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Constructeurs

"Non, je ne vendrai pas une 208 à 7 990 euros en 3 portes"

Publié le 30 octobre 2012

Par Benoît Landré
6 min de lecture
Jean-Philippe Imparato, directeur commerce Europe de PSA - Considérée comme une “machine de guerre”, la Direction du commerce Europe (DCE) a été créée en fin d’année dernière pour permettre au groupe PSA de redéfinir son organisation et sa stratégie commerciale dans un contexte de crise.
Jean-Philippe Imparato, directeur commerce Europe de PSA - Considérée comme une “machine de guerre”, la Direction du commerce Europe (DCE) a été créée en fin d’année dernière pour permettre au groupe PSA de redéfinir son organisation et sa stratégie commerciale dans un contexte de crise.

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Pouvez-vous nous rappeler les enjeux qui ont présidé à la création, l’an passé, de la Direction du commerce Europe ?
JEAN-PHILIPPE IMPARATO.
Dès le premier semestre 2011, Philippe Varin a été l’un des premiers à détecter les prémices de la “vague 2” de la crise. Une réflexion s’est donc engagée au second semestre pour savoir, d’une part, comment nous pouvions renforcer très significativement l’impact des marques sur un périmètre mondial et, d’autre part, comment nous pouvions formater la zone Europe sur le plan des opérations commerciales. Ainsi, nous avons mis en place le 15 novembre 2011 la Direction du commerce Europe, qui a commencé à travailler le 2 janvier 2012. Cette direction opérationnelle a pour responsabilité de déployer les stratégies des marques Citroën et Peugeot en Europe, de vendre les voitures neuves, BtoB et occasion des deux constructeurs, d’assurer la programmation et la distribution des modèles fabriqués en Europe ainsi que de gérer le développement réseau et qualité.

JA. Cette direction était une réponse à la crise. A-t-elle vocation à durer ?
JPI.
Cette décision a été rapide car le contexte l’exigeait, mais cette opération s’inscrit évidemment dans le long terme. Elle a pour vocation de construire dans chacun des pays une organisation pérenne, dans laquelle nous allons chercher des synergies sur l’ensemble des opérations en back-office. Ainsi, nous avons mutualisé tout ce qui ne se voit pas pour le client afin que chacune des deux marques se consacre à 100 % à son réseau et ses clients. Le mot d’ordre est : retour aux basiques. Les deux marques restent concurrentes et indépendantes. La puissance de frappe commerciale des marques est donc intacte et la relation concessionnaire inchangée.

JA. Quelles sont les ambitions qui ont été assignées à cette organisation ?
JPI.
Nous avions déterminé trois points pour la fin 2012. Tout d’abord, finir la réorganisation des opérations : ce sera fait. Le deuxième objectif de l’année était la réduction des stocks : nous serons entre 20 % et 30 % de baisse de stock physique au sein des filiales et des réseaux. Enfin, le troisième point était d’éliminer les stocks de plus de 120 jours. Nous repartirons l’an prochain avec une situation de stock, et donc de cash, que nous n’avions pas connue depuis plusieurs années.

JA. Comment analysez-vous les performances du groupe en Europe sur ces neuf premiers mois ?
JPI.
Malgré ce contexte de réorganisation, nous avons tenu nos parts de marché. En Europe des 27, l’écart entre Citroën et Opel s’est réduit à 0,5 point, contre 0,8 l’an passé, et celui entre Renault et Peugeot est passé de 1 à 0,6 point à fin août 2012. Je suis très heureux de ce qui se passe au Royaume-Uni : Peugeot réalise sa meilleure part de marché depuis cinq ans en VP et VUL, tandis que Citroën gagne une place au cumul. PSA passe ainsi de 9,2 à 9,5 points. En France, la marque au lion a réalisé la meilleure performance du marché en juillet et en août. En Italie, Citroën devient 5e et Peugeot 6e, devant Renault, avec une pénétration qui passe de 9,8 % à 10,2 %. Nous sommes au combat, nous faisons le métier sur les cinq principaux marchés dans des conditions professionnelles et pas un seul de nos vendeurs ne brade la moindre voiture. Enfin, nous devons faire mieux en Allemagne, c’est l’un de nos axes prioritaires en 2013 avec la France et le Royaume-Uni.

JA. A quel niveau de part de marché doivent se situer les deux marques en Europe ?
JPI.
En 2013, nous nous sommes fixé 13 % de part de marché en Europe pour le groupe, dont 7 % pour Peugeot et 6 % pour Citroën. Il s’agit de prévisions réalistes sur lesquelles nous tiendrons le business, tout en restant propres sur nous.

JA. Quelles sont les ambitions de la DCE sur l’exercice 2013 ?
JPI.
En 2013, tous les vendeurs européens auront un objectif de fidélisation et de conquête, avec pour devise : dix contacts, cinq rendez-vous et une commande chaque jour. Cela peut paraître vieux jeu, mais c’est ainsi que nous avons sauvé Citroën dans les années 90 et que l’on s’en sort dans les périodes compliquées. Ce programme s’inscrit en revanche dans une stratégie parfaitement définie : nous misons sur la vente à particuliers, sur les opérations BtoB et VUL. Nous ne faisons pas n’importe quoi en matière de location courte durée, segment sur lequel nous avons réduit de 4 à 2 points notre poids, et de kilomètre zéro. Nous devons absolument protéger les valeurs résiduelles de nos voitures. Aussi, nous nous interdisons les opérations de fin de mois dans des proportions inconsidérées, qui massacrent les VO, les VR et l’image. Même si cela doit nous coûter 0,2 ou 0,3 point de part de marché à court terme, nous protégeons la société et les marques sur le long terme.

En 2013, les concessionnaires seront animés autour des parts de marché, de la qualité de service, qui a progressé significativement ces dernières années, et sur le virage digital que le groupe amorce. Aujourd’hui, l’équipe a le niveau d’agilité nécessaire pour se défendre dans cette période et pour redécoller une fois que le marché repartira.

JA. Comment conciliez-vous cette quête de qualité dans un contexte de bataille commerciale effrénée ?
JPI.
C’est vrai, les constructeurs jugés “généralistes Premium” ont cassé les prix cette année. D’ailleurs, certains, qui se prévalent de position de “leaders”, ont certainement été les plus agressifs en termes de tarifs ces neuf derniers mois sur la plupart des pays d’Europe, à tel point que l’on se demande s’ils ne sont pas dans une logique de prédateurs. Le marché a détruit 500 euros de prix moyen depuis un an et demi. Il serait faux d’affirmer que nous nous exonérons de la bataille car, à la fin, c’est toujours le client qui a raison, mais nous ne pouvons pas rentrer dans cette spirale au-delà du raisonnable. Surtout, il existe une limite que nous ne souhaitons pas dépasser. Et cette limite est fixée par la montée en gamme des deux marques. En effet, un véhicule comme la 208, qui est deuxième de son segment en Europe au bout de six mois de commercialisation, dans des conditions de valeurs résiduelles prévisionnelles extrêmement bonnes, nous permet de ne pas aller au-delà de cette ligne rouge. Non, je ne vendrai pas une 208 à 7 990 euros en 3 portes. Non, je ne ferai pas n’importe quoi avec la ligne DS chez Citroën.
 

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