas faire de volumes avec les professionnels, pour ne pas déshabiller mes stocks et dégrader mon service aux particuliers.

JA. Le modèle économique des pure players est basé sur l’écoulement de gros volumes et sur des marges réduites. Cela signifie qu’à un moment, condamné à la progression des ventes, on augmente fatalement la structure, et la rentabilité devient précaire. Comment gérer ce cercle vicieux ?
DB.
Il est vrai qu’il y a une sorte de fuite en avant dans le fait de gérer de la croissance. C’est presque aussi compliqué que de gérer une entreprise en difficulté ! Sur notre marché, les marges se sont encore dégradées, les réseaux physiques ont tiré les prix, les centres-autos aussi… En réponse, nous cherchons à amener une promesse de prix, mais il faut admettre qu’elle n’est plus la même qu’il y a cinq ou six ans. Nous étions des “discounters”, nous sommes devenus des acteurs du marché sur Internet. Notre différenciation doit maintenant se faire sur le service, la disponibilité, la logistique…

JA. Jusqu’où iront les ventes de pneus sur Internet ?
DB.
Il y a quelques années, j’aurais volontiers parié sur un maximum de 10 % des ventes totales. Et force est de constater qu’aujourd’hui, les ventes sur Internet ont déjà dépassé les 12 %. Les manufacturiers estiment que le pneu en ligne peut monter jusqu’à 20 %. Et les chiffres des requêtes Google semblent montrer que cela peut même aller plus loin…

JA. Et le développement à l’étranger ?
DB.
Nous y pensons, mais cela ne constitue pas une priorité. Quand nous sommes arrivés sur le marché français, après certains concurrents, nous avons attaqué sur les prix, mais aujourd’hui, compte tenu des marges, je ne peux plus me permettre d’aller investir en Allemagne par exemple, en baissant de 10 points mes prix pour acheter des PDM. Par ailleurs, je rappelle que la base de notre succès en France, c’est aussi le réseau de montage, ce qui est très difficile à créer et à gérer dans un nouveau pays en partant d’une feuille blanche.

JA. Disposez-vous d’accords-cadres avec des clients flottes ?
DB.
Le sujet fait partie de nos objectifs pour l’avenir. Mais il nous faut encore optimiser notre maillage de centres partenaires. Aujourd’hui, nous visitons tous nos centres fixes afin de les sensibiliser à ce marché d’avenir et recueillir leurs réactions, car cela implique tout de même quelques modifications d’ordre culturel dans leur organisation, en termes de politique tarifaire, de facturation centralisée…

JA. Que représentent les marques exotiques dans votre activité ?
DB.
Les gens viennent sur Allopneus pour obtenir des prix, mais recherchent en fait du Premium au meilleur coût. Ainsi, les marques exotiques enregistrent une part assez faible dans nos ventes. Les marques chinoises, par exemple, ne font pas plus de 10 % chez nous. Par ailleurs, la France n’est pas un marché de “budget”, contrairement au Royaume-Uni par exemple.

JA. Quelle est aujourd’hui la valeur de votre stock ?
DB.
La valeur actuelle du stock est de 40 millions d’euros, ce qui se révèle extrêmement compliqué à supporter. Car nous sommes ponctuellement très pénalisés par ce volume. Par exemple à la fin de l’été, quand nous devons rentrer tous les pneus hiver. Avec la LME, les paiements doivent se faire à 45 jours, alors que cinq ans en arrière, j’achetais les pneus hiver et les payais à 110, 120, voire 150 jours, bref, après leur vente. Mais je n’ai pas le choix, si je ne prends pas les volumes en juin, le taux de service baisse énormément chez les manufacturiers. Donc, il faut en permanence savoir échanger avec les banquiers…

JA. Quels sont vos gros chantiers à l’avenir ?
DB.
Nous avons sorti 2,3 millions de pneus en 2013 sur notre plateforme d’Oignies. L’an prochain, nous tablons sur 2,5 millions d’enveloppes, mais à partir de 3 millions, on va saturer. Il serait sans doute intéressant de disposer d’un second relais en France, mais pas avant deux ans de toute façon. Quant à savoir s’il vaut mieux un site ou bien statuer sur plusieurs entités régionales, bref, mettre en place un fonctionnement différent pour améliorer encore le service, notamment avec nos camionnettes, c’est une réflexion à mener.

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