Bien acheter pour augmenter sa rentabilité
Le paysage de la carrosserie évolue, comme l’ensemble des métiers de la réparation automobile. Pour partie, les raisons des mutations sont identiques. Elles tiennent à la crise, bien entendu, et, plus globalement, à un contexte économique et concurrentiel qui se tend naturellement au fil des ans. Cependant, dans l’activité de carrossier, d’autres phénomènes viennent compliquer un peu plus la donne.
La pression incessante des donneurs d’ordre, pour commencer, avec des assureurs toujours plus fermes sur les conditions de réparation. Sans oublier la sempiternelle baisse des sinistres, qui fait régulièrement chuter la fréquentation des ateliers. Face à ce constat, il s’agit de décrypter les moyens mis en œuvre par les enseignes pour accompagner leurs adhérents dans un domaine clé de la rentabilité de leur atelier : l’achat de matériel. Produits, consommable, gros équipement, formation…, les réseaux déploient beaucoup d’énergie pour faire évoluer les mentalités.
De l’aveu de tous, les carrossiers se montrent aujourd’hui très demandeurs d’accompagnement concernant leurs achats de matériel. Deux raisons à cela. Tout d’abord, ils considèrent que c’est le rôle de leur tête de réseau et de leur distributeur de les conseiller au mieux et de les tenir informés des nouveautés les plus à même de les faire progresser dans leur activité quotidienne. Par ailleurs, “ils ont la tête dans le guidon en permanence, et ont bien assez de leur métier à gérer, pour s’occuper de cela. Ils n’ont plus le temps de se renseigner par eux-mêmes, de se rendre sur les salons…”, analyse Frédéric Deroy, responsable du réseau Top Carrosserie. Ils attendent en fait du matériel nouveau pour augmenter leur productivité, le nerf de la guerre.
Avec l’évolution structurelle des véhicules, l’introduction des tôles THLE a bouleversé la donne quant à l’équipement des carrossiers, dans le domaine des pointeuses, notamment. Aujourd’hui, un certain nombre de carrossiers travaillent avec des machines pas forcément obsolètes, mais qui ne répondent pas toujours aux spécifications techniques requises par ces nouveaux matériaux. “Il est de notre devoir de les informer de ces évolutions, car elles influent sur la qualité de la réparation et sur la sécurité, d’une part, mais également sur la pérennité de leur entreprise face au paysage automobile”, poursuit Frédéric Deroy.
Les carrossiers sont assez réceptifs à ce discours de mise à jour des matériels, même si cela induit des investissements souvent très lourds, pour des affaires aux marges qui s’amenuisent d’année en année. Le discours des réseaux porte donc ses fruits, relayé, bien sûr, par celui des assurances, qui incitent leurs partenaires agréés à pratiquer des opérations dans les règles de l’art, puisque leur responsabilité reste engagée. Et il ne faut pas oublier que, pour les carrosseries moyennes, c’est aussi une question de survie. Si elles veulent être encore là demain, il leur faut suivre les évolutions car, de toute façon, les grosses carrosseries ou les réseaux constructeurs se posent moins de questions et risquent de s’attirer le marché.
Mécénat technique
Dès lors que les investissements deviennent lourds, les distributeurs aident les carrossiers au financement. Les centrales des groupements ont aussi référencé des partenaires de financement. Mais, paradoxalement, on ne constate pas de pénétration délirante de ces solutions de financement dans les domaines de la carrosserie, malgré le contexte économique et le manque de trésorerie. Il faut dire que, parfois, les investissements lourds passent dans les contrats de renouvellement peinture…
Pour simplifier, disons que l’équipement du carrossier peut faire partie de la dot, un contrat de cinq ans avec un fabricant de peinture pouvant ainsi financer une aire de préparation ou une cabine, partiellement ou complètement… Bien sûr, nous parlons là d’entreprises structurées, aux volumes conséquents, qui apportent à un fabricant de peinture un business considérable… Quant à la location, un modèle économique qui tend à séduire dans les ateliers de réparation, l’idée fait son chemin chez les carrossiers, même si le Français aime bien posséder en propre. Certains commencent ainsi à apprécier le versement d’une somme mensuelle pour un produit toujours dernier cri, dont la maintenance est assurée, et remplacé en cas de problème…
Se diversifier pour limiter la casse
La diversification fait partie intégrante des grands défis de la carrosserie. Les réseaux travaillent beaucoup sur les concepts de rénovation d’optiques, de jantes, de sièges…, qui représentent un fantastique potentiel de business additionnel, hors assurance. Top Carrosserie est particulièrement impliqué dans le domaine et pratique régulièrement des animations commerciales pour faire découvrir au consommateur que le carrossier n’est pas là que pour réparer une voiture accidentée.
Le débosselage fait partie des opérations de diversification qui peuvent séduire un carrossier. Mais au-delà du matériel proprement dit, le concept demande beaucoup de formation et surtout de la pratique régulière pour rester performant. C’est la raison pour laquelle, bien souvent, ces prestations sont opérées par des prestataires extérieurs qui viennent travailler ponctuellement dans les carrosseries… Globalement, tous ces outils de diversification fonctionnent et génèrent de vraies réussites financières, dès lors que les professionnels se les approprient. Malheureusement, il s’avère que les carrossiers sont rarement des vendeurs, ce qui freine considérablement le développement de ce business. Ils accueillent un choc avant, et réparent un choc avant…
Mais ces prestations nouvelles doivent faire l’objet d’une éducation auprès des clients finaux… Et ceux qui utilisent ces équipements et sont rompus à l’usage des outils de communication sont bien souvent des professionnels qui pratiquent, en marge, une activité d’agent de marque ou de vendeur VO… Bref, des professionnels qui comprennent l’importance du discours et du contact, pour réaliser des prestations auxiliaires.
Franchise complémentaire ?
Récemment, une nouvelle franchise est apparue, Carméléon, sous l’égide de DentWizard, déjà spécialiste du débosselage sans peinture. Il s’agit de proposer à la franchise un concept global de spot repair à domicile. Concrètement, l’adhérent reçoit une camionnette tout équipée, dans laquelle se côtoient le mini labo de peinture, l’outillage nécessaire au spot repair, mais également une aire de préparation amovible, à monter devant la camionnette. Le franchisé se déplace alors au gré des demandes pour faire son travail. Si le concept fonctionne, c’est autant d’opérations qui n’entreront pas dans les chiffres d’affaires des carrossiers traditionnels.
Chez Groupauto, on croit à la pose de films de vitrage, à tel point que l’enseigne Top Carrosserie vient de lancer le concept Film Car Protect, qui comprend la formation, l’outil marketing, la grille tarifaire, les produits, les équipements…
Enfin, parce que la spirale vertueuse de la productivité tourne autour des bons matériels, des bonnes pratiques et des bons produits, les réseaux travaillent aujourd’hui à la mise en place d’une offre cohérente et structurée de pièces de carrosserie. Il s’agit de préparer l’éventuelle libéralisation qui se profile. “Nous travaillons très sérieusement sur le sujet, mais nous ne voulons pas de compromis sur la qualité et la sécurité. Donc, nous ne pratiquerons pas d’importations douteuses. Nous serons prudents, et la traçabilité sera tout à fait assurée”, conclut Frédéric Deroy.