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Constructeurs

La plate-forme automobile, an II

Publié le 28 mai 2010

Par Alexandre Guillet
4 min de lecture
Sous l'égide du président Claude Cham, la plate-forme automobile s'est réunie à Paris pour souligner les avancées accomplies et mesurer le long chemin restant à parcourir. Et tout le monde s'accorde à dire que le problème...
...des surcapacités reste prégnant.

La manifestation pour célébrer la 1re année de la PFA a eu le mérite de donner une dimension concrète à des organigrammes et des cartes de France parfois "soviétisantes". A cet égard, relevons l'intervention pertinente de Thierry Faugeras, directeur Corporate Development de Federal Mogul, à propos du groupe de travail "Motorisation propre", agrémentée de quelques saillies sortant du cadre des spots de communication en vigueur et des satisfecit traditionnels. La preuve en exemples : "Il faut faire émerger une filière française sur le Véhicule Electrique et les hybrides. A l'horizon 2011, les choix sont connus et les Japonais ont de l'avance, c'est clair. Il convient donc de se focaliser sur l'horizon 2013-2014" ; "Actuellement, les entreprises françaises compétitives sont difficiles à trouver. A dire vrai, on les compte sur les doigts d'une main…" ; "Je note que des technologies de groupes allemands ont été retenues par des groupes français pour leurs développements de solutions hybride-diesel". Au chapitre de l'optimisation des solutions thermiques et de la combustion interne, Thierry Faugeras estime que le savoir-faire français exportable repose surtout sur le Diesel et prône donc un soutien à la compétitivité de la filière Diesel. Toutefois, considérant que ladite filière peut être menacée par le développement du low-cost et de nouvelles normes environnementales, il recommande aussi un projet coordonné pour la filière essence. Convenant enfin qu'il faudrait renforcer la collaboration européenne sur ces sujets, surtout qu'aujourd'hui, "la valeur ajoutée en R&D sur les moteurs thermiques se situe principalement en Allemagne…".

Rattraper le train de l'innovation, autre gage essentiel de compétitivité

En filigrane de la plupart des interventions apparaissait d'ailleurs logiquement le défi de la compétitivité française. Et Yann Delabrière, président-directeur général de Faurecia, de rappeler : "La compétitivité ne se résume pas aux seuls coûts de production, mais renvoie aussi aux solutions et aux produits que l'on peut proposer, c'est-à-dire à l'innovation et la R&D". Or son diagnostic n'est pas des plus engageants : "La France souffre d'un retard dans l'innovation par rapport à d'autres. On ne peut pas dire que ce soit à cause d'un manque de soutien de l'Etat. Il remplit son rôle, le Crédit Impôt Recherche en est un bon exemple. Mais d'une manière générale, les pôles de compétitivité ne sont pas assez opérationnels, vraisemblablement trop englués dans l'administratif". Le chemin à parcourir est donc encore long… Pour l'innovation, il est de surcroît duel comme le soulignent de concert Stefano Chmielewski, président-directeur général de Renault Trucks, et Laurent Burelle, président-directeur général de Plastic Omnium : "Il faut faire le distinguo entre recherche avancée et recherche appliquée, afin de mieux coordonner les deux ainsi que les investissements qui y sont liés".

50 000 personnes en trop dans la filière

C'est d'ailleurs Laurent Burelle qui a ensuite décidé de mettre les pieds dans le plat en évoquant le problème de sur-capacité et de sur-effectif de la filière jusque-là pudiquement éludé. Selon Yves Crozet, président du think tank de l'URF, inutile de se voiler la face, c'est une tragédie : "On trouve des sur-effectifs dans l'ensemble de la filière. Or la compétitivité ne rime pas avec la sauvegarde de l'emploi. Cela dépend de la production en numérateur". Relayé par Laurent Burelle : "Il y a 50 000 personnes en trop ! Même les syndicats sont d'accord avec cette estimation. Reste à savoir qui va payer et comment. C'est plus une affaire de modalités de transaction". Une tragédie sociale donc… Pas vraiment d'accord, Yves Audvard, représentant de la CGT Renault, a préféré souligner que "des capacités n'étaient pas utilisées" et demandé pourquoi. Personne ne souhaitant lui répondre… la clôture fut assurée par Christian Estrosi, ministre en charge de l'Industrie. Exhortant les constructeurs à produire en France -et à ne pas confondre "produire" et "assembler"-, il a du même coup annoncé la volonté du gouvernement de lancer un label "Produit en France" pour l'automobile (voir édito du JA n° 1113).

FOCUS

"Bien entendu c'est off"

Si la journée de la filière automobile se voulait consensuelle, voici quelques coups de griffe entendus au détour des couloirs. "Soyons honnêtes, on fait un peu Jurassic Park quand même…". "ça fait combien de temps que ces donneurs de leçons n'ont pas vu et négocié avec un vrai client ?". "Résumons : ni responsables, ni coupables, mais tous complices !".

Photo : Patrick Blain et Claude Cham, respectivement directeur et président de la plate-forme automobile.

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