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Distribution

Guillaume Arnauné, EnchèresVO : "Le deuxième semestre 2021 sera peut-être une autre histoire"

Publié le 25 août 2021

Par Gredy Raffin
6 min de lecture
Rencontré avant la trêve estivale, le directeur général du groupe EnchèresVO, Guillaume Arnauné, s'exprime sur la situation du marché des véhicules d'occasion. Les difficultés d'approvisionnement mettent les prix sous réelle tension.
Guillaume Arnauné, directeur général du groupe EnchèresVO

Journal de l'Automobile. Comment avez-vous vécu ce premier semestre 2021 ?

Guillaume Arnauné. C’est un premier semestre qui s’inscrit dans la continuité de 2020. Bon an mal an, nous avons connu l’an dernier un exercice dynamique pour le VO après plusieurs années marquées déjà par de fortes croissances. La reprise a été très forte après le premier confinement, ce qui nous a permis de bien terminer cette année 2020. Sur ce premier semestre, nous sommes sur une tendance identique avec un marché VO au beau fixe et des niveaux de prix assez inédits, de manière structurelle et conjoncturelle. La pénurie des semi-conducteurs a eu d’importantes conséquences sur le véhicule neuf qui retardent les livraisons, ce qui a donné un coup de fouet au marché VO. Certains de nos clients professionnels ne peuvent pas se permettre d’attendre, notamment dans la messagerie où les besoins de renouvellement de flottes sont réguliers. Dans ce contexte, nous avons malgré tout réussi à nous approvisionner et à anticiper cette situation pour sécuriser nos volumes. Le 2e semestre sera peut-être une autre histoire...

 

JA. Comment avez-vous su anticiper cette évolution du marché de la voiture d'occasion?

GA. Nous avons vu le sujet arriver en mars-avril. Dès lors, nous avons sauté sur tout ce qui bougeait ! Ce qui nous a permis de gérer assez bien la situation, même si cela s’est joué sur le fil pour certaines situations. Je suis plus réservé sur notre capacité à gérer ce sujet au second semestre. Objectivement, ça va être compliqué, c’est une réalité pour tous nos fournisseurs. Quand y a des phases de pénuries, il faut se montrer prudents.

 

JA. Comment avez-vous vu les prix évoluer au cours du premier semestre et quels ont été les éléments les plus influents ?

GA. Depuis an, nous observons une progression constante de nos prix de vente, comprise entre +10 % et +15 %. Ce phénomène est perceptible depuis la sortie du premier confinement, en juin 2020. Nous avons tous été surpris par cette reprise soudaine. Il y avait un décalage entre ce que nous attendions et la réalité du marché. Aujourd’hui, nous sommes plus habitués à cette dynamique et nous pouvons plus facilement regarder dans le rétroviseur pour anticiper les prix. D’ailleurs, je pense que le marché est arrivé à un plateau depuis ce premier semestre : l’élasticité des prix n’est pas sans fin. Nous faisons face à un marché de tension sur lequel il faut être très exigeant sur les prix.

 

JA. Quels sont les moyens humains et techniques mis en œuvre pour conduire votre politique tarifaire ?

GA. Nous nous reposons sur trois axes : des sources de données marché avec un fournisseur externe, des données techniques de dépréciation issus de systèmes de cotation et, évidemment, notre base de données interne reposant sur nos prix de vente. C’est notre principal atout. Ensuite, nous avons un algorithme propre qui permet d’anticiper nos prix de vente avec l’évolution des valeurs marché et l’évolution de nos prix en interne.

 

JA. Dans les mois qui viennent, quels seront les éléments à davantage considérer pour établir le prix des véhicules d'occasion ?

GA. Nous sommes assez inquiets, pour être transparent, de la situation qui nous est remontée par toute la profession sur la problématique des semi-conducteurs qui impacte le VN. La variable non maitrisée aujourd’hui est de savoir s’il reste de la place pour une hausse de prix. La pénurie de produits va-t-elle se traduire par une nouvelle augmentation des prix ? Ou par un report d’achat des clients ? Je n’ai pas le sentiment que cette hausse des prix de vente est un puits sans fond. Il y a un certain nombre de produits pour lesquels nous constatons une stabilisation des valeurs, voire de légères baisses. Nous n'anticipons pas une explosion du marché avec ces prix et certains confrères nous confirment aussi en parallèle que la fréquentation dans les points de vente n’est pas particulièrement importante.

 

Lire aussi : Les maisons d'enchères ont résisté à la crise en 2020

 

JA. Cette situation vous pousse-t-elle à délaisser à certaines typologies de véhicules ?

GA. Au contraire, nous avons toujours essayé de nous intéresser à tous types de véhicules et, dans le contexte actuel, nous sommes encore plus vigilants et veillons à rester le plus pertinent sur toutes les familles de produits, du haut de gamme aux matériels avec réparation. Nous avons toujours essayé d’avoir l’offre la plus large possible, même dans le contexte actuel.

 

JA. Vous avez annoncé en début d’année le regroupement de vos marques sous l’entité EnchèresVO. Comment a été accueilli ce changement de nom par la profession ?

GA. Plutôt très bien ! EnchèresVO était une de nos nombreuses marques, connue par le grand public, mais pas développée pour les professionnels. Ça été très bien accueilli car la marque est très lisible par tous nos clients, sans dimension géographique. Cette marque nous a, en outre, permis de rationnaliser notre communication avec un impact plus significatif. Nous corrélons cette refonte de nos marques avec un programme de rénovation de nos bâtiments, en particulier les sites de Toulouse et Bordeaux.

 

JA. On parle beaucoup de digitalisation du secteur et c’est un mouvement dans lequel vous vous êtes déjà pleinement investi, encore récemment avec le développement de studios photos. Quelle part de votre activité passe désormais les plateformes en ligne ?

GA. Aujourd’hui, 100 % de notre activité est digitalisée. Nous avons été l’un des premiers acteurs, en 2002-2003, à être sur internet. Quant à la vente en ligne, nous nous y sommes mis en 2008. C’était indispensable puisque tous nos clients passent par notre site Internet aujourd’hui lors de leur phase d’achat. Il y a beaucoup de trafic sur nos outils digitaux. Cette approche digitale n’est donc pas nouvelle mais les phases de confinement que nous avons connues ont accéléré ce mouvement. Nous proposions par exemple, depuis 5 ans, les visites sur rendez-vous. Avec la crise sanitaire, nous avons mis en place un service de click and collect. Il est fort probable que cette prestation se pérennise puisque les clients se sont habitués à ce service. Je ne dirai toutefois pas que le marché a totalement basculé sur le digital. Mais ça a accéléré les choses. Si le véhicule d'occasion a été un peu lent à démarrer sur le sujet numérique, aujourd’hui je sens que la dynamique a été lancée. C’est la raison pour laquelle nous avons notamment déployé nos studios 360° par lesquels passent l’ensemble de nos flux désormais pour les photos extérieures. Demain, ce sera également valable pour l’intérieur. C’est un process totalement industrialisé pour les prises de vues, le stockage de véhicules, etc. Nous travaillons aussi à repenser les parcours digitaux de nos clients : nous voulons comprendre leur profil, leurs besoins, leur utilisation de nos sites, etc. Un sondage est d’ailleurs en cours sur notre page internet. Nous avons déjà reçu plusieurs milliers de retours qui nous permettront de repenser ce parcours digital pour être au plus près de leurs attentes.

 

Propos recueillis par Mohamed Aredjal

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