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Constructeurs

Patrice Franke, directeur général d’Audi France

Publié le 6 novembre 2009

Par Alexandre Guillet
8 min de lecture
"Nos clients deviennent de plus en plus exigeants, mais, contrairement à une idée reçue, ils ne sont pas plus compliqués à traiter que les autres"Non content d'obtenir la première place...
...au classement général des Grands Prix des Marques Automobiles, Audi se retrouve dans le duo de tête de trois dimensions - Image de la marque, Agrément et Design, Qualité du produit. Un succès qui n'entame en rien la détermination de Patrice Franke dans sa quête de la première place des services dans l'univers du Premium.

Journal de l'Automobile. Au premier chef, que vous inspire cette distinction, sachant qu'elle émane précisément de vos clients ?
PATRICE FRANKE. C'est naturellement une grande satisfaction, car notre objectif consiste toujours à proposer de belles voitures, fiables et performantes, mais il faut surtout que le client ressente ces qualités et in fine, tout le plaisir de vivre en Audi. Nous faisons valoir un ADN très émotionnel et il convient de l'alimenter et de le valoriser.

JA. Au-delà du classement général, on vous retrouve dans le duo de tête de trois dimensions -Image de la marque, Agrément et Design, Qualité du produit- où vous êtes attendus : est-ce une confirmation ?
PF. Sur l'enjeu central du produit, ces dernières années, nous avons développé ce que nous pensons bien savoir faire, avec une exigence toujours revue à la hausse sur la qualité et la précision, comme en témoignent nos nouveaux châssis par exemple. Simultanément, nos efforts pour réduire les consommations et les émissions se sont concrétisés. En outre, dès la conception, nous avons mis en œuvre des programmes visant à baisser de 60 % les probabilités de pannes qui peuvent entacher les VN à leur lancement. Au moment de la livraison, nous apportons aussi un soin particulier à l'ensemble des mises à jour électroniques. Nous nous sommes aussi penchés sur la question des pannes dites à répétition, à savoir que lorsqu'un véhicule arrive en panne, nous mettons tout en œuvre pour bien le réparer dès la première fois. Nous avons, ainsi, divisé par 4 ou 5, ce type de problèmes, notamment en France. Il est intéressant de constater que les clients saluent nos efforts, même s'il reste toujours des possibilités de progresser. Par ailleurs, au plan du design, nous savons que nos véhicules plaisent beaucoup et sont très attractifs. Il faut féliciter Walter da Silva et ses équipes. Enfin, l'image de la marque est bonne et ce qui est encore plus intéressant, c'est qu'elle s'améliore et se densifie.

JA. Comment relayez-vous cette démarche qualité au niveau du réseau ?
PF. C'est un gros travail que nous menons avec nos concessionnaires. Cela va d'opérations très simples à des choses bien plus complexes, du lavage systématique des véhicules clients à un vaste plan de formation permanente. De surcroît, je reste persuadé qu'un bon professionnel a besoin d'un bon outil, ce qui explique nos nouvelles exigences, sur un mode assez coercitif, pour rester au top niveau. Cela implique donc des investissements de la part de nos distributeurs.

JA. Justement, en ces temps économiquement troublés, quelle est la réaction du réseau face à cette demande d'investissements ?
PF. C'est un peu la règle des 80/20. 80 % des distributeurs ont adhéré et dans les 20 % restants, vous trouvez différents cas de figure et notamment des chefs d'entreprise qui font un juste raisonnement économique par rapport à leur potentiel en volume et qui ne suivent donc pas. Toutefois, avec le premier Terminal opérationnel à Annemasse depuis le début de l'année, nous avons une première confirmation de nos prévisions et le site affiche ainsi une hausse de 30 % de sa fréquentation atelier. Ce ne sera pas forcément + 30 % pour tout le monde, mais cela tend tout de même à prouver que le principe fonctionne. D'une manière plus générale, la fréquentation atelier est en hausse pour Audi en France.

JA. Dans l'étude conduite par TNS Sofres, Audi n'apparaît pas dans le trio de tête sur les dimensions "Satisfaction lors de l'achat" et "Service après-vente" : est-ce que cela corrobore vos exigences de développement ?
PF. Effectivement. Si vous voulez être à la pointe de la satisfaction à l'achat, vous devez vous doter de structures qui vous le permettent. Par structures, je n'entends pas uniquement le showroom, mais aussi les compétences VO pour assurer de bonnes reprises, les compétences en financement, et l'aptitude à gérer le process de l'essai du véhicule. Ce dernier point devenait parfois problématique pour le réseau dans la mesure où notre gamme s'élargit et où certains de nos véhicules sont chers et à faible volume. Nous avons donc lancé une offre d'essais sur-mesure avec pilote. Soit le pilote va chez le concessionnaire, soit il reçoit le concessionnaire et son client sur une piste. Par ailleurs, nous avons déployé un vaste programme de visiteurs-mystères dans le réseau pour identifier et corriger les insuffisances ou les erreurs constatées. En outre, nous avons mis en place une démarche de lead management sur Internet pour une plus grande rapidité de traitement des demandes. Concrètement, le concessionnaire a une journée pour répondre à une demande d'information, sinon nous transférons la demande chez un autre distributeur ou nous la gérons nous-mêmes. Bref, nos structures ne sont plus adaptées car elles datent des années 90 et ne correspondent plus à nos volumes actuels, qui ont fortement augmenté depuis lors.

JA. Malgré la crise, confirmez-vous l'objectif de lancer une centaine de chantiers de nouveaux sites d'ici 2011 ?
PF. Tout à fait. Et au-delà des infrastructures, il y a aussi l'importance des hommes du réseau. Il faut le juste nombre et des compétences irréprochables. Surtout qu'avec l'élargissement de notre gamme, notre spectre de clientèle s'élargit aussi. C'est pourquoi nous investissons considérablement sur la formation.

JA. Au chapitre précis de l'après-vente, vous avez déjà manifesté votre insatisfaction par rapport à vos performances : comment faire mieux ?
PF. Les résiliations que nous avons opérées allaient clairement dans ce sens. Nous exigeons un niveau d'équipements élevé, des certifications et une réception intégrée. Il faut ensuite systématiser les fondamentaux, notamment faire le tour du véhicule avec le client et écouter le client. Cette nouvelle organisation se traduit, concrètement, par une attribution de primes et de bonus selon les résultats des sites. Cette évolution était nécessaire. D'autant que le client devient de plus en plus exigeant. Et il le sera plus encore avec nos nouvelles installations et la densification de notre image. Cependant, contrairement à une idée reçue, nos clients ne sont pas plus compliqués à traiter que les autres. Comme tout le monde, ils veulent de la transparence et des engagements tenus. Si on faillit sur un diagnostic ou un engagement pris, la punition est immédiate. Donc, à nous de nous redimensionner pour verrouiller ce degré d'excellence.

JA. Vous répétez souvent que votre ambition est de devenir le numéro 1 des services dans l'univers du Premium : quel est le terme de cet objectif ?
PF. Cette ambition s'inscrit dans le cadre du plan du groupe baptisé "Route 2015". Dès lors, le terme peut être fixé à 2015, mais attention : 2015 au plus tard !

JA. L'arrivée de l'A1, qui apparaissait tout à l'heure en filigrane de votre discours, va générer un nouveau volume significatif. N'y a-t-il pas un risque que ce soit à double tranchant par rapport à vos objectifs en satisfaction vente et après-vente ?
PF. Si... mais c'est précisément ce qui explique aussi notre politique de re-dimensionnement du réseau et de ses performances. C'est aussi pourquoi, nous ne voulons pas tarder en chemin. La plupart des distributeurs ont d'ailleurs très bien compris cet enjeu et plusieurs inaugurations de nouveaux sites seront liées au lancement de l'A1.

JA. Ouvrons une parenthèse produit, qu'attendez-vous de la nouvelle A8 en France, un marché historiquement limité pour ce type de modèles ?
PF. Même si les volumes resteront modestes, bien plus faibles que sur d'autres marchés, je pense bien sûr à la Chine par exemple, l'A8 n'en demeure pas moins essentielle. En effet, c'est le vaisseau amiral de la marque et c'est ce qui fonde la légitimité Premium. Surtout que ce modèle s'accompagne d'une pléiade d'innovations technologiques de premier ordre.

JA. Revenons à l'étude de TNS Sofres, au-delà de certains items, les responsables n'ont pas intégré de dimension environnementale isolée, mettant en avant que ce n'est pas encore une demande des clients français en général, l'arbitrage financier primant sur le reste. Partagez-vous cette impression ?
PF. C'est à la fois vrai et pas tout à fait. On constate aussi qu'on peut lier environnement et avantage économique avec succès. Le pot catalytique en Allemagne ou la prime à la casse en France en sont une bonne illustration. Mais l'argument environnemental importe donc quand même pour les clients. Chez Audi, nous avons aussi constaté l'émergence d'interrogations par rapport aux grosses voitures. Avec deux types de downsizing : le client A8 qui s'oriente vers l'A6 et le client A8 qui choisit une motorisation moins gourmande en CO2. Nous sommes donc en présence d'une tendance réelle et surtout durable à défaut d'être pour l'heure spectaculaire. En fait, le client reviendra volontiers vers les grosses voitures quand il y aura des offres de moteurs adaptées à la prise de conscience environnementale actuelle. A petite échelle, nous l'avons déjà vérifié sur le Q7 dont les ventes ont rebondi avec l'introduction du Clean Diesel. Chez Audi, nous abordons frontalement le sujet et nous tiendrons notre premier engagement, à savoir une baisse d'émissions de CO2 de 20 % d'ici deux ans.

Photo : "Au-delà des infrastructures, il y a aussi l'importance des hommes du réseau. Il faut le juste nombre et des compétences irréprochables. Surtout qu'avec l'élargissement de notre gamme, notre spectre de clientèle s'élargit aussi", souligne Patrice Franke qui met en avant le travail de ses équipes, notamment Thierry Suquet pour le développement réseau et Philippe Lutz pour l'après-vente.

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