Ivan Segal, Renault : "Nous poussons les véhicules vers les particuliers"
Le Journal de l'Automobile : Dans un marché en baisse de 17,3 % sur le premier trimestre 2022, comment se positionne Renault ?
Ivan Segal : Le marché est fortement contraint pour toutes les raisons que nous connaissons, principalement impacté par la crise des semi-conducteurs sur laquelle nous n'avons toujours pas de visibilité. Nos immatriculations sont ainsi très fluctuantes, dépendantes des livraisons. En outre, depuis peu, l'inflation commence à se faire ressentir ce qui nécessite d'ajuster notre politique commerciale assez fréquemment. Pour autant, nous observons que nos carnets de commandes se remplissent et nous espérons que ces dernières se verront dans les immatriculations à partir du second semestre.
J. A. : Quel est le segment le plus touché ?
I. V. : Les véhicules utilitaires. Notre part de marché naturelle, et ce depuis des années, oscille entre 30 et 33 %. Ce trimestre, nous sommes descendus à 24 %, soit une perte de sept points. Mais nous ne sommes pas inquiets, car ce résultat n'est lié qu'à des problèmes de disponibilité. Nous annonçons des délais de livraison pour cet été, voire pour le mois d'octobre pour certains modèles. Encore une fois, nos carnets de commandes sont bien remplis, ce qui nous permet d'être confiant.
J. A. : Et concernant le VP ?
I. V. : Notre part de marché est de 14,19 %. Encore une fois, nos immatriculations ne reflètent pas forcément la réalité du terrain. Nous nous appuyons sur des ventes qualitatives en nous concentrons sur le marché des particuliers qui est le plus rentable pour le réseau et pour nous. C'est pourquoi d'ailleurs vous avez peut-être eu vent dans le réseau de remarques de la part d'une partie des équipes commerciales, notamment celles des sociétés, qui voient dans cette période de pénurie, les affectations de produits orientées vers les canaux les plus rentables. Celui des particuliers a en effet progressé pour atteindre 47 % et la part de marché de Renault sur ce canal est passée de 12,8 % à 15,9 %. Avec Dacia qui est à 14,6 %, le groupe Renault est le premier constructeur à particulier avec environ une vente sur trois.
J. A. : Comment se positionne Renault sur le marché de la voiture électrifiée ?
I. V. : Le marché est porté par les ventes de voitures électrifiées (hors micro-hybridation) et électriques. Au premier trimestre 2021, leur part de marché était de 26 %, elle est aujourd'hui de 33,4 %. Chez Renault, sur les mêmes périmètres, elle est passée de 30,7 % à 43,4 %. Près d'une voiture sur deux commercialisée par Renault est un modèle électrifié ou électrique. Dans le détail, si Zoe est dans sa deuxième partie de vie, nous observons une très nette montée en puissance de Clio, Captur et Arkana, qui va s'accompagner dans les mois à venir de la présence dans les immatriculations de Megane E-Tech Electric.
J. A. : Malgré une bonne tenue des ventes sur le canaux des particuliers chez Renault, les acheteurs se posent beaucoup de questions, notamment sur le choix énergétique. Quelle est votre analyse ?
I. V. : Effectivement, c'est un fait. Mais chez Renault, de par notre présence dans l'électrique depuis de nombreuses années, nous avons des forces commerciales qui savent poser les bonnes questions à leurs clients et qui ont les réponses adaptées. Nous constatons que l'hybride séduit beaucoup. Il séduit d'autant plus que la différence d'utilisation entre un modèle thermique et hybride est quasiment nulle. Pour l'hybride rechargeable, c'est une autre question. Nous observons une relative stagnation des ventes, d'autant plus que cette technologie, si elle n'est pas utilisée correctement, peut prêter à débat.
J. A. : Et pour l'électrique ?
I. V. : Depuis un mois, nous voyons une profonde évolution de l'intérêt que portent les gens sur l'électrique. Elle est principalement liée aux coûts des carburants. Lors des dernières portes ouvertes de mars, nous avons rempli les bons de commandes car les clients prennent conscience que le TCO d'un véhicule électrique est aujourd'hui, dans le contexte actuel, véritablement intéressant. En outre, nous nous assurons de proposer des mensualités attractives car notre but est bien entendu de maîtriser la deuxième et la troisième vie de la voiture, et ce jusqu'à la fin de vie de la batterie.
J. A. : Avez-vous mis des offres particulières sur le véhicule électrique ?
I. V. : En fonction des opérations commerciales, nous avons tout récemment mis en place des offres incluant l'installation de la Wallbox. Ces offres sont appliquées lors de la signature du bon de commande et non pas après que ce dernier ait été signé par le client comme c'était le cas auparavant avec toutes les déperditions que cela pouvait entraîner. Grâce à un outil dans Google Streetview, le commercial peut éditer un devis sur le coût de l'installation en direct. Les équipes commerciales sont accompagnées par Mobilize sur ce sujet et très rapidement nous allons développer d'autres services, comme le smart charging, qui se met en place petit à petit.
J. A. : Avec le recul dont dispose Renault sur le marché du véhicule électrique, quel est le type de clientèle ?
I. V. : Cela a toujours été une clientèle majoritairement périurbaine ou provinciale qui parcourt peu ou toujours le même nombre de kilomètres par jour. Surtout, la clé d'entrée a toujours été la possibilité de se rebrancher chez soi, ce qui est évidemment plus facile en résidence individuelle. Mais avec la mise en place d'un décret dans les semaines à venir qui, outre le droit à la prise, a pour but de faciliter l'implantation de prises en copropriété, nous pensons que nous allons atteindre une clientèle plus urbaine.
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