Entretien avec Christian Bailly, P-dg d’Autosur : "Elargir les domaines d'activités de la profession"
...en interne votre prochain départ de la direction d'Autosur. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Christian Bailly. A un moment donné dans sa carrière, il faut faire le point. Plusieurs fois, j'ai pensé à "l'après". Maintenant que j'ai 65 ans, je me suis dit qu'il était raisonnable d'arrêter. J'ai rencontré le conseil d'administration et nos actionnaires pour leur faire part de ma décision. S'ils m'ont félicité pour les orientations prises, ils m'ont surtout demandé de terminer l'exercice 2007 pour accompagner encore un peu la société Secta/Autosur et passer en douceur le témoin à mon futur successeur.
JA. Quel bilan faites-vous de ces 13 ans passés à la tête d'Autosur ?
CB. Autosur est devenu avant tout un réseau, un ensemble de partenaires. Il existe, et j'en suis fier, un vrai rapport entre ces partenaires et l'enseigne Autosur. J'ai toujours souhaité travailler avec un réseau qui réagissait. Je dois dire que je suis servi, mais cela va toujours dans le bon sens et cela donne une véritable implication. Aujourd'hui, la société est saine et pérenne et s'appuie sur des collaborateurs attachés à la marque.
JA. Quel regard portez-vous sur l'évolution de la profession depuis sa création ?
CB. J'ai été surpris en arrivant dans le milieu de voir que la plupart des acteurs n'étaient pas issus, contrairement à moi, de la filière automobile. C'est dommage car cela a empêché de mieux structurer la profession. Nous avons pu constater une certaine soumission vis-à-vis du monde automobile mais aussi des écarts néfastes comme les remises, les contre-visites gratuites... Le contrôle technique a rapidement perdu de sa noblesse et d'une situation d'euphorie nous sommes tombés dans un commerce de proximité où les prestations sont devenues ordinaires. Hélas, la profession n'est pas régie par un numerus clausus et ne s'est pas protégée comme il fallait. Les centres se sont créés à une vitesse exponentielle. La taille du gâteau est devenue trop petite et certains ont pourtant poursuivi les ouvertures. On nous a accusé, nous, les réseaux, d'être à l'origine de ces maux, or ce sont les centres indépendants qui se sont le plus développés.
JA. En cette fin d'année, comment se porte le réseau Autosur ?
CB. Nous comptons aujourd'hui 750 centres pour environ 500 partenaires. En outre, nous pouvons affirmer que notre activité par centre est 10 % supérieure à la concurrence.
JA. Le problème de rentabilité d'un centre peut-il se poser aujourd'hui ?
CB. Ce n'est pas mon problème. Notre problématique est différente de celle de la distribution automobile. Toutefois, nous pouvons admettre que nous devenons vigilants en dessous des 2 000 contrôles par an. Par ailleurs, nous constatons le développement de plaques multi enseignes et multisites car certains opérateurs pensent que c'est le moyen de faire des économies d'échelle et de limiter les coûts fixes.
JA. Cela veut-il dire que certains centres sont en danger ?
CB. Certains centres sont à vendre soit pour des questions de pérennité soit pour des questions d'âge car certains directeurs atteignent l'âge de la retraite. En tant que dirigeant d'une enseigne, je ne peux rien faire, rien empêcher ni favoriser. En revanche, je suis scandalisé de l'attitude de certaines enseignes qui tentent avec des pratiques commerciales illicites de faire basculer certains centres vers leur réseau. Ces activités nuisent à la profession. Si transfert d'enseigne il y a, le réseau qui aurait perdu un centre va se voir obligé d'en créer d'autres. Je pense qu'il y aurait un plus grand intérêt à intéresser le personnel des centres afin qu'il se sente prêt à reprendre un centre plutôt que de le laisser disparaître.
JA. Vous vous êtes également lancé dans le PL avec Technosur. Celui-ci fonctionne-t-il comme vous l'espériez ?
CB. Technosur va au-delà de mes espérances. Nous venons d'ouvrir notre 20e centre. Nous restons fidèle à notre philosophie de départ qui consistait à dire que nous proposions du contrôle technique poids lourds à tous les opérateurs VL qui le souhaitaient. Mais il était hors de question de s'y lancer sans être économiquement viable. Toutefois, Technosur devrait encore se développer. Je reçois des candidatures tous les jours, j'en accepte certaines et j'en refuse d'autres. Mais il y a de la place pour tout le monde dans le contrôle technique PL. Nous pouvons aller jusqu'à 400 centres au total, toutes enseignes confondues. De son côté, Technosur dispose d'un réseau comptant un centre par département.
JA. Que répondez-vous à ceux qui vous accusent d'appâter les professionnels en leur proposant un "pack PL" sur une base de 12 000 contrôles par an ?
CB. C'est de la malhonnêteté intellectuelle ! Axel Noack, que je respecte, voudrait 45 % du marché du contrôle technique PL sans que les autres aient le droit de cité. En outre, il émet des doutes quant à la rentabilité des autres initiatives sans prouver la rentabilité de son réseau. Technosur ennuie tout le monde, c'est pourquoi les deux principaux réseaux (Autovision et Dekra) essaient de nous mettre des bâtons dans les roues. D'un côté, Autovision va vérifier au cadastre si les centres Technosur mesurent bien les 5 000 m2 requis... De l'autre, Dekra envoie des mailings à nos affiliés pour leur faire des propositions... Sans parler des pouvoirs publics qui ne pensaient pas que Technosur pouvait fonctionner...
JA. Pour conclure, comment voyez-vous l'avenir de la profession ?
CB. Soit nous restons dans cette monoculture qui à terme paupérisera la profession, soit nous essayons d'élargir ses domaines d'activité. C'est dans ce sens qu'il faut aller.
Il faut absolument trouver des passerelles professionnelles pour offrir des activités supplémentaires au contrôle technique et permettre la diversification de l'activité. Je pense notamment à un rapprochement avec le commerce et la réparation automobile, au domaine de l'expertise, pour faire de nos contrôleurs des contrôleurs "plus".
En outre, la profession doit se battre pour que le monde automobile reconnaisse l'utilité du contrôle technique et lui permette d'élargir son champ d'investigation, c'est-à-dire le nombre de points de contrôle.
Propos recueillis
par Tanguy Merrien
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