La compétitivité européenne en question

Le renouveau du secteur automobile européen tient-il dans les 82 pages du rapport remis le 6 juin par Cars21 (Cadre réglementaire compétitif pour l’automobile au 21e siècle) ? Ce “Groupe de haut niveau sur la compétitivité et la croissance durable du secteur automobile européen”, créé à la Commission européenne en 2005 et relancé en 2010 face aux changements de contexte, a réfléchi à une feuille de route afin d’améliorer la réglementation et, in fine, le rayonnement au-delà de nos frontières des acteurs européens.

A en croire Bernard Jullien, directeur du Gerpisa (Groupe d’études et de recherches permanent sur l’industrie et les salariés de l’automobile), il n’est pas évident que les constructeurs à la peine trouvent dans ces quelques pages la solution à leurs problèmes. Pour la bonne et simple raison que “certaines positions exprimées avec force auparavant n’apparaissent pas dans ce rapport. C’est un premier niveau de consultation qui affaiblit, parce que tout le monde n’est pas d’accord. Sur la question des surcapacités, c’est difficile, surtout si l’on considère que les nouveaux entrants dans l’Europe des 27 en sont responsables, et cela avec le soutien de la BEI (Banque européenne d’investissement)”. Avant de regretter : “Les vraies questions ne sont pas abordées.”

Crise intra-européenne

C’est pourtant un travail de longue haleine qui a été réalisé, avec une réflexion menée par différents groupes de travail thématiques. L’électromobilité, la R&D, la sécurité routière, la réglementation sur les émissions de CO2 ou encore la politique commerciale de l’Union européenne ont été passées au crible, afin d’émettre des recommandations pour les années à venir. Le 9 mars dernier, un rendez-vous du groupe n° 3 (Aspects industriels, sociaux, et territoriaux de compétitivité) a été crucial. Ce jour-là, des considérations italiennes alarmantes ont propulsé la question de la compétitivité au cœur de la réflexion.

En effet, les prévisions les plus optimistes pour la Botte tablent sur un volume de ventes de 1,5 million de véhicules en 2012, du jamais vu depuis 1985. “Un tel scénario augmenterait les difficultés pour l’ensemble de la chaîne de valeur : constructeurs, équipementiers, distributeurs”, prévient-on. Avant de pointer la spécificité de la crise actuelle : “Elle est différente de celle de 2008, en ceci qu’elle ne semble affecter que le marché européen, épargnant les BRIC ou l’Amérique du Nord. La seule façon de s’en sortir est de réagir rapidement, afin de créer un système industriel plus flexible, de s’occuper des surcapacités, et ainsi maintenir le niveau de production dans l’Union européenne.”

La crise économique mondiale, la forte croissance des marchés émergents, l’abandon de droits de douanes, la législation européenne en termes d’environnement et de sécurité, l’arrivée d’énergies alternatives : tout cela a changé la donne. Dès lors, sur quels critères de compétitivité se reposer ? Cars21 en isole huit : un fort potentiel d’innovation ; une position forte dans les échanges commerciaux et une réactivité à la demande étrangère ; le contrôle des coûts ; le dialogue social ; des pôles de compétitivité (clusters) régionaux ; un grand marché domestique et des segments clés surtout en valeur ; une chaîne de valeur solide ; une main-d’œuvre qualifiée.

“Accords réciproquement bénéfiques”

Autant de priorités sous forme de recommandations aux Etats membres pour les instances dirigeantes européennes. Sergio Marchionne, président de l’Acea et du groupe FIAT ayant pris part à l’élaboration de ce rapport, indique qu’il “est essentiel qu’elles soient mises en application le plus rapidement possible. Cars21 insiste sur le fait que les accords de libre-échange se doivent d’être réciproquement bénéfiques. Or, l’Union européenne semble prête à faire des compromis, comme l’a démontré l’expérience avec la Corée du Sud.” Bernard Jullien précise : “Il y a un problème de commerce extérieur, notamment vers les grands marchés émergents. L’Allemagne a eu une bouffée d’oxygène avec un export vers la Chine, mais cela ne constitue pas une solution durable envisageable.”

Les immatriculations en Europe sont attendues à la baisse par rapport à 2011 et, bien que l’ampleur des conséquences ne sera pas la même chez tous les constructeurs, la production de véhicules en Europe va probablement décliner également. “Notre industrie a déjà prouvé sa capacité de résistance, mais optimiser sa compétitivité est déterminant dans un marché de plus en plus mondialisé”, a ajouté Sergio Marchionne. Il faut désormais attendre octobre, lorsque cette feuille de route sera soumise à l’approbation de la Commission, pour savoir si ce consensus rime avec salut ou perdition.

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FOCUS - Perspectives de marché en Europe

• 5,7 % attendus en 2012
• 5e année consécutive de déclin
• Volume autour de 12 millions d’unités, loin des 15,5 de 2007
• Niveau de ventes le plus bas depuis 1997
• Net contraste avec les autres marchés
(Source Cars21)

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FOCUS - Tendances des ventes mondiales de VP en 2011

• Global : + 3,8 %
• Amérique du Nord : + 10,4 %
• Amérique du Sud : + 8,1 %
• Grande Chine : + 4 %
• Asie du Sud : + 3 %
• Europe de l’Ouest : - 0,4 %
• Europe centrale : - 0,4 %
(Source Cars21)

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FOCUS - L’industrie automobile européenne, un secteur clé

• CA de plus de 700 Mds€
• 12 millions d’emplois directs et indirects
• Contribution de 92 Mds t à la balance commerciale en 2011
• 30 Mds t investis en R&D en 2010
(Source Cars21)