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Industrie

Le marché des lubrifiants toujours en négatif

Publié le 12 décembre 2019

Par Marc David
5 min de lecture
Poursuivant ses fluctuations, le marché 2019 des lubrifiants pourrait se conclure sur des résultats étales, voire en légère hausse. Si l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen pourrait avoir un impact, le feu vert donné à la réouverture partielle du site a de quoi rassurer une bonne partie de la profession.
Dans la chimie de la lubrification, l’additif demeure le levier le plus important.

Avec 217 000 tonnes commercialisées sur le marché intérieur de janvier à septembre 2019, dont 121 153 tonnes pour les seules voitures de tourisme, le secteur des lubrifiants automobiles accuse une baisse de 2,6 %, ceci de source CPL (Centre Professionnel des Lubrifiants). A lui seul, le mois de septembre, pourtant d’ordinaire toujours synonyme de trafic dense, accuse un retrait particulièrement marqué de 6,5 %. De quoi engendrer une certaine perplexité !

 

Renseignement pris auprès de l’organisme de statistiques, il s’agirait non pas d’un retrait significatif du marché global mais plutôt de la conséquence d’une fluctuation marquée du volume déclaré par l’un des acteurs, celui-ci ayant réalisé un tonnage important sur un trimestre entier en 2018 (dont septembre). D’où un retour à la normale en 2019. Au-delà de cette précision, et c’est sans doute là que se situe le plus important, le marché demeure légèrement positif en terme d’année courante, puisqu’il enregistre une progression de 0,7 % (294 250 tonnes) entre le 1er octobre 2018 et le 30 septembre 2019.

 

Une tendance à laquelle souscrit volontiers Yacco, avec des résultats nettement positifs de janvier à septembre, aussi bien en France qu’à l’export. « De mon point de vue, mais aussi compte tenu des différents échanges avec d’autres acteurs, la tendance serait au moins à l’équilibre voire à la légère hausse, une situation qui devrait perdurer jusqu’en fin d’année même s’il est toujours difficile de se projeter, rappelle Eric Candelier, président de Yacco. Une certitude, nous n’avons pas ressentie de baisse significative en Après-Vente quant à la première monte, il est un fait que le secteur se révèle plus compliqué par rapport à 2018. D’ailleurs, au niveau des premiers pleins réalisés sur le marché intérieur, le segment devrait ressentir les effets de certaines décentralisations de production, surtout en 2020 ».

 

Une situation pour le moins tendue

 

Exemple typique, la nouvelle 208, conçue dans l’usine marocaine de Kenitra. Reste que, selon Eric Candelier, les fondamentaux du marché ne sont pas mauvais, comme par exemple le parc qui poursuit sa progression (32 millions d’unités en VP + VUL) avec des mouvements fluctuants quant aux motorisations essence (12,8 millions d’unités) ou diesel (19,8 millions d’unités) ; ceci sachant que la moyenne kilométrique annuelle demeure plus élevée pour le diesel que pour l’essence (15 895 km contre 8988 km).

 

Maintenant, impossible d’évoquer le marché des produits finis sans évoquer le cas Lubrizol, leader européen du secteur des additifs. Un marché pesant au global 570 590 tonnes en 2018 de source CPL, ceci pour ce qui concerne la production nationale. Pour rappel, le spectaculaire incendie de l’entrepôt de stockage du site de production de Rouen a eu lieu le 26 septembre dernier, avec toutes les conséquences que l’on sait (notamment pour les Agriculteurs). Un peu moins de trois mois après, soit mardi 11 décembre, le Préfet de Seine Maritime, suivant l’avis du Comité départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst), a donné son feu vert au projet de réouverture partielle du site classé Seveso seuil haut. De quoi soulager les salariés (dont l’effectif est compris entre 250 et 500 personnes), même si cette réouverture ne concerne que deux unités de mélange de produits avec un stockage réduit de manière drastique.  

 

Une chose est certaine, cette réouverture partielle avant la fin de l’année en cours était vivement souhaitée par Frédéric Henry, président de l’entreprise, et bien sûr, par une bonne partie de la profession. En effet, plutôt que d’évoquer des répercussions sur les coûts, certains acteurs ont évoqué des difficultés d’approvisionnement ou à minima une situation plutôt « tendue », en dépit des stocks existants. Avérées ou non (discrétion de rigueur à ce niveau…), ces difficultés ont toutefois amené Total Lubrifiants, l’un des principaux clients de Lubrizol, à envoyer un courrier à ses clients, évoquant « le cas de force majeur » face à une éventuelle pénurie. Une disposition visant à se protéger juridiquement d’éventuels recours de la part de ses clients en cas de non-respect de ses engagements contractuels.

 

Un secteur très concentré avec de grosses sociétés

 

Certes, Lubrizol France, principale filiale étrangère de Lubrizol Corporation créée en 1954, dispose de deux autres sites de production sur le territoire, au Havre et à Mourenx près de Pau. De quoi faire face à la demande ? Pas sûr, eu égard à la notion de spécialisation. A ce sujet, une précision s’impose. S’il se révèle relativement concurrentiel, le secteur de la chimie des additifs de lubrification est très concentré avec de très grosses sociétés intervenant sur le marché européen, via des formulations répondant aux exigences des constructeurs européens. En effet, outre Lubrizol (membre du groupe Warren Buffett), figurent notamment Infineum (avec pour actionnaires la Société des Pétroles Shell et ExxonMobil France), Chevron Oronite ou encore Afton, dans une moindre mesure. « Néanmoins, la particularité de ce secteur fait qu’une technologie d’additif donnée (par exemple pour un lubrifiant de grade 0W-30) peut très bien se positionner exclusivement chez un seul acteur, eu égard à son coût de développement souvent très onéreux, et également au marché dicté par les homologations, explique Eric Candelier. Un constat particulièrement vrai pour des produits en début de vie ».

 

D’où parfois des positions de quasi-monopole chez les additiveurs sachant aussi qu’une chimie « alternative » peut être conditionnée par des capacités de production, voire de délais. Pas simple ! Et Eric Candelier de rappeler fort justement : « dans la chaîne de valeur du lubrifiant, l’additif demeure le levier le plus important, l’élément qui fait la différence ». Cas typique, les additifs employés dans la formulation des lubrifiants destinés à lutter contre les phénomènes LSPI (Low Speed Pre Ignition), soit les phénomènes de pré-allumage à faible vitesse rencontrés sur certains moteurs essence récents. Ceci sans parler bien sûr des additifs plus classiques, tels les améliorants de l’indice de viscosité, les antioxydants-antiusure, dispersants, etc., sans lesquels un moteur ne fonctionnerait pas bien longtemps !

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