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eCarTec 2013 : on connaît la chanson…

Publié le 16 mai 2013

Par Alexandre Guillet
6 min de lecture
Le Salon eCarTec est au Mondial de l’Automobile ce que les ventes de véhicules électriques sont à celles de véhicules thermiques. Dès lors, ce micro Salon est surtout attendu pour son bouillon d’idées. Mais faute d’éclosion du marché, cette édition a épousé un mode “ritournelle”.
Le marché est toujours aussi insaisissable : selon les dernières prévisions de l’IEE, le VE pourrait représenter entre 12 et… 2 % des ventes mondiales en 2035.

A l’ouverture du Salon, Robert Metzger, directeur d’eCarTec Paris, s’est voulu rassembleur en soulignant “l’importance que la France et l’Allemagne travaillent de concert. C’est la principale condition pour que l’Europe ne prenne pas de retard par rapport à d’autres régions du monde sur le dossier du véhicule électrique”. Dans cette optique, Marc Teyssier d’Orfeuil s’est d’ailleurs réjoui des rapprochements actuels entre l’Alliance Renault-Nissan et Daimler. Robert Metzger a par ailleurs rappelé le positionnement délibérément BtoB de l’événement : “Nous sommes focalisés sur les collectivités, notamment les mairies, les entreprises et l’univers de la distribution. Le grand public, ou plus exactement les particuliers, ne représentent qu’environ 10 % du visitorat”. Joseph Beretta, président de l’Avere-France, estime d’ailleurs que “si les collectivités sont globalement bien adressées, les efforts de sensibilisation doivent être renforcés à destination des entreprises”. En termes de visitorat, l’édition 2013 s’est révélée en demi-teinte. En effet, 1 500 visiteurs, dont une soixantaine de journalistes, ont été recensés sur les trois jours du Salon. C’est peu, notamment rapporté aux 70 exposants, valeur il est vrai soutenue par l’espace eBikeTec dédié aux deux roues électriques sous la houlette de Gaëtan Bayle, co-organisateur/ExtraEnergy France.

Infrastructures de recharge : 50 millions d’euros à portée de main !

Même si le marché des véhicules électriques a quelque peu frémi au premier trimestre en France, force est de reconnaître qu’il demeure encore epsilonesque. Pourtant, on ne peut plus objecter que l’offre de produits est inconsistante et avec Zoé, Renault propose même un modèle abouti, parfaitement ancré dans la modernité. “L’électromobilité, tout le monde en parle depuis assez longtemps et maintenant, il faut passer à l’action. L’un des éléments clés résidant dans la nécessité de réussir à faire essayer les véhicules”, reconnaît dès lors Joseph Beretta. Toujours aussi enthousiaste, Louis Nègre, sénateur des Alpes-Maritimes/Provence Alpes Côte d’Azur, tempère cette notion d’urgence : “Le véhicule électrique garde encore tout son avenir en France comme en Europe. Et la France a les cartes en mains pour y jouer un rôle de leader. Notamment parce qu’il y a eu une impulsion politique ferme dès le départ, en 2009 avec le Grenelle puis en 2011 avec le Livre Vert que j’ai supervisé. Or, la nouvelle majorité va aussi dans le même sens. Il ne faut pas perdre de vue que l’enjeu est double. D’une part, c’est une opportunité pour construire une branche industrielle innovante qui peut générer des emplois. D’autre part, et c’est particulièrement significatif pour tout élu local, il s’agit d’un levier pour améliorer la qualité de vie, en réduisant les nuisances sonores, mais aussi la pollution locale qui est un lourd fardeau pour la santé publique”. Louis Nègre relativise aussi l’objection stigmatisant le faible déploiement des infrastructures de recharge : “Sur ce point précis, il ne faut tout de même pas oublier que nous avons 50 millions d’euros posés sur l’étagère, à portée de main !”.

“Le bon sens n’est pas l’ennemi du temps !”

La contrainte de la recharge a cependant la peau dure et s’est invitée avec insistance dans les débats du forum. Si Marc Teyssier d’Orfeuil estime qu’il n’y a pas assez d’infrastructures dans les rues, Jean-Louis Legrand, du Ministère de l’Ecologie, considère qu’on peut d’ores et déjà recharger son véhicule assez facilement et insiste surtout sur le fait qu’il faut faire montre de prosaïsme. “Le marché ne se développe pas encore significativement et les prévisions demeurent très incertaines. Il n’est donc pas indiqué de multiplier les points de charge à gogo. En clair, il faut faire attention à ne pas faire le mal en voulant faire le bien ! Car en ne choisissant pas le bon tempo, on peut créer de nouveaux obstacles qui pourraient engendrer un gel des investissements. Il faut faire simple et à un format raisonnable en se rappelant que le bon sens n’est pas l’ennemi du temps”, assène-t-il. Michel Couture, directeur de la mobilité électrique chez EDF, abonde aussi dans ce sens tout en soulignant que l’enjeu névralgique de l’implantation des bornes se situe dans les zones de relais intercités, où il voit un parallèle avec la capillarité des stations-service. “Mais dans cet espace, c’est la charge rapide qui s’impose, bien entendu. Or, c’est un système plus complexe et risqué qui nécessite de la surveillance. Mais c’est sans doute une idée à creuser pour que le véhicule électrique soit perçu comme un véhicule normal”, explique-t-il. Un principe de charge rapide qui n’a pas que des partisans, Nicolas Meilhan, consultant chez Frost&Sullivan, affirmant que “97 % des charges s’effectuant au domicile ou sur le lieu de travail, il faut calibrer raisonnablement les investissements”, tandis que Jacques Mercier, représentant d’Autolib’/Groupe Bolloré, indique que cette technique “use plus rapidement les batteries”.

Vers une approche communautaire de la charge ?

Reste encore à savoir qui doit prendre en charge financièrement ces installations… Pour Thierry Viadieu, directeur du programme Nouvelle Mobilité de Renault, les choses sont claires : “Il ne revient pas aux constructeurs de financer les infrastructures ! Nous n’avons d’ailleurs pas financé les stations-service. Nous pouvons donner un élan, comme Renault et Nissan le font déjà, mais ce n’est pas notre métier. Par ailleurs, en prenant quelques mètres de recul, on réalise que nous ne sommes pas obligés de tout créer ex-nihilo. Des prises sont disponibles en ville et nous pourrions les intégrer dans un système. Une approche communautaire de la charge mérite d’être étudiée, surtout qu’elle est naturellement favorisée par la connectivité”. Une approche communautaire et centralisée qui est par exemple développée par une entreprise comme Hubject (société qui vient de voir le jour avec Daimler, BMW, Bosch ou encore Siemens comme actionnaires), qui prône un réseau de charge international et interopérable et une facturation à guichet unique via un e-contrat de roaming. S’il défend avant tout sa technologie “maison” de recharge sans fil, actuellement en test avec Renault, Anthony Thomson, vice-président business et marketing Europe de Qualcomm, tient un discours similaire : “Il faut mettre en place des standards de charge et d’interopérabilité, tout en laissant la possibilité aux Tier 1 de se différencier ensuite”.

La piste des discriminations positives

En somme, rien de bien nouveau au royaume de “l’œuf ou la poule”… Et bien qu’il fut aussi question d’auto-partage (“dispositif le plus souvent rentable avec des véhicules thermiques”, dixit Nicolas Meilhan…) et d’Autolib’, avec le débat récurrent sur l’ajout de véhicules en zone urbaine, peu de pistes susceptibles d’accélérer l’économie réelle du véhicule électrique furent avancées. L’argument des discriminations positives pourrait néanmoins prendre forme assez vite, comme l’a laissé entendre Jean-Louis Legrand : “La ministre Delphine Batho a engagé une mission importante sur l’identification des véhicules verts et une solution pourrait être entérinée d’ici la fin de l’été”. Peut-être en saurons-nous plus lors de la prochaine édition d’eCarTec Paris, qui se tiendra du 20 au 22 mai 2014…

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