Informatique : Les constructeurs au centre de l’attention
Patrick Pélata a fait du bruit. Sans aller jusqu’à provoquer d’explosion de colère, il aura mis le feu aux poudres. “Les DMS ne sont pas bons en CRM”, a déclaré dans le JA n° 1189 celui qui est en charge de promouvoir Salesforce, éditeur de solutions CRM à l’échelle mondiale auprès des constructeurs automobiles. Des propos dont se sont offusqués quelques acteurs hexagonaux. Chacun ayant son motif de révolte. Pour certains, cette sortie traduisait surtout un constat : le modèle économique du Californien ne conviendrait pas à la distribution automobile, notamment française, et sa courbe de croissance ne s’alignerait pas avec les perspectives préalablement établies. “L’association DMS et outil CRM réclame une maîtrise du secteur automobile et de ses particularités, qu’un outil généraliste ne peut avoir, commente un observateur. Ils ont, en revanche, les moyens d’accompagner les constructeurs, dont l’approche est plus globale qu’opérationnelle.” Pour d’autres, il faut y voir une critique finalement imputable aux constructeurs, dans la mesure où “ils ont toujours été les principaux freins aux développements des modules CRM dans les DMS”. Qu’importe, selon certaines sources, la décision serait prise, et Salesforce débarquerait chez Renault France en 2014, après avoir étrenné ses armes au Brésil et en Belgique. Sera-ce un outil réservé au constructeur comme d’aucuns le préconiseraient ou descendra-t-il au niveau des concessions, au risque de provoquer des incompatibilités d’humeur ? Le constructeur n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet.
Volkswagen : Cross en ordre de marche
Un autre constructeur a lui aussi mené à bien un projet qui lui tenait à cœur. En effet, après presque trois ans de travail, Volkswagen s’apprête à déployer Cross. Une dizaine de sites en sont à ce jour équipés. En vérité, la majorité se constitue de filiales du groupe, notamment à Cannes, Nice (06) et Villemomble (93), mais de grands opérateurs répondent favorablement à cette offre qui leur est faite. Ils cèdent surtout à la proposition commerciale. “A ceux qui signent avant fin 2013 pour une installation courant 2014, Volkswagen accorde une remise mensuelle sur le récurrent de 90 à 67 euros”, croit savoir une source anonyme. “Les formations commenceront en novembre”, précise une autre, ajoutant que la conquête de marché se fera sur le parc installé de T-Systems. Ce qu’il en reste tout du moins. Conçu par Porsche Informatik pour Volkswagen Group, le produit ne conviendra pas à tous. Quand bien même Volkswagen vise une adhésion totale à horizon trois ans, “les grands groupes multimarques ne suivront pas tous”, se défend un éditeur. Et un observateur de se montrer moins tendre à propos du constructeur : “Il ferait mieux de regarder dans son rétroviseur pour voir ses multiples échecs, dont Guedas et T-Systems. Volkswagen sort de son rôle.”
Le cas PSA en suspens
A l’inverse, certains y voient une opportunité “d’équilibre dans le marché” et de “baisse de l’agressivité”, rapprochant cet acte du projet de PSA Peugeot Citroën d’arrêter une liste officielle de DMS homologués. Une décision dont les éditeurs attendaient le verdict durant l’été et qui a été ajournée sine die. Les raisons évoquées se multiplient, mais le départ en retraite d’Olivier Guigou au mois de juillet, le métronome des services informatiques du Français, et la réorganisation qui s’en est suivie, ne seraient pas totalement étrangers à la situation de statu quo. “Le constructeur a validé une liste de trois DMS, à savoir Incadea, ICar DMS et un produit interne”, avance un proche du dossier. Une fuite d’informations qui “aurait provoqué des réactions légitimes d’autres éditeurs et le dossier aurait été retoqué.” Il faut dire que certains se montrent très dynamiques dans le réseau des deux marques et leur éviction pourrait faire désordre.
D’une manière générale, il y a peu de projets d’envergure dans les cartons des DSI des constructeurs. Comme pis-aller, un appel d’offres sera conduit par BMW pour donner de l’allant à Incadea. De manière concrète, la filiale française du Bavarois cherche un intégrateur de haut rang (comme Atos avec Volkswagen) capable de déployer et d’assurer les formations du DMS dont Solware Auto aurait toujours la charge en France. Aucune date ni même de calendrier n’ont été communiqués.
DMS réduit à sa plus simple expression ?
“Les marques sont obnubilées par la reprise en main des infrastructures, juge un analyste. Le DMS pourrait alors être réduit à sa plus simple expression, faire de la facturation et de la comptabilité.” Une vision un peu extrême. Une prédiction qui a peu de chance de se réaliser, mais, néanmoins, une tendance de fond à surveiller alors que la mise en “nuage” séduit de plus en plus de distributeurs.
Il est vrai que la technologie Cloud présente de nombreux avantages en ces temps de disette. Les concessionnaires et agents n’ont plus les moyens d’investir et cherchent à rationaliser leurs organisations, leurs infrastructures et leurs coûts. Ce qui n’est pas sans entretenir ce climat de guerre commerciale du côté des éditeurs qui, pour émerger, ne se limitent pas qu’à faire chuter les tarifs, mais s’élèvent en prestataires de services de plus en plus globalisés. Les cerveaux qui ont accouché de solutions pertinentes au cours des dernières années semblent avoir encore de quoi surprendre le monde de la distribution, tandis que les autres – souvent les géants – investissent en masse pour rattraper leur retard technologique. Quand bien même le nombre d’éditeurs n’a jamais été aussi réduit, la bataille n’a jamais été aussi rude entre eux. Constructeurs et concessionnaires n’ont plus qu’à faire leur choix.
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