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Constructeurs

Vincent Salimon, BMW France : "Les avantages du contrat d'agent sont nombreux"

Publié le 17 septembre 2024

Par Catherine Leroy
10 min de lecture
Dans quelques jours, la marque Mini va déployer son nouveau contrat d’agent en France après l’Italie, la Pologne, la Finlande et la Suède. Le président du directoire de BMW Group France, Vincent Salimon, revient pour Le Journal de l’Automobile sur sa mise en place.
Vincent Salimon BMW contrat d'agent
Vincent Salimon, président du directoire de BMW Group France. ©Florian Léger

Le Journal de l’Automobile : Le 1er octobre 2024, la distribution de la marque Mini se fera par le biais d’un contrat d’agent. Le groupe BMW est l’un des rares constructeurs, avec Stellantis, à poursuivre dans cette nouvelle voie juridique. Pourquoi ?

Vincent Salimon : Nous considérons que les avantages sont nombreux. Ils reposent sur une expérience client totalement fluide du tunnel d’achat de la commande jusqu’à la livraison finale. L’autre avantage, très important, c’est la transparence des prix puisqu’il n’y a plus de remise. Le client n’a plus besoin de négocier. Ce qui le rassure car il est certain de faire la meilleure affaire. C’est l’un des enseignements majeur que nous retenons des pays où ce contrat a été mis en place.  Nous confirmons donc la mise en place en France pour le 1er octobre 2024. Pour le réseau BMW, la mise en place est également confirmée pour 2026. Nous capitaliserons, comme pour Mini, sur la mise en place d’autres pays avant de l’appliquer en France.

 

J.A. : Pourtant, en Italie où ce contrat a été mis en place, comme en Suède, en Pologne en Norvège ou en Finlande, Mini a perdu 36 % d’immatriculations sur le 1er semestre 2024 par rapport à 2023 et sa part de marché est tombée à 0,8 % contre 1,30 %. N’est-ce pas lié ?

V.S. : Il est vrai que la marque Mini a perdu des parts de marché en Italie. Mais c’est aussi le cas malheureusement en France car nous sommes en train de renouveler la totalité de la gamme.  Nous n’avons plus de stock pour les anciens modèles et pas encore la dotation complète sur la nouvelle génération. Ce qui explique la baisse des immatriculations mais cela ne veut pas dire que notre performance est en recul. Cette baisse était anticipée et ce phénomène de cycle est identique quel que soit le pays, qu’il ait basculé ou non sur le modèle d’agent. Les activités commerciales sont au niveau de nos attentes. Pas question de repousser en France le contrat d’agent parce qu’il serait un échec en Italie. Les systèmes informatiques fonctionnent. D’ailleurs, nous avons investi pour cette bascule juridique, autant que pour la construction d’une nouvelle usine, soit plusieurs centaines de millions d’euros. Mais est-ce désormais totalement fluide ? Non, comme dans le cas de tout changement de système informatique. Mais nous accompagnons les concessionnaire et les équipes commerciales. Ce n’est pas encore parfait mais nous progressons.

 

J.A. : Les distributeurs automobiles avancent tout de même une perte de rémunération future. Où en êtes-vous des discussions ?

V.S. : Nous avons travaillé depuis deux ans et demi avec des représentants du réseau et le groupement sur des business plans. Tous reposent sur le postulat que la rentabilité doit rester identique. Nous voulons garder les meilleurs investisseurs avec nous et il est donc important qu’ils continuent de gagner de l’argent. Malgré tout, des économies doivent réalisées. Et nous poursuivons nos études pour réaliser des économies sur les frais fixes.

 

Les distributeurs craignent peut-être une perte. C’est vrai que l’on part dans l’inconnue et il est normal de s’interroger. Depuis 100 ans, nous distribuons les automobiles avec un modèle classique. Mais la réalité est que personne ne connaîtra le résultat avant 2025. Voire plus tard car BMW pèse beaucoup plus dans la rentabilité que Mini. Nous verrons s’il y a un manque à gagner pour nos partenaires. Mais je veux garder nos investisseurs, qui sont 35 à ce jour. Et il n’est pas question que des investisseurs quittent nos marques. Nous avons besoin d’eux pour commercialiser en arrondissant 60 000 BMW, 25 000 Mini et 22 000 Motorrad par an. Les distributeurs ont confiance. Mais cette confiance devra être confirmée par la réalité des faits et des chiffres.

 

Nous voulons garder les meilleurs investisseurs avec nous et il est donc important qu’ils continuent de gagner de l’argent

 

J.A. Le groupe a choisi un modèle d’agent direct. Que cela signifie-t-il concrètement dans le quotidien ?

V.S. : Tout d’abord, nous allons porter les stocks. Et nous prendrons en direct un certain nombre de frais qui sont en lien avec l’activité commerciale de la marque Mini. En revanche, les distributeurs doivent toujours investir notamment pour le nouveau format de l’expérience client en concession, que l’on appelle Retail. Next. D’ailleurs, la commission liée à la performance sur la marque doit couvrir un certain nombre de frais, que ce soit la représentation commerciale de la marque Mini, mais aussi du VO, de l’après-vente… tout comme les frais pour le marketing local.

 

J.A. : Et si cette rémunération ne permet pas de couvrir ces frais ?

V.S. : Nous en discuterons. Nous ferons un point en fin d’année et éventuellement. La commission a été calculée de telle façon qu’elle couvre ces frais. Mais en réalité, peu importe cette commission. Ce qui compte c’est la rentabilité du partenaire sur son compte de résultat. Et pour cela, toutes les activités sont essentielles. Ce n’est pas parce que nous basculons vers un modèle d’agent que l’optimisation de tous les centres de profits n’est pas importante.

 

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J.A. : Comment y parvenir ?

V.S. : Par le VO par exemple. Aujourd’hui, dans le réseau BMW en moyenne 46 % des occasions de moins de 5 ans sont vendues par les partenaires et 50 % pour le réseau Mini. Notre objectif est d’atteindre 60 % voire les deux tiers. Nous devons mieux maîtriser ce business, qui améliore le financement, la pénétration de la marque. À l’après-vente, il s’agit d’améliorer la productivité, d’avoir une couverture des frais fixes la plus forte possible et dans tous les domaines y compris la carrosserie, qui est un centre de profit optimal. Notre volonté est d’atteindre 100 % de carrosserie pour chacun des partenaires contre 40 % aujourd’hui. Mais tous ces sujets ne sont pas liés au contrat d’agent. Nous y travaillons chaque année.

 

J.A. : La baisse des frais fixes doit-elle également passer par de plus petites surfaces d’exploitation ?

V.S. : C’est un point surtout lié au monde dans lequel nous vivons, qui est de plus en plus digital. Aujourd’hui, nous considérons qu’il n’est pas indispensable d’avoir chaque modèle dans le showroom, ni chaque modèle à l’essai. Nous faisons aussi notre mea culpa car nous l’avions demandé auparavant. Des showrooms aussi grands ne sont plus nécessaires. La marque Mini n’a plus nécessairement besoin d’avoir un espace séparé de présentation. L’important est que la différence dans l’expérience de marque soit toujours présente entre Mini et BMW. Tout cela implique des investissements pour mettre en place notre nouveau concept d’expérience client.

 

J.A. : Comment expliquer que BMW soit l’un des rares constructeurs à conserver ce modèle d’agence ?

V.S. : Peut-être parce que nous n’avons pas une approche qui consiste à pousser les volumes. Et parce que BMW reste à la pointe en termes d’innovations. Nous n’avons jamais eu peur de prendre des risques pour inventer un nouveau système de distribution. De plus, nous avions déjà testé ce modèle il y a dix ans avec la BMW i3.

 

Nous avons investi pour le contrat d'agent autant que pour la construction d’une nouvelle usine

 

J.A. : Mais les taux d’intérêts étaient au plus bas à cette époque ?

V.S. : L’argent coûtait effectivement moins cher à cette époque. Mais le système peut être viable y compris avec des taux d’intérêts plus élevés. Nous ne devons pas changer de stratégie selon l’évolution du coût de l’argent car nous travaillons sur des cycles longs. Le groupe, détenu par une famille à près de 50 %, ne change pas de stratégie en fonction de réglementation à court terme, de taux d’intérêts ou d’évolution du cours de bourse.

 

J.A : Quel sera le poids financier des stocks pour le groupe ?

V.S. : Ce sera plus important que nos prévisions de l’époque. Mais nous avons l’avantage d’être sur un segment premium qui génère des marges plus importantes et la possibilité de répercuter dans le prix certains investissements. En tout cas il n’y a pas suffisamment d’éléments pour remettre en cause la stratégie.

 

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J.A : Le marché de l’électrique n’est pas au rendez-vous et il est loin de pouvoir satisfaire les exigences des normes CAFE qui seront sévérisées au 1er janvier 2025. Comment atteindre ces objectifs ? 

V.S. : Tout dépend des marques car chez BMW, l’électrique marché bien. Nos ventes ont même progressé pour atteindre 25 % de notre volume. Grâce notamment à notre gamme de véhicules compacts comme les iX1 et iX2, qui sont des best-sellers. Cette stratégie est confirmée par le marché mondial. Nous avons déjà réalisé le volume annuel 2023 pour la marque BMW à fin juin 2024 (184 000 voitures électrique livrées dans le monde). Mais il est vrai que le développement du véhicule électrique a tendance à se réduire. En France, c’est aussi parce que, nous voulons toujours tout réglementer, contrôler. Les décisions qui sont prises, le sont à l’encontre des volontés d’achat. Notamment vers les entreprises.

 

Sur ce segment, nous avons commencé l’année avec un bonus de 3 000 euros, qui a été arrêté dès le 15 février. Je ne connais pas un secteur d’activité où les règles changent au bout d’un mois et demi de fonctionnement ! Pour le moins cette décision n’incite pas les entreprises et cela créé des doutes pour les particuliers. Doutes accentués par la communication sur le leasing social. Pour 2,5 % du marché annuel, soit 50 000 voitures, on a communiqué sur le fait qu’une voiture électrique coutait entre 50 et 150 euros. Ce qui n’est évidemment pas le cas. Le marché a été déstabilisé. Tous ces éléments font que les clients attendent.

 

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J.A. : Où en est BMW dans ses objectifs d’émissions de CO2 et quel est le poids de la France dans l’atteinte de ce seuil ?

V.S. : La France est le quatrième marché du monde pour BMW, le deuxième en Europe après l’Angleterre, donc notre poids est important. Et avec notre mix de vente en véhicules électriques, nous contribuons activement à atteindre notre objectif que je ne peux pas vous communiquer. Mon objectif est de réaliser une hausse de 50 % de nos immatriculations de véhicules électriques en France. Nous sommes confiants.

 

J.A. : Comment anticipez-vous les droits de douane compensatoires de 21,3 % que veut appliquer la Commission européenne pour les modèles Mini produits en Chine ?

V.S. : Nous attendons le mois de novembre pour connaître la décision définitive de la Commission. Mais nous n’avons pas attendu cette réaction de l’Europe pour annoncer que nous investissons 6 millions de Livres à Oxford en Grande-Bretagne, pour électrifier la chaîne de production et produire l’Aceman et la Cooper en 2026. Nous considérons que ces taxes douanières ne sont pas favorables au libre-échange et que c’est la porte ouverte à la surenchère des taxes réciproques. Lors que l’on essaie de se protéger, cela aboutit plutôt à une augmentation des tarifs qu’autre chose.

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