S'abonner
Distribution

VO : tout le monde veut en croquer

Publié le 16 février 2011

Par Benoît Landré
8 min de lecture
Malmené, fragilisé depuis le second semestre 2008, le marché de l’occasion a redressé la barre en 2010, profitant de la fin progressive de la prime à la casse et de stocks assainis. L’exercice 2011 devrait confirmer cette remontée que beaucoup d’acteurs semblent vouloir accompagner. A commencer par les constructeurs, désireux d’anticiper la baisse du VN. Sont-ils suffisamment armés pour accompagner cette relance annoncée ?
Les professionnels se montrent relativement optimistes à l’approche de cette nouvelle année, même si des interrogations demeurent sur les approvisionnements.

(NB : Retrouvez tous les tableaux en cliquant sur le lien ci-contre "Télécharger le fichier".)

Les professionnels du VO auraient-ils digéré leur pain noir ? Les statistiques semblent abonder dans ce sens. Le marché de l’occasion a repris des couleurs en 2010 avec une hausse de 2,8 %, à 5 386 007 immatriculations. En 2009, il avait reculé de… 2,8 %, également. La symétrie est parfaite. Nous voilà donc revenus sur les mêmes bases statistiques qu’en 2008. A la seule différence que la dynamique est toute autre. Le marché de l’occasion repart de l’avant. En 2008, il entamait sa chute. Marqué par une progression régulière et solide, l’exercice 2010 a notamment mis en exergue le retour sur le devant de la scène des voitures de moins d’un an, en hausse de 4,3 %, à 438 544 unités. Succédant à une chute de - 13,1 % en 2009, cette reprise, rapide, de ce segment très prisé des distributeurs est directement liée à l’arrêt progressif de la prime à la casse et l’essoufflement du marché du neuf. Une tendance qui devrait se confirmer en 2011 avec le retour des ventes de véhicules d’occasion récents du segment B, qui ont le plus souffert de la concurrence du VN.

Les pros dans les starting-block

Même si le marché n’a pas retrouvé son rythme de croisière d’avant crise, les voyants, en ce début d’année 2011, sont plutôt au vert. “En fin d’année dernière, les prix étaient revenus au niveau de 2007 et 2008. Les perspectives sont relativement bonnes en ce début d’année 2011”, confie Xavier Diry, directeur France d’AutoContact. En effet, les distributeurs se sont efforcés d’assainir leurs stocks, de repositionner leurs offres et leurs prix et de trouver de nouvelles sources d’approvisionnement. “Un vrai travail de fond a été réalisé par l’ensemble des opérateurs avec pour finalité la maîtrise des flux, des reprises, une amélioration des rotations et un allégement des structures”, précise Xavier Diry. Une remise à niveau, en question, parfois, qui ne se s’est pas faite dans la facilité. Car 2010 a également apporté son lot de contrariétés aux professionnels que les statistiques ne dévoilent pas. Produits moins nombreux et moins bien placés, érosion des marges, tels étaient en substance les doléances les plus fréquentes. “2010 n’a pas été une mauvaise année mais le business a clairement été pénalisé par la baisse des stocks. Nous avons eu quatre mois pendant lesquels nous avons eu très peu de produits en parc, de l’ordre de 50 % du stock habituel”, retient Xavier Morvan, dirigeant de Saint-Herblain Automobiles.

Si aucune prévision ne ressort véritablement à ce jour pour le marché du VO en 2011, les professionnels semblent être dans de bien meilleures dispositions que l’an passé, à la même période, pour réaliser de bons résultats. “2011 devrait être une bonne année. Nous venons de faire un très bon mois de janvier car nous avons attaqué avec un très gros stock de 1 000 VO. Au sein du réseau Distinxion, nous affichons des chiffres que nous n’avions pas réalisés depuis longtemps. Nous sentons également que les professionnels sont dans une bonne dynamique”, observe, optimiste, Xavier Morvan.

Opportunisme ou stratégie à long terme ?

En janvier, le marché de l’occasion a enregistré une première progression de 6,8 % par rapport à janvier 2009, avec 430 867 immatriculations. Le marché du VN poursuit également sur sa lancée avec un bond de 8,2 % des immatriculations en janvier. Mais pour combien de temps ? Pour l’instant, les principales marques ne relâchent pas leurs efforts commerciaux pour accompagner la vente de voitures neuves. Des efforts coûteux qui risquent de se révéler insuffisants pour maintenir le marché du neuf au-dessus des 2 millions d’unités. Dans ce contexte, l’activité occasion suscite bien des intérêts. Les distributeurs, d’attaque et mieux armés, mais aussi les constructeurs, les organismes de financement ou les garantisseurs entendent accompagner cette montée en puissance attendue du VO. Un regain d’intérêt qui n’est pas nouveau mais qui semble véritablement prendre de la vigueur en ce début d’année si l’on se fie aux déclarations de nombreux responsables de marque et à leur politique. “Le VO va redevenir important en 2011 puisque le marché va se réorienter vers des reprises avec la disparition de la prime”, confiait, en effet, Jacques Rivoal, directeur de la marque Volkswagen, dans le dernier numéro du Journal de l’Automobile. Le constructeur allemand lancera, d’ailleurs, en juin, son nouveau label “Das Weltauto” pour accompagner sa stratégie de croissance mondiale.

De son côté, Kia vient d’étendre en janvier sa garantie 7 ans à une sélection de voitures d’occasion. Audi a revu en fin d’année dernière les standards de son label Audi Occasion Plus afin d’accompagner le lancement de l’A1, qui devrait augmenter sensiblement les volumes de ventes de la marque. Peugeot lancera pour la première fois ses portes ouvertes VO au sein de 40 de ses distributeurs. “Nous avons mis en place en 2010 quatre grandes campagnes de communication propres au VO contre zéro en 2009. Nous avons d’autres projets sous le coude pour 2011 destinés à renforcer notre visibilité sur cette activité”, illustre pour sa part Arnaud Duchemin, responsable VO de Citroën.

Volvo entend surfer en 2011 sur la montée en puissance de son label Volvo Selekt tandis que Honda officialisera, pour sa part, le déploiement de son label occasion. Enfin, Skoda a fait de l’activité occasion un pilier de la profitabilité de son réseau en 2011 si l’on en croit les propos récents de Luc Chausson, directeur de la marque en France. Ainsi, mêmes les marques qui s’inscrivent davantage dans une logique de part de marché VN doivent y aller. L’activité occasion n’est plus seulement le faire-valoir du VN mais un centre de profit à part entière. Son impact sur la rentabilité des points de vente est plus que jamais réel.

Une structuration renforcée sur le VO

Les consultants n’ont jamais été aussi nombreux sur le terrain, les départements occasions des constructeurs sont désormais plus étoffés. Neuf collaborateurs composent aujourd’hui le service occasion de Fiat contre trois personnes en 2008. “Les constructeurs appuient également sur la maîtrise des flux des VO de la marque à destination de leur réseau. Cela se traduit par un niveau de service très élevé, qui comprend du transport, des plates-formes d’appels électroniques, des facturations automatiques…”, remarque Xavier Diry. Symbole de cette mutation, presque tous les constructeurs s’appuient à ce jour sur des sites Intranet de revente de VO à leur réseau. Seul Citroën n’a pas encore déployé son outil.

Au sein des réseaux, ce changement de mentalité s’est traduit par un repositionnement de l’offre et un intérêt sur des VO de deux ou trois ans, générateurs de marges, qu’ils revendaient avant à marchands. Le lancement en 2010 du label “Primo” par Peugeot, couvrant les VO jusqu’à 8 ans et 130 000 km, témoigne d’ailleurs de ce changement de stratégie. Il faut dire qu’en 2010, les échanges entre particuliers ont encore représenté deux tiers des volumes. “Une grosse majorité des distributeurs ne s’intéresse pas aux VO de plus de cinq ans qui représentent pourtant 62 % du marché. C’est une erreur stratégique majeure”, juge Bérislav Kovacevic, dirigeant de SolutionsVO.

Les reprises, le défi de 2011

Selon quelques observateurs, la problématique des approvisionnements pourrait être encore importante en ce début d’année. “Chez la plupart des constructeurs, les stocks sont loin d’être pléthoriques”, constate Xavier Morvan. Dès lors, la capacité à bien reprendre les véhicules d’occasion conditionnera en grande partie les performances des distributeurs en 2011. “Le marché a démontré pendant deux ans qu’il pouvait commercialiser des voitures neuves à grande échelle si on débarrassait le client de son vieux véhicule. Pourquoi, devrait-on arrêter du jour au lendemain ?”, interroge Bérislav Kovacevic.

Manifestement, les constructeurs ne semblent pas vouloir s’arrêter en si bon chemin. “Nous avons besoin de reprendre des véhicules en 2011 pour accompagner le lancement de nos nouveaux produits. Dès ce début d’année, nous avons clairement axé notre communication sur les reprises. Mais en plus d’être une aide à la vente de VN, elles permettent également d’approvisionner les distributeurs en produits différents permettant de toucher une autre clientèle”, annonce Jean-François Soulisse, directeur des succursales VO Peugeot.

Chaque reprise est un cas à part, qui nécessite une forte réactivité, méthode et organisation, ainsi qu’une connaissance pointue du marché de l’occasion. “Nous observons une volonté des constructeurs d’aider leur réseau à davantage et mieux reprendre les VO via le déploiement d’outils d’aide à la reprise”, observe pour sa part Xavier Diry. Des outils qui arrivent à point nommé mais qui pourraient ne pas suffire. En effet, ces deux dernières années, 80 % des reprises ont concerné des véhicules qui partaient à la casse. Le marché a été biaisé et les distributeurs n’ont pas eu à forcer leur talent de négociateur pour reprendre des véhicules. “Cette prime à la casse n’a pas été sans conséquence sur le comportement et le professionnalisme des vendeurs. Mais maintenant, comment remotiver les vendeurs à faire de vraies reprises ? Est-ce que je peux reformater mes équipes VO ? Comment remettre au goût du jour le métier d’acheteurs/vendeurs ? Nous voyons encore des distributeurs qui disent à leurs clients : “Vous ferez une meilleure affaire si vous la revendez vous-même”. Pendant trop longtemps, le rachat de VO à particuliers a été dévalorisé”, s’inquiète Bérislav Kovacevic, qui préconise un taux de reprise de 50 à 60 %, loin d’être respecté dans beaucoup d’affaires. Il reste du travail. Vouloir faire du VO en 2011 ne sera pas forcément synonyme de performance. L’improvisation ne fonctionne pas. Mais cette ambition annoncée a le mérite de dynamiser le marché.

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager :

Sur le même sujet

Laisser un commentaire

cross-circle