“On ne peut pas comparer la 301 avec la Logan”
En 2005, un mandataire du nord de la France faisait parler de lui en important les premières Logan sur le marché hexagonal (lire encadré). Une initiative très vite couronnée de succès qui a ensuite conduit Renault à commercialiser plus vite que prévu la marque sur les marchés d’Europe de l’Ouest. Si rien ne présage encore à ce jour du destin de la Peugeot 301, la société Lezeau Automobiles, spécialisée dans la vente de voitures neuves “low cost” à Puilboreau, dans la banlieue de La Rochelle (17), a saisi l’opportunité de proposer à la vente plusieurs versions de la berline trois volumes sur son site Internet et sur LeBoncoin.fr. “J’ai reçu une quinzaine de mails de particuliers qui ont manifesté leur intérêt pour ce produit en raison de son prix et des équipements proposés. Il faut dire que la voiture est plutôt bien réussie et son rapport qualité/prix me paraît aussi bon que celui d’une Logan”, confie Romuald Lezeau, dirigeant de la société. Le modèle essence est proposé au tarif de 11 800 euros tandis que la version Allure 1.6 HDi 92 ch affiche un prix de 15 800 euros. Achetés auprès de concessionnaires de la Communauté européenne, d’après le mandataire, alors que la 301 n’est pour l’heure que commercialisée en Turquie, les premiers véhicules arriveront d’ici deux à trois semaines. “Je pense que nous avons déterminé un prix bien placé et raisonnable”, juge Romuald Lezeau. Pour l’heure, l’initiative, qui a également fait des émules en Andorre, reste un cas isolé dans l’Hexagone et surtout peu représentatif en termes de volume. Pour autant, elle agace les membres du réseau Peugeot.
Un coup de bluff
A commencer par Jean-Paul Bailly, dirigeant du groupe homonyme et président d’honneur du GCAP. Ce dernier parle “d’un coup de bluff de la part du mandataire qui essaie de se faire de la publicité. On ne peut pas l’empêcher de faire du commerce et je ne serais pas étonné de voir de nouvelles initiatives se multiplier”. Au-delà de cet argument, Jean-Paul Bailly pense surtout que la 301 a peu de chance de réussir dans l’Hexagone, marché pour lequel elle n’est pas prévue : “Il n’y a aucune demande pour les véhicules tricorps. Si le lancement de la 301 devait se faire, il y aurait, je pense, un problème marketing car c’est l’archétype même du véhicule qui ne nous intéresse pas”, ajoute le distributeur. Une idée qui fait d’ailleurs l’unanimité au sein du réseau Peugeot. La plupart des concessionnaires interrogés pensent que l’arrivée de la 301 en France se transformerait en échec commercial. “Si la marque décidait de la commercialiser, nous la rentrerions au sein de la gamme, c’est certain. Mais ses chances de réussite sont infimes alors que la montée de la gamme est devenue une priorité”, explique de son côté Jérôme Flachy, président des agents Peugeot.
Peu de chance de réussir
D’autres s’étonnent de voir des mandataires tenter le pari de la 301. “Je ne comprends pas une telle démarche, à moins qu’elle ne soit dictée que par le commerce. Si un mandataire arrive à dégager 2 000 euros sur la vente d’une 301, je dis tant mieux. Mais ensuite ? Quel intérêt pour un particulier d’acheter un tel véhicule aujourd’hui s’il ne peut pas le revendre puisqu’il ne dispose pas de cotation Argus ?”, s’interroge Henrique Inacio, directeur général des Grands Garages Pyrénéens à Perpignan (Groupe David Gerbier). Jérôme Flachy, lui, reste plus prudent tout en étant pragmatique : “Je n’ai rien contre les mandataires à partir du moment où ces derniers respectent les règles. Cependant, le marché est tellement agressif qu’ils en sont obligés à proposer des véhicules décalés juste pour gagner de l’argent. En même temps, cela apporte un peu d’exotisme.” Quant à renouveler ce qu’il s’était passé en 2005 avec la Logan, les concessionnaires n’y croient pas non plus. “Renault, dans sa stratégie low cost, était obligé tôt ou tard de la lancer en France. La marque a juste été prise de court”, avance Henrique Inacio. “On ne peut pas comparer la 301 avec la Logan : la Peugeot n’est pas une voiture au rabais”, tempère enfin Jérôme Flachy.
Quant au constructeur, il considère la démarche du mandataire comme une initiative isolée et préfère ne pas y attacher de l’importance : “Pour commercialiser un véhicule, il faut une demande. Or, il n’y en a pas pour la 301 en France. Parallèlement, la 301 n’a pas sa place dans la gamme de Peugeot dont l’objectif est de monter en gamme. Si des 301 devaient se vendre via des mandataires, je reste persuadé que les ventes seraient très marginales”, a ainsi expliqué Xavier Duchemin, Directeur Commerce de Peugeot France avant de conclure : “et je rappelle qu’au sein de notre gamme, nous avons aussi des réponses pour les clients à plus petits budgets, comme avec la 207+, ou encore des opérations de financements intéressantes sur certains de nos véhicules”.
Tanguy Merrien et Benoît Landré
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ZOOM - La 301
Reflet des ambitions internationales de Peugeot et de conquête de nouveaux marchés, la 301, présentée en première mondiale lors du dernier Mondial de l’Automobile de Paris, sera prochainement lancée en Europe centrale et orientale, en Russie, en Ukraine, en Grèce, au Maghreb, au Moyen-Orient, dans les pays du Golfe, en Afrique ainsi que sur certains marchés d’Amérique latine. Dans un second temps, elle fera son introduction en Chine. La 301, comme sa cousine la C-Elysées, est fabriquée dans l’usine de Vigo, en Espagne. Deux produits devant répondre aux attentes d’une autre clientèle, à la recherche d’un modèle attractif et accessible. La 301 sera d’abord lancée en Turquie à la fin de l’année, puis en Europe centrale et au Maghreb. Quant à la berline Citroën, elle fait actuellement l’objet de tests en Espagne avant son lancement officiel.
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ZOOM - Un précédent avec la Logan…
En 2005 (JA n° 913), alors que la première Dacia n’est pas encore commercialisée dans l’Hexagone, un mandataire nordiste, Jean-Michel Sueur, avait décidé de prendre le pari de proposer à la vente la Logan sur son site de Téthegem, près de Dunkerque. Prenant de vitesse le constructeur, le mandataire importait directement les véhicules de Roumanie et dut rapidement faire face à un engouement sans précédent. Une démarche qui n’était pas sans déplaire aux distributeurs locaux à l’époque : “On nous demande d’investir près de 3 000 euros pour accueillir la Logan et installer l’enseigne, or on nous précède déjà”, regrettaient-ils. Un joli coup médiatique à l’époque quand on connaît la suite de l’épopée Logan en France…
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