“2014 a été une année compliquée, mais nous n’avons pas trébuché”
Tout au long de l’année, malgré des ventes en hausse, les déclarations de l’état-major du groupe étaient toujours teintées de prudence. Une prudence qui ne transpire toutefois pas dans le bilan comptable du groupe, avec de nombreuses “premières” durant l’exercice. En effet, le groupe a vendu pour la première fois plus de 10 millions de véhicules à travers le monde, son chiffre d’affaires a dépassé les 200 milliards d’euros et, autre première, et pas des moindres, son résultat opérationnel a dépassé 12 milliards d’euros. En fait, il atteint presque 18 milliards d’euros si l’on ajoute les 5,2 milliards dégagés par l’activité des deux JV en Chine. Pourtant, Martin Winterkorn l’a répété à la tribune : “L’année 2014 a été une année compliquée, mais nous n’avons pas trébuché.” Pour lui, quatre éléments illustrent cette réussite : la variété des produits lancés sur le marché, la technologie qu’ils proposent avec, cette année par exemple, l’offensive hybride rechargeable. Le P-dg a ensuite souligné la force du groupe sur les segments qui permettent de dégager des marges supérieures, vantant ici les performances d’Audi et de Porsche. Enfin, il est revenu sur la place de la Chine dans ces performances : “Nous avons consolidé notre place de leader en Chine.” Il est vrai que le groupe y a vendu 3,688 millions de véhicules (+ 12,3 %) en 2014. Et qu’il veut continuer à croître dans ce pays, Martin Winterkorn rappelant qu’à l’horizon 2019, il aura une capacité annuelle de production de 5 millions d’unités. Le moyen terme semble donc assuré et, pour le long terme, le président a confirmé la reconduction de la JV avec FAW pour vingt-cinq années supplémentaires.
Remettre la marque Volkswagen sur de bons rails
Toutefois, dans ce tableau quasi idyllique, certains analystes pointent du doigt le résultat opérationnel de la marque Volkswagen, qui a encore reculé de 417 millions d’euros en 2014 (- 14,4 %), à 2,476 milliards d’euros. Conscient de cette relative faiblesse, le président a rappelé le “programme d’efficacité”, lancé en juillet dernier, devant conduire la marque à économiser 5 milliards par an d’ici à 2017. Martin Winterkorn a indiqué qu’aujourd’hui, la moitié des 5 milliards avait été identifiée et qu’il comptait déjà sur un milliard d’économie dès cet exercice 2015. Ainsi, l’optimisation des usines fait partie des bénéfices attendus, comme en témoigne la future production du Tiguan au Mexique. Il y aura également une réflexion sur les gammes et les équipements. Ainsi, autre piste mise en avant par le dirigeant, il est possible, à l’avenir, que la Polo ne soit plus proposée en version 3 portes, ce sous-segment ne cessant de perdre du terrain, et que certains équipements restent au catalogue mais à condition qu’ils y aient un taux de monte supérieur à 5 %. Toutefois, il a également rappelé que, dans le résultat opérationnel de la marque Volkswagen, les quelque 2,7 millions d’unités produites et vendues en Chine n’étaient pas comptabilisées. Il se pourrait donc qu’en réalité, la marge opérationnelle soit bien plus élevée. Cela étant, l’objectif du dirigeant est que la marque, dont Herbert Diess prendra les rênes en juillet prochain, revienne à une marge opérationnelle de 6 %. Un objectif qui passera aussi par le marché américain où, après l’offensive des berlines produites localement, Volkswagen va accélérer sur le marché des SUV avec un modèle produit dès 2016 à Chattanooga, qui sera suivi du nouveau Tiguan, à empattement long, dès 2017. Une situation qui fait dire à Martin Winterkorn que “le groupe Volkswagen est mieux placé et plus fort qu’il y a douze mois”.
De la prudence pour 2015
Dans ce contexte, quels sont les attentes et les objectifs 2015 ? “Nous gardons les pieds sur terre, a lancé Martin Winterkorn, et nous livrons des estimations prudentes.” “Nous voulons continuer à croître”, a-t-il indiqué, “mais d’une manière qualitative.” En chiffres, cela se traduit par une hausse “modérée” des livraisons et un chiffre d’affaires en hausse d’environ 4 %, sous réserve des conditions macroéconomiques. Enfin, le groupe vise une marge opérationnelle comprise entre 5,5 et 6,5 % (6,3 % en 2014) et entre 6 et 7 % pour le seul business VP. Pour arriver à cela, le groupe met en avant trois points forts. Le premier d’entre eux reste les produits. Et l’année 2015 sera encore riche avec notamment la Skoda Superb, la nouvelle Seat Ibiza, les nouvelles Audi Q7 et A4, les nouveaux Caddy et T6 dans l’univers utilitaires, et enfin le nouveau Touran pour Volkswagen en attendant la nouvelle génération du Tiguan annoncée pour 2016. Après deux mois d’activité, la tendance semble confirmer les dires du patron avec des ventes en hausse de 1,6 %, à plus de 1,5 million d’unités livrées.
Le deuxième point fort est invisible, mais tout aussi important : les plates-formes modulaires. Martin Winterkorn considère que le groupe a une longueur d’avance en la matière et que les effets de cette stratégie vont être de plus en plus positifs. En 2015, la plate-forme MQB servira de base à 2,7 millions de véhicules (7 millions par an en 2018). Une plate-forme MQB qui représente déjà 15 % du volume de la marque Volkswagen et 30 % de celui de Skoda. Mais l’omniprésence de la MQB ne doit pas faire oublier le déploiement de la plate-forme MLB (longitudinale, principalement utilisée chez Audi), dont une variante va être déployée dans l’usine de Bratislava, et servira de base aux Touareg, Q7 et Cayenne. Il y a aussi la MSB, aujourd’hui la base de la Porsche Panamera, qui sera l’avenir des Bentley. Aujourd’hui, ces différentes plates-formes sont implémentées dans 18 usines dans le monde et elles seront 11 de plus d’ici la fin de l’année 2016.
Gros chantier sur le VI
L’autre gros chantier du groupe est le véhicule industriel avec Scania, MAN et Volkswagen VI et Utilitaires. “Notre objectif est de devenir un leader mondial dans ce domaine et d’être les plus rentables”, a insisté Martin Winterkorn. Pour l’heure, les coopérations entre les différentes marques débutent avec, par exemple, l’arrivée de la boîte Scania dans les derniers TGS et TGX de MAN, et les synergies seront bien plus fortes à l’avenir avec, comme pour les VP, une stratégie modulaire. D’ailleurs, d’ici quelques mois, le groupe va mettre en place une organisation et des hommes pour travailler sur cela. Ce sera la mission d’Andreas Renschler, le nouveau patron de la branche Utilitaires et VI de Volkswagen.
Si la voie tracée par Martin Winterkorn est claire, le dirigeant est conscient que “rien n’est jamais acquis. Nous devons sans cesse nous remettre en cause et explorer de nouvelles directions”. Une exploration symbolisée par le plan Future Tracks, mais aussi par le budget de R&D du groupe en 2014 : 11,5 milliards d’euros ! Mais une fois l’idée trouvée, faut-il encore la mettre en œuvre et la proposer aux clients. Pour cela, le groupe a annoncé récemment un plan d’investissement de 107 milliards d’euros (dont 22 milliards pour la seule Chine) sur les cinq prochaines années.
Pour conclure, Matin Winterkorn, passionné de ballon rond, a filé la métaphore footballistique : “Toute l’industrie automobile vit actuellement une période très stimulante. Nous sommes confrontés à un changement radical qui pourrait être considéré comme historique. C’est pourquoi, avec notre plan Future Tracks, nous ne limitons pas notre vision à la seconde mi-temps d’un match. Nous réfléchissons déjà à la prochaine saison.”
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Bientôt 10 ans
En guise de pré-bilan de son action après dix années à la tête du groupe – arrivé en 2006 il devrait passer la main en 2016 –, Martin Winterkorn est revenu sur l’évolution qu’a connue l’entreprise depuis 2007, l’année de la mise en action du Plan 2018. Durant cette période, les ventes du groupe ont augmenté de 4 millions d’unités, la part de marché mondiale a gagné 3 points, à 12,9 %, le constructeur a créé 140 000 emplois, dont 55 000 en Allemagne, et enfin le chiffre d’affaires a été quasiment multiplié par deux tandis que le résultat opérationnel a plus que doublé. L’occasion aussi de revenir sur le parcours du groupe en Chine, où le résultat opérationnel a été multiplié par trois pour atteindre 5,2 milliards en 2014, soit 900 millions d’euros de plus qu’en 2013. Il faut se souvenir qu’en 2007, le groupe avait livré 910 491 unités en Chine. Depuis, elles ont été multipliées par quatre pour atteindre 3,67 millions.
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