Les réseaux de franchisés VN/VO : le vrai départ ?
L’an passé, le Journal de l’Automobile se posait la question de savoir pourquoi le concept de franchise ou de licence de marque ne parvenait pas à pénétrer la distribution automobile de VN et de VO. Les problèmes de sourcing, de trésorerie, de non-respect des engagements, l’absence de services associés étaient alors avancés pour expliquer certains échecs ou des effets d’annonces non convertis. Laurent Cohen, co-fondateur du récent réseau Via Automobile, constate pour sa part que la franchise automobile implique un apport financier conséquent (stock, trésorerie, vendeurs…) et qu’il existe sur ce marché des alternatives bien plus attractives de prime abord en termes de modèle économique et de rentabilité. De plus, la puissance des constructeurs et la constitution de groupes de distribution de plus en plus forts et concentrés ont de quoi refroidir les tempéraments les plus impétueux. L’entreprise est périlleuse.
Modèle que l’on érige en exemple, pionnier en la matière, le réseau Distinxion a su braver les embûches et fait figure aujourd’hui d’exception à la règle. Seulement, son avance, sa maturité et son déploiement sont tels qu’il est impossible à dupliquer. Alors, il faut faire autrement. En s’appuyant, par exemple, sur des structures de vente ou après-vente déjà existantes. C’est précisément le chemin choisi par le groupe suisse Delta Car, via son enseigne “Point de vente multimarque”, qui a déjà séduit plus de 300 réparateurs à ce jour en France. La société Demarque Auto, fondée par Marc Detourbet, a commencé à tisser sa toile en 2009 auprès de distributeurs, de marchands ou de garages désireux de proposer une offre de voitures multimarque. Un premier site indépendant a déjà ouvert ses portes à Issoire (63) et d’autres points de vente 100 % Demarque Auto devraient suivre en 2011.
La force montante du réseau
Face au durcissement du marché et à la difficulté de trouver des produits bien placés, intégrer un réseau indépendant, compromis entre le marchand et le distributeur, fait sens pour certains acteurs et offre des gages de solidité. L’appui d’une centrale d’achats forte, qui constitue notamment le socle de toute création de réseaux de franchise, représente un argument fort pour de nombreux professionnels en quête de véhicules. “Mais choisir d’adhérer à un réseau de franchise pour trouver plus facilement des produits constitue un critère de la chaîne qui n’est pas, à mon sens, le plus déterminant. La notoriété, l’image, la communication, la volonté de défendre une enseigne sur un territoire ou de vendre des véhicules plus difficiles à trouver sont d’autres raisons bien plus pertinentes de rejoindre un réseau”, juge Xavier Morvan, fondateur du réseau “0km” Distinxion, qui a lancé lors du dernier mondial son réseau de “points relais” afin de couvrir de nouvelles zones plus petites.
Mêmes si les ambitions restent mesurées - 10 “points relais” à fin mars 2012 - les candidatures ne manquent pas et témoignent d’une volonté de nombreux professionnels de s’appuyer sur une marque, une enseigne et une notoriété établies. Fin 2008, au plus fort de la crise, beaucoup de petites structures ont mis la clef sous la porte faute de moyens et de solutions. “Je pense que dans le futur, les acteurs de la vente ou de l’après-vente qui n’appartiendront pas à un réseau auront davantage de difficultés à lutter face à des forces organisées, structurées, s’appuyant sur de gros moyens”, juge Xavier Morvan.
Des réseaux qui rassurent et qui rapportent
Dès lors, beaucoup de professionnels ne cachent pas leur envie d’ajouter à leur activité de base un nouveau panneau générateur de profits additionnels. Au regard de l’investissement initial et des frais de structures, les marges réalisées par véhicule, qui oscillent en moyenne entre 1 200 et 1 500 euros (HT) permettent d’atteindre le seuil de rentabilité très rapidement. “J’ai désormais suffisamment de recul pour affirmer que mes franchisés gagnent de l’argent avec mon enseigne”, analyse Marc Detourbet. A tel point que l’un de ses premiers représentants entend se séparer de ses panneaux de marque pour développer exclusivement d’autres sites Demarque Auto. “Notre concept repose sur des coûts de structures relativement bas qui permettent aux franchisés de vivre avec des marges brutes, affichant en moyenne entre 1 600 et 2 000 euros, quand le concessionnaire doit faire 4 000 euros sur chaque vente. Le seuil de rentabilité d’une agence est estimé entre 5 et 8 véhicules par mois, annonce pour sa part Laurent Cohen. Nous achetons les véhicules entre 10 et 15 % plus cher que les distributeurs mais nos produits sont placés dans les meilleurs prix du marché. Et nous ne sommes pas “discounter””.
Lancé en décembre 2010, ce réseau d’agences urbaines, inspiré des agences immobilières, “surfe sur la dynamique du marché de la franchise en France et de la dématérialisation grandissante dans la distribution automobile. Nous répondons à une problématique et une clientèle”, ajoute le dirigeant. Le concept semble effectivement avoir le vent en poupe et l’opportunité de la franchise dans la distribution automobile semble plus que jamais relancée.
Un contexte plus propice aux réseaux indépendants ?
L’émergence du Net dans les habitudes de consommation des particuliers participe allégrement de cette dynamique. Le développement d’un site Web et l’abonnement aux sites de petites annonces assurent une exposition maximale à moindre frais. Le groupe Aramis qui a d’abord pris ses marques sur la Toile s’appuie aujourd’hui sur un total de 17 agences, en propre, dans l’Hexagone. Le Net s’avère être une rampe de lancement idéale mais ne suffit pas à constituer et pérenniser un réseau. “Internet représente un faible pourcentage de notre activité et opère avant tout comme un vecteur de communication”, nuance, en effet, Laurent Cohen.
“Ce canal permet d’augmenter la visibilité, de créer du trafic et de gagner du temps mais le client a besoin de venir sur un point de vente pour voir qu’il a affaire à de vrais professionnels de l’automobile”, indique pour sa part Laurent Cordier, co-fondateur du réseau CarConsulting qui a vu le jour au premier janvier 2011. Et de poursuivre : “Je ne crois pas au 100 % Internet. Paradoxalement, le client veut à la fois un prix mais aussi de la disponibilité, ce qui implique de s’engager sur des pré-commandes et un stock, nécessitant une trésorerie importante. Notre investissement équivaut à un stock de 150 véhicules”.
De la nécessité d’accompagner les franchisés et d’animer le réseau
Un réseau durable se doit d’être irréprochable avec ses franchisés mais également crédible et solide aux yeux du client. Les dirigeants de Car Consulting ont d’ailleurs procédé, l’an passé, à une augmentation du capital de la société pour se donner les moyens de leurs ambitions. La société bretonne a également décidé d’accompagner financièrement les premiers adhérents afin que ces derniers soient en mesure de proposer très vite 15 à 20 voitures sur leur point de vente. “Notre approche se veut encore très souple, ouverte et peu contraignante pour nos adhérents. Nous sommes dans un esprit de coopérative, chacun additionnant ses moyens afin d’aboutir à un ensemble cohérent”, explique Laurent Cordier. De son côté, Via Automobile a investi à hauteur de 10 à 25 % dans l’ouverture des quatre premières agences. La société entend ouvrir également, dans les prochains mois, son capital à une entité extérieure (loueur, compagnie d’assurance… ?) afin d’asseoir et d’accélérer le déploiement de son réseau d’agences. Entre 50 et 100 points de vente sont envisagés pour 2011.
“Il faut faire vivre son réseau, être en perpétuel mouvement. Cela passe par de nouveaux approvisionnements, des offres flash sur Internet, des opérations ponctuelles comme celles initiées avec Cetelem sur le financement à taux zéro, aller sur des sources d’informations plus “haut de gamme” pour renforcer notre notoriété…”, affirme Xavier Morvan. C’est tout le défi qui attend les enseignes Car Consulting et Via Automobile. Cette dernière prend 2 % sur la marge nette des agences qui sont réinvestis en publicité nationale. Chacun des adhérents est tenu d’investir 3 000 euros le premier mois dans la communication locale (flyer, street marketing, supports locaux, prospectus, offre commerciale…) avant de dépenser 1 000 euros les mois suivants. En plus d’une offre de financement ou d’extensions de garanties, Via Automobile s’est également adossée au réseau Axial pour la carrosserie et devrait nouer un partenariat avec un réseau de réparation afin d’apporter toujours plus de services à ses clients. Autant d’investissements et d’efforts indispensables pour installer son réseau sur de bons rails.
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