Décroissance en trompe-l'oeil pour Valeo
Il y a un an, Jacques Aschenbroich, le PDG de Valeo, et son état-major, donnaient l'alerte en signalant qu'une crise couvait. Elle a depuis balayé l'industrie automobile. C'est dans un contexte de repli de 7 % du marché mondial que l'équipementier a présenté ses résultats financiers du premier semestre 2019. Le bilan fait mention d'un chiffre d'affaires en retrait de 1 % par rapport à l'an passé, à 9,776 milliards d'euros. Isolé, le segment de la première monte accuse une baisse de 3 % à périmètre et taux de change constant, en s'établissant à 8,22 milliards d'euros. Le groupe souligne néanmoins que rapporté à la production mondiale, ce total se place 4 points au-dessus de la tendance.
"En 2018, les principaux marchés ont été affectés, dont l'Europe qui a perdu 4 % et la Chine 12 %. Une situation qui s'est détériorée en 2019, note Jacques Aschenbroich. L'Europe s'est encore contractée de 5 % et la Chine affiche -16 %". Un phénomène qui n'a pas été sans conséquence sur le chiffre d'affaires de Valeo. Il rend 2 % dans la zone Europe/Afrique (à 4,02 milliards d'euros) et 19 % en Chine (861 millions d'euros). Au terme du premier semestre 2019, Valeo peut cependant se réjouir de la progression du CA en Amérique du Nord. L'équipementier gagne 6 %, à 1,62 milliard d'euros.
Durant la période, la marge opérationnelle a retrouvé des couleurs. Elle s'élève à 5,3 % du chiffre d'affaires, soit 0,5 point de mieux que l'an passé pour s'élever à 514 millions d'euros (+15 %). Le résultat net part du groupe atteint 162 millions d'euros, soit 74 % de plus, en prenant en compte une charge exceptionnelle de 30 millions d'euros. Rapporté au CA, cela correspond à 1,7 %, soit 0,7 point de plus qu'au premier semestre 2018.
Percée des ADAS
La vente de systèmes de visibilité demeure le premier marché de Valeo. Le groupe y réalise toujours un chiffre d'affaires supérieur à 3 milliards d'euros, malgré l'effritement. Les systèmes d'aide à la propulsion conservent la deuxième place, avec 2,56 milliards d'euros au bilan. Le ralentissement de la production entraine malgré tout un repli de 4 % du CA généré. Pour Valeo, les systèmes de confort thermique ont également glissé de 4 %, à 2,33 milliards d'euros. Le seul segment en croissance est en réalité celui du commerce des aides à la conduite (ADAS). L'équipementier français grappille 2 %, à 1,93 milliard d'euros, selon le rapport semestriel.
Le premier semestre a été porteur en termes de prise de commandes. Valeo a signé des contrats pour un total de 11,1 milliards d'euros, dont 42 % concernent des innovations. Le groupe se félicite d'être 1,3 fois supérieur au marché. 47 % des clients proviennent d'Europe et d'Afrique, 33 % sont originaires d'Asie avec notamment 17 % d'entre eux en Chine (dont 24 % sont des constructeurs locaux). L'Amérique du Nord pèse 17 % de ce volume. "En 2019, nous devrions cumuler 24 milliards d'euros de prise de commandes", lâche Jacques Aschenbroich. Le PDG observe que "toutes les préoccupations des constructeurs portent sur l'électrification et l'ajout de technologies ADAS, ce qui a un impact sur toutes les autres composantes du véhicule et permet de placer des produits". Le moteur électrique de 48 V profite de cet engouement et s'embarquera enfin sur un modèle de série, en début d'année 2020. La direction de Valeo estime avoir "10 à 20 ans" devant elle avec cette solution transitoire.
Des économies plus grandes que prévues
Interrogé sur le rapprochement entre l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi et Waymo pour la conception du véhicule autonome, Jacques Aschenbroich prend la nouvelle avec confiance. Il ne classe pas la société californienne dans la liste des concurrents mais dans celle des clients potentiels. Raison pour laquelle Valeo a installé une équipe commerciale outre-Atlantique pour saisir les nouvelles opportunités. "Nous avons signé un contrat de fourniture d'équipements pour un robot-taxi d'un montant d'un milliard d'euros", confie le p-dg français, sans révéler l'identité du destinataire. Valeo conserve par ailleurs 15 % dans Navya, le constructeur de navettes autonomes.
L'entreprise sortie récemment du CAC40 va s'employer à regagner sa place dans le cercle fermé. Mais outre le rythme de croissance des ventes, le groupe travaille sur un plan d'économie. La R&D, le coût des matières premières, la fusion de services ou encore le non-remplacement de cadres sont autant de leviers actionnés par Valeo. Amorcé en début d'année 2019 avec l'ambition d'économiser 100 millions d'euros, l'ampleur des premiers effets conduisent Jacques Aschenbroich à estimer que le total pourrait se monter finalement à 250 millions d'euros, hors économie sur les frais de structure.