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Constructeurs

Où va le design de Toyota Europe ?

Publié le 28 avril 2006

Par Alexandre Guillet
4 min de lecture
Inauguré en 2000, l'ED², le centre de design Toyota dédié à l'Europe, a depuis livré ses premiers sketchs et modèles. Si la réussite commerciale des véhicules est au rendez-vous, leur style ne suscite guère d'engouement, les équipes semblant buter sur l'équation de l'émotion européenne en...

...général,et latine en particulier…


L'ED² (Toyota Europe Design Development SARL "ED²") joue le rôle de la "grande muette" A l'heure où toutes les marques cherchent à mettre en avant le design comme argument de vente et élément topique, Toyota fait de son centre européen de design une tour d'ivoire. Loin d'officier comme les premiers commerciaux de la marque ou comme d'habiles prestidigitateurs du marketing, les stylistes sont relégués au rang d'anonymes, parfois invités à quelques commentaires laconiques sur leurs bébés. Pourtant, depuis la fermeture de l'Epoc de Zaventem et l'inauguration du site de Sophia-Antipolis en 2000, l'ED² s'est montré prolifique. Avec les Yaris, les nouvelles versions des Corolla, Land Cruiser et Avensis, et la Lexus SC430. Des véhicules plutôt aboutis, si l'on excepte la charge teutonne fortement indigeste de l'Avensis. D'ailleurs, les destinées commerciales de ces modèles démontrent la qualité de ces produits. Cependant, il manque toujours une petite étincelle, celle qui déclenche l'enthousiasme, voire la passion. Pas de véhicule-manifeste, d'acte fondateur permettant d'ancrer une identité stylistique forte de Toyota dans l'esprit des consommateurs européens. Missionné pour percer le secret des goûts européens, l'ED² semble patiner… Ce que reconnaissait implicitement Tokuo Fukuichi, président de l'ED², lors de sa prise de fonction l'an passé, en déclarant cinq ans après l'inauguration du centre : "Nous devons capter la sensibilité européenne, faite de raffinement et de charge émotionnelle". En ajoutant qu'il fallait "trouver la solution en se gardant bien d'imiter les européens ou les américains".

"Clarté vibrante", la nouvelle vision du design Toyota…

Pour résoudre cette équation, Tokuo Fukuichi a repris à son compte le nouvel ethos du design Toyota. Baptisée "clarté vibrante" (L-Finesse pour Lexus), cette philosophie a priori fort peu européenne comme l'indique la pesanteur de la traduction, revendique néanmoins les vertus de méthode universelle. Elle s'articule autour de quatre axes fondamentaux : les proportions, l'architecture, les lignes de surface, et les touches particulières. Le mot "clarté" évoque la simplicité, l'évidence, la facilité d'interprétation, quand la lexie "vibrante" renvoie à une effervescence avant-gardiste et à la notion d'énergie contenue et maîtrisée. En outre, la ligne directrice "clarté vibrante" vise à exploiter des concepts paradoxaux comme le déséquilibre parfait, pour traduire l'impression de risque maîtrisé, la simplicité symbolique, pour exprimer clairement chaque idée et motif, et la géométrie libre, pour battre en brèche l'idée reçue qui stipule que les surfaces dépouillées ne peuvent pas avoir un puissant impact émotionnel.

L'ED² n'a pas encore capté la sensibilité européenne

Passée cette logorrhée rhétorique, la nouvelle Yaris avait pour mission d'appliquer ces préceptes et de vulgariser le discours de la méthode sur un segment populaire. Or la démonstration ne convainc guère, même si le modèle, pris en tant que tel, réjouit. En fait, mieux vaut chercher du côté des concept-cars issus de l'ED² pour mieux saisir les orientations de la philosophie "clarté vibrante". Le concept urbain Endo, présenté au Salon de Francfort 2005, déploie par exemple une architecture innovante et sensible avec la rencontre bien dosée de lignes et de nervures horizontales dans une silhouette nettement ovoïde. De même, l'Urban Cruiser, projet il est vrai piloté par le brillant Elvio d'Aprile, s'impose comme un RAV4 qui aurait abandonné le consensus pour prendre position et annonce un probable concurrent pour les Suzuki SX4 et Fiat Sedici. En somme, il apparaît que l'ED² n'a pas encore relevé le défi de l'alchimie européenne. Mais on ne saurait le reprocher trop vertement aux équipes de style. Car comme le répète à l'envi Fujio Cho, vice-chairman du groupe Toyota, "les gens se reconnaissent bel et bien dans nos véhicules en Europe puisqu'ils les achètent". C'est la philosophie du prosaïsme solide…


 Alexandre Guillet

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