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Constructeurs

Le puzzle électrique de PSA est en place

Publié le 27 septembre 2018

Par Christophe Jaussaud
7 min de lecture
Le lancement programmé de 15 modèles électrifiés d'ici 2021 demande logiquement des adaptations de l'outil industriel. PSA, à l'aube de cette offensive, se dit prêt et ses usines aussi.

 

Si le citoyen Carlos Tavares avait émis des réserves sur le tout-électrique quasi imposé par les autorités – "Ils devront donc en assumer la responsabilité scientifique" avait-il d'ailleurs lâché à l'occasion du salon de Francfort 2017 –, le patron de PSA Carlos Tavares a tout fait pour que son groupe soit un acteur majeur de ce changement annoncé. La feuille de route est claire avec 50 % des modèles électrifiés en 2021, 80 % en 2023 et 100 % en 2025. Pour atteindre ces seuils, l'ensemble de l'entreprise est sur le pont, du commerce aux usines, car le top départ de cette électrification est pour bientôt. "Nous sommes prêts pour l'électrification de nos gammes" affirme même Alexandre Guignart, directeur de la business unit LEV (Low Emission Vehicles). Le SUV DS7 Crossback e-Tense va ainsi inaugurer la technologie hybride rechargeable (PHEV) sur la plateforme EMP2 en septembre 2019. Plus généralement, à partir de cette année 2019, tous les modèles des cinq marques du groupe disposeront d'une variante PHEV ou 100 % électrique (BEV). DS, encore une fois, va être la première à proposer, avec la DS3 Crossback, un modèle 100 % électrique sur la nouvelle plateforme CMP. Les Peugeot 508, 508 SW, 3008 et Citroën C5 Aircross suivront. D'ici 2021, le groupe s'apprête à lancer quinze modèles électrifiés, dont huit PHEV et sept BEV.

 

L'indispensable flexibilité industrielle

 

Une offensive notamment rendue possible grâce à la flexibilité des sites industriels et à l'emploi de deux plateformes modulaires multi-énergies. La plateforme EMP2, apparue en 2013, servira de base aux variantes PHEV des DS7, 508 et autres GrandlandX. Les modèles électriques utiliseront la plateforme CMP que va inaugurer la DS3 Crossback. Rappelons que cette plateforme à destination des modèles des segments B et C inférieur a été développée par PSA avec le soutien, notamment financier, de Dongfeng, son actionnaire et partenaire en Chine. La palette de modèles électrifiés est donc assez large et demande une adaptation dans les usines du groupe. Le constructeur indique qu'une enveloppe de 100 millions d'euros est dédiée à cela. Ainsi, les usines de Vigo, Saragosse, Poissy, ainsi que certaines en Chine, accueilleront les modèles 100 % électriques (CMP). Celles de Rennes, Sochaux, Mulhouse, Eisenach, ainsi que certaines en Chine, seront centrées sur l'hybridation rechargeable. Les changements vont-ils être nombreux dans les process de fabrication ? Pas vraiment du fait d'une large réflexion en amont sur les plateformes et les technologies électriques embarquées. En effet, les process de peinture et même d'assemblage sont quasi identiques et seul le ferrage de la partie arrière du PHEV demande une légère modification, a expliqué Frédéric Laganier, directeur de la stratégie industrielle du groupe PSA.

 

Début de l'offensive en 2019

 

Mais avant de lancer les modifications sur site, PSA "s'entraîne" dans un atelier prototype. Pour les modèles PHEV, c'est celui de Sochaux qui a fait office de laboratoire. Il s'agit en fait d'une mini ligne d'assemblage avec douze postes de montage où une trentaine d'opérateurs s'affairent durant quatre à neuf mois pour valider les process à une cadence grimpant, au fil des mois, d'un à trois modèles par jour. Un travail qui conduit à fabriquer 180 prototypes environ, dix-huit mois avant le lancement commercial du modèle. Durant notre visite, le DS7 Crossback était sur le "grill" et des caisses de 508 berlines attendaient. L'occasion d'en apprendre plus sur la technologie utilisée pour les hybrides avec Olivier Salvat, le directeur du programme PHEV. Différenciation des marques oblige, le groupe va proposer deux systèmes distincts pour ses modèles hybrides. Ainsi, l'un permettra d'offrir quatre roues motrices grâce à un deuxième moteur électrique placé dans le train arrière à cage. Ici, comme pour celui de l'avant, la puissance électrique supplémentaire est de 80 kW (110 ch) par unité permettant ainsi d'offrir une puissance cumulée de 300 ch en ajoutant les 200 ch du bloc essence 1.6 PureTech. Une architecture que l'on retrouvera sur le DS7 Crossback e-Tense, le 3008 Hybrid4 ou encore le GrandlandX. Une variante "allégée", deux roues motrices, avec un seul moteur électrique à l'avant (80 kW/110 ch) associé au bloc 1.6 PureTech 180 ch, permettra d'offrir 225 ch cumulés. L'autonomie 100 % électrique oscillera entre 40 et 50 km selon la silhouette car les SUV auront une batterie de 13 kWh et les berlines disposeront de 12 kWh. La puissance de la batterie varie également entre 90 et 80 Kw selon le nombre de roues motrices. Dans les deux cas, le moteur avant est intégré à la boîte automatique EAT8 fournie par l'équipementier Aisin. Le Nippon et PSA ont travaillé à l'intégration de cette pièce de 70 mm d'épaisseur pour qu'au final, la boîte électrifiée ne mesure que 35 mm de plus, et ainsi permette un montage transparent pour les opérateurs.

 

Un puzzle mondial

 

La boîte et le moteur avant arrivent donc du Japon alors que les pièces nécessaires à l'électrification du train arrière, fourni par GKN et Valeo, débarque de Chine. Le voyage est moins long pour les batteries puisqu'elles sont produites en Pologne par LG Chem. Un ensemble électrifié qui aura pour conséquence d'ajouter 270 kg (pour les tractions) ou 330 kg (pour les quatre roues motrices) sur la balance. En effet, il faut compter entre 110 et 120 kg pour les batteries, 60 kg pour l'électronique de puissance et le solde est à mettre à l'actif des divers renforts structurels comme, par exemple, dans les longerons arrière pour protéger la batterie en cas de choc latéral. Des batteries qui retrouveront du jus grâce à un chargeur embarqué, de série, de 3,3 kW. En option, un de 6,6 kW sera disponible. Vu que Peugeot a choisi de baptiser cette nouvelle génération d'hybride Hybrid4, comme l'ancienne, on peut se demander s'il reste, techniquement, quelque chose de cette première expérience ? "Nous avons simplement conservé ce que l'on appelle la conception fonctionnelle", avoue le directeur du programme PHEV. Il s'agit en fait de certaines informations sur la gestion du système comme, par exemple, le dialogue entre les capteurs et les actuateurs. Le puzzle paraît donc gigantesque, mais finalement Olivier Salvat insiste sur le fait que seulement 7 à 8 % de pièces sont différentes entre un modèle thermique et son équivalent hybride. Mais dans tous les cas, la rentabilité doit être au rendez-vous. Carlos Tavares veille et Olivier Salvat confirme qu'il n'y a "pas de lancement avec un coût d'exploitation négatif".

 

Les constructeurs ont fait leur boulot…

 

PSA semble donc prêt et armé pour tirer son épingle du jeu. Encore faut-il que tous fassent leur part du travail. Et notamment les pouvoirs publics. En effet, les autorités, qui ont quasiment fait un choix stratégique à la place des constructeurs, doivent aussi apporter leur part pour que l'écosystème électrique soit viable. Alexandre Guignart pointe notamment le réseau de recharge qui doit drastiquement augmenter dans les années à venir. Le directeur de la business unit LEV a aussi rappelé que PSA soutient et soutiendra toute initiative européenne au sujet des batteries. La Commission européenne voyait aussi la construction d'un "Airbus des batteries" d'un bon œil, mais cela n'en prend pas le chemin. Dommage, car au-delà de laisser l'Asie et la Chine dominer sans partage, le potentiel semble bien présent puisque les ventes annuelles de modèles électrifiés devraient être multipliées par 13 sur notre continent, passant de 280 000 en 2017 à 3,5 millions en 2025. Une croissance planétaire annoncée puisque les Etats-Unis devraient voir ces ventes multipliées par 9 et la Chine par 8.

 

 

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