Le marché des lubrifiants toujours à la baisse

Moins 12,8 % en octobre 2022, -8,2 % en novembre et -7,2 % en décembre. Les traditionnelles statistiques du CPL (Centre professionnel des lubrifiants), mises en ligne dernièrement, parlent d'elles-mêmes : le dernier trimestre de l'année 2022 s'est avéré très négatif pour le marché des lubrifiants automobiles. Sans surprise, les mouvements sociaux d'octobre, et plus particulièrement ceux relatifs au blocage des raffineries, ont sans nul doute joué un rôle majeur dans ces résultats. Avec des répercussions sur les deux derniers mois de l'année.

Ainsi, au final, avec 280 410 tonnes de lubrifiants commercialisés sur le marché intérieur, l'exercice 2022 se boucle avec un recul plus "acceptable" de - 3,8 %. Une différence toutefois substantielle par rapport à 2021, année largement positive (+6 %). Reste que, en prenant en compte le seul segment des "moteurs voitures de tourisme" (160 564 tonnes), le recul se situe même dans la norme de "l'érosion naturelle" puisque équivalent à -1,4 %. Sur ce volume, le segment "Essence et Mixte", toujours largement majoritaire avec 143 774 tonnes, enregistre une progression de 1,3 %, tandis que le segment "Diesel tourisme" (12 598 tonnes) accuse un retrait très marqué de 21,6 %.

Un relatif retour à la normale l'an passé

Toujours côté chiffres, et ceci par rapport au volume global, les pétroliers représentent 48,6 % de parts de marché, contre 44,1 % des parts pour les IG (Indépendants du Graissage) et 7,3 % pour les autres intervenants sur le secteur. Mais retour au volume enregistré en 2022. Plutôt que de se focaliser sur les trois derniers mois de l'année, Eric Candelier, le président de Yacco, préfère appréhender plus globalement la séquence 202, 2021, 2022.

"Tandis que 2020, l'année Covid, a engendré une perte de volume assez marquée (-7,5 %, et même -9,5 % pour le segment des moteurs VL, NDLR), 2021 peut être considérée comme l'année de rattrapage avec la récupération de volumes de manière importante, voire surprenante. Et même des records de livraison battus sur certains mois, rappelle-t-il. Pour ce qui concerne 2022, il faut parler d'un relatif retour à la normale, ceci avec des problèmes de pénurie sur certains additifs et en particulier ceux des huiles de transmissions".

Et celui-ci d'ajouter : "Maintenant, il est clair que le contexte social sur le second semestre, avec l'inflation et le budget des ménages en baisse, a joué un rôle sur les résultats. D'ailleurs, le constat peut se transposer à ce début d'année 2023 puisque, au vu de nos remontées terrain, l'activité en atelier se révèle assez calme. De quoi nous amener à une certaine prudence pour la suite". Ceci en dépit des statistiques encourageantes du CPL sur janvier, dans la mesure où celles-ci font état d'une progression de 1,9 %.

Bref, dans ce contexte, Yacco accuse un très léger tassement des volumes en 2022 par rapport à 2021, sachant que les résultats demeurent toutefois supérieurs à ceux de 2019, année de référence absolue. Plutôt gratifiant donc, mais pas forcément transposable à d'autres sociétés. Pour ce qui est de l'inflation, et il s'agit là d'une des caractéristiques de l'exercice 2022, la plupart des acteurs (dont Yacco) ont passé deux hausses tarifaires sur leurs produits, chacune de l'ordre de 30 à 40 centimes d'euros. Au cumul, il faut parler de 30 à 35 % de hausse sur l'année.

Une situation toujours tendue sur les matières premières

La conséquence de l'instauration de l'éco-contribution relative à la REP (responsabilité élargie des producteurs) mais, surtout, de l'augmentation du coût des matières premières, bien entendu. Selon Eric Candelier, la pénurie relative aux additifs (et donc les contingentements imposés) serait rentrée dans l'ordre aujourd'hui, bien que la situation demeure toujours quelque peu tendue.

"Pour ce qui concerne les huiles de base de groupe 3, groupe 3+ et groupe 4, soit les huiles de base destinées à la formulation des 0W et 5W des véhicules récents, la tension demeure également réelle avec des prix qui ne fléchissent pas, explique-t-il. La raison est une demande forte, notamment de la Chine en pleine phase de redémarrage économique, pour une offre demeurant insuffisante".

Au-delà de cet aspect, une question s'impose. La progression des véhicules électriques en termes d'immatriculations, ceci sur un marché total VP à -7,8 % en 2022, a-t-elle un impact sur les ventes de lubrifiants ? "Nous ne le ressentons pas vraiment sur nos ventes, note le président de Yacco. Et pour cause. Le parc de VE se révèle infime par rapport au parc total qui continue d'ailleurs à vieillir".

Pas faux. Selon AAA Data en effet, le parc automobile atteint désormais 11,3 ans d'âge moyen, contre 11 ans en 2021. Ainsi, sur les 41,238 millions de voitures particulières en circulation, près de 27 millions d'entre elles ont plus de dix ans. Partant de là, les espacements de vidange fixés par les constructeurs le sont à la fois en kilométrage mais aussi dans la durée. A savoir, entre 20 000 et 30 000 km en fonction des motorisations (essence et diesel) pour une durée maximale de 2 ans, sachant que les véhicules de grande série sont calés sur un an.

Dans ce contexte, les chiffres publiés par le CPDP (Comité professionnel du pétrole) donnent une idée du trafic sur l'ensemble de l'année 2022.

En effet, les livraisons de carburants routiers se sont établies à 49,290 millions de m3, en hausse de 2,2 % (+10,6 % pour le super ; -0,5 % pour le gazole) par rapport à 2021.