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Le sénat contre les aménagements du contrôle technique

Publié le 12 octobre 2012

Par Frédéric Richard
5 min de lecture
C'est un camouflet pour les opérateurs du contrôle technique. Eux qui espéraient voir apparaître le CT des deux-roues, et pensaient bientôt contrôler les voitures tous les ans, vont devoir repartir en lobbying ! En effet, le sénat semble privilégier le bon sens et le pouvoir d'achat, aux considérations financières et sociales avancées par les syndicats du contrôle technique.
C'est un camouflet pour les opérateurs du contrôle technique. Eux qui espéraient voir apparaître le CT des deux-roues, et pensaient bientôt contrôler les voitures tous les ans, vont devoir repartir en lobbying ! En effet, le sénat semble privilégier le bon sens et le pouvoir d'achat, aux considérations financières et sociales avancées par les syndicats du contrôle technique.

En juillet 2012, le Landernau du contrôle technique apprenait les intentions de la Commission européenne souhaitant des aménagements de la périodicité et de la nature des véhicules concernés par le contrôle technique.

Ce texte est censé contribuer à atteindre l'objectif, fixé par la communication de la Commission du 20 juillet 2010, d'une réduction de moitié du nombre de victimes de la route d'ici à 2020. Il vise également à réduire les émissions associées au mauvais entretien des véhicules. Afin d'y parvenir, la proposition de règlement étend, notamment, le contrôle technique obligatoire aux véhicules à deux et trois roues – cyclomoteurs, vélomoteurs, motos, "trikes" et scooters à trois roues – et aux remorques légères. Le texte prévoit également une augmentation de la fréquence des contrôles techniques pour tous les véhicules.

Aujourd'hui, cette proposition, examinée par le sénat, est retoquée en règle ! Malgré le lobbying des opérateurs de la profession, les sénateurs restent dubitatifs quant à la pertinence de telles mesures… C'est Jean-François Humbert, sénateur UMP, qui a présenté la conclusion du rapport envoyé à la Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire.

Concernant les deux-roues, cristallisant l'ire du plus grand nombre en France, excepté les réseaux de contrôle technique, le rapport sénatorial "s'interroge sur la pertinence des chiffres avancés par la Commission". A titre de rappel, la Commission européenne juge qu'avec 5 100 motocyclistes tués sur les routes en 2008, dont 1 400 conducteurs de vélomoteurs, cette catégorie est surexposée, alors qu'elle ne représente que 2 % des usagers de la route.

Selon elle, 8 % des accidents seraient liés à une défaillance technique. Il existe à ses yeux une nette corrélation entre le nombre des défaillances techniques des véhicules et le niveau de sécurité routière. Au terme d'une évaluation statistique – la Commission considère donc que les défaillances techniques contribuent aux décès proportionnellement à leur implication dans les accidents –, elle estime ainsi que 2 000 décès sur les 35 000 enregistrés sur les routes européennes en 2009 ont pour origine un défaut technique. La moitié d'entre eux auraient pu, selon elle, être évités si un contrôle technique adéquat avait été mis en place. Seize Etats membres ont d'ores et déjà mis en place un contrôle sur les deux-roues, les scooters en étant parfois exempts.

Afin de vérifier la pertinence de ces chiffres, le sénateur s'est appuyé sur le rapport MAIDS, une étude approfondie sur les accidents des motocycles, publiée sous l'égide de l'Association des constructeurs européens de motocycles (Acem) avec le soutien de la Commission européenne. Ce document insiste sur le fait que, sur 921 accidents étudiés dans cinq régions tests de France, d'Allemagne, d'Italie, des Pays-Bas et d'Espagne, moins de 0,5 % sont directement liés à une défaillance technique. Deux des cinq pays étudiés – la France et les Pays-Bas – font partie des onze Etats membres de l'Union européenne qui n'ont pas mis en place de contrôle technique sur les deux et trois-roues.

Le rapport MAIDS note que la principale cause de défaillance technique tient à l'usure des pneus. Un contrôle technique coûteux ne semble donc pas la solution la plus adaptée pour remédier à ce type de problème, le propriétaire d'un deux-roues pouvant aisément contrôler ses pneumatiques. Au vu de ces chiffres, l'introduction d'un contrôle technique obligatoire ne semble pas évidente, aux yeux du sénateur.

Mieux encore, selon Jean-François Humbert, aucun lien ne peut être établi entre une réduction du nombre d'accidents et l'introduction du contrôle technique sur les motocycles. Puisque l'Espagne, l'Italie, la Suède ou la Slovénie, qui ont introduit ces contrôles techniques, ont même connu une augmentation du nombre de motards tués ces dernières années. Le cas de l'Italie est d'autant plus troublant que le nombre de motocycles en circulation a baissé.

A ces réserves, s'ajoute le fait que la Commission se fonde sur trois rapports de Dekra, un des leaders européens du contrôle technique, pour justifier son intervention. Il convient de rappeler que le marché du contrôle des deux-roues est estimé à environ 1,5 milliard d'euros.

Le CT, plus souvent pour les voitures ?

Aux yeux de la Commission, une part importante du total des émissions dues au transport routier provient d'une minorité de véhicules, mal entretenus ou fonctionnant mal. Elle avance ainsi que 25 % de la quantité totale des polluants serait émise par 5 % du parc automobile. Une augmentation de la fréquence des contrôles techniques (4-1-1) serait donc susceptible, selon elle, de juguler partiellement ce problème, en éliminant plus rapidement les véhicules les plus polluants. Tout en réduisant les accidents mortels.

Pour le sénateur, si un tel projet devrait bénéficier aux centres de contrôle technique, avec une hausse d'activité attendue de 60 %, l'immobilisation du véhicule et le coût du contrôle pour l'automobiliste et le motocycliste – entre 60 et 80 euros en France – ne sont pas négligeables. Cette question du coût n'est pas à dédaigner, puisque la Commission prévoit un contrôle plus poussé, visant désormais les systèmes électroniques. Une telle évolution ne sera pas sans conséquence sur la tarification des contrôles.

"Soulignons, en outre, que l'évolution technologique des voitures leur permet aujourd'hui de vieillir de mieux en mieux et ne semble pas totalement justifier une intensification du contrôle technique", analyse Jean-François Humbert.

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