CRM - La conciergerie est-elle réservée au Premium ?
En 2009, alors que le marché du Premium est déjà acquis aux trois Allemands, Lexus, en bon challenger, tente de percer par l’innovation. La marque comprend qu’il faut amener le débat sur le terrain du service. En plus de concevoir un aménagement de concession qui fera un temps autorité, Lexus lance donc un service d’assistance aux conducteurs. On parlera de conciergerie. Très vite, d’autres constructeurs suivront, dont BMW, grâce à l’introduction de l’option ConnectedDrive dans ses véhicules.
Dans les deux cas, le schéma repose sur un centre d’appels, chargé d’accompagner le conducteur de la marque dans tous ses besoins : trouver des coordonnées, organiser des séjours, acheter des billets d’avion ou de train, réserver un hôtel ou un restaurant, envoyer des fleurs, cadeaux, etc. Pour ce faire, par exemple, Lexus a signé un partenariat avec John Paul, spécialiste du genre, en charge de marques comme Visa, L’Oréal ou plus récemment de la Ligne DS qui, en effet, propose désormais ce service à ses clients. Il aura donc fallu peu de temps d’existence à la marque française pour céder aux sirènes de la conciergerie. “Nous pensons aller plus loin dans la démarche mais, pour le moment, rien ne peut être communiqué, faute d’engagement officiel”, fait patienter une porte-parole de Ligne DS.
Une autre preuve de démocratisation de ce service serait d’ailleurs à mettre au crédit de Mercedes. A la fin du printemps 2014, la marque étoilée, forte d’une première expérience d’un an, a dupliqué le mécanisme du VP vers le VUL. Pour commercialiser l’offre, Mercedes-Benz France l’inclut de manière systématique au ContratService Complete. En fait, la marque a choisi d’absorber ainsi les frais de conciergerie, estimés à une vingtaine d’euros par traitement de demande. En conséquence de quoi, le nombre de requêtes est limité à dix par année de contrat souscrite, soit vingt à cinquante demandes possibles (utilisables à discrétion). Au terme de sa réserve, le client peut acheter un pack de dix requêtes, facturé 200 euros environ. A titre de comparaison, les tarifs de Lexus s’élèvent à 1 800 euros par an, à partir de la quatrième année de service. Lors du dernier pointage officiel, communiqué par la direction de la filiale française de Mercedes, 10 000 contrats environ avaient été souscrits (dont 9 500 au VP et 500 au VUL).
La conciergerie automobile
Tout cela relève de la conciergerie dite “générale”, soit un niveau intermédiaire de prestation. Le stade ultime restant le modèle économique de la conciergerie dite “automobile”. Ce concept importé des pays anglo-saxons comprend “une gestion complète de la vie du client et de son bien”, disent les prestataires spécialisés. S’entend ici toute la logistique, en particulier vers les ateliers d’entretien. “Au Royaume-Uni, rares sont les conducteurs de véhicules Premium à ne pas avoir de service de conciergerie, alors qu’en France, cela peine à démarrer”, observe l’un d’eux. Différence de culture, à n’en pas douter.
Mais comment cela se met-il en place ? Comme bien souvent, il y a deux écoles, ou bien la marque pousse ou le concessionnaire prend une initiative. Lexus s’affiche dans la première colonne et enjoint ses distributeurs à proposer un service de convoyage. Tous ne l’appliquent pas de la même manière. A Tours, par exemple, il est délivré gratuitement à tous les possesseurs d’une Lexus, quelle que soit son ancienneté. “Nous en faisons un argument commercial et un levier de fidélité à l’après-vente”, rapporte un collaborateur. A Paris (17e), le prix est conditionné à partir d’une certaine distance. A Reims, dans le groupe Tenedor, le service de valet a été suspendu, “par manque de personnel pour l’assurer”, explique-t-on en interne.
D’autres marques y pensent forcément. C’est le cas de Renault. “Au Mondial, le concept Elysée Paris introduisait une notion de service d’un nouveau genre. Nous sommes en phase d’étude de faisabilité et n’avons encore rien décidé. Il faudra attendre encore quelques mois pour en savoir davantage”, a temporisé une porte-parole du groupe. Dans les coulisses du salon de Genève, la direction nous confiait se heurter à la problématique des volumes, bien supérieurs à ceux des Premium, et donc autrement plus complexes à gérer.
Les coûts opérationnels sont mis en cause. “Entre le personnel, le carburant, l’assurance et les autres frais, le prix du convoyage peut aller du simple au double”, dit-on chez HDS France, un prestataire de la région du Rhône. Si les concessionnaires se présentaient comme une cible toute désignée pour ce type de société, le soufflé est retombé. “Ils n’ont pas les moyens de le financer et n’ont pas trouvé celui de le facturer”, juge la direction de la société. Son salut, juge-t-elle, passe par la clientèle privée et aisée, et non plus par les contrats avec des points de vente généralistes.
“Gagner en force de négociation”
Ce n’est pas totalement faux, mais il y a des contre-exemples. Certes, pour la plupart localisés à Paris et sa région proche. On peut citer le cas d’Audi Bauer, précurseur dans la Capitale. En 2012, le groupe a lancé Bauer Paris Conciergerie. La prise en charge du véhicule est vendue telle une option. Il faut compter entre 490 et 1 990 euros, selon le modèle. “Les vendeurs le présentent comme un service, au même titre que le financement et l’assurance, explique Pierre-Yves Vuillemin, le responsable marketing du groupe. Cette offre séduit en premier lieu les conductrices d’A1 et Q3.” Elle permet aussi de compenser l’absence d’atelier sur le site de Saint-Honoré, situé en intra-muros. “Les particuliers sont traités en marque blanche par CEO Car Caring et les professionnels par nos propres équipes. Dans les deux cas, nous tâchons de créer une relation individualisée, profitant du faible taux de roulement des collaborateurs”, complète-t-il.
Cette initiative a le mérite de prendre le relais du programme du constructeur, qui ne prévoit rien dans ce domaine. Audi Premium (16e) a également retenu ce choix, en s’associant à Leonars. “Nous gagnons en force de négociation, d’autant que nous délivrons la prestation sans surcoût”, explique le site Audi. Il est rejoint dans son idée par Boris Boutin, le directeur marketing du groupe Pozzi qui, lui, a mis en place l’acheminement vers les ateliers, mais également, en amont, la livraison des véhicules neufs. “Il y a une vraie demande, assure-t-il, nous pouvons alors maintenir la marge commerciale puisqu’il y a un élément différenciant à grande valeur ajoutée, compte tenu de notre cible.” La logistique implique deux collaborateurs au minimum et, la durée d’une mise en main étant de deux heures en moyenne, si on ajoute le temps de trajet, alors on totalise près d’une journée temps-homme par client. “Anecdotique”, prétend le porte-parole du groupe.
Les ressources humaines se révèlent donc être la clé. Jean-Charles Armand, le patron de Full Car Service, a toujours défendu l’idée que la livraison ex-situ des VN ne saurait être économiquement viable qu’en sous-traitant la prestation. Ce qui est valable aussi pour ce qui a trait à l’après-vente.
Les marques généralistes, désireuses de monter en gamme, envisagent d’activer ce levier. Les directeurs de sites y verraient, dit-on, un intérêt, notamment dans la gestion des clients les plus âgés ou à mobilité réduite. Mais le luxe a un prix. Le ticket d’entrée ne le rend pas accessible aux premiers venus. Il faut aussi savoir l’expliquer aux consommateurs. La marque Lancia s’est jadis aventurée – sous forme de pilote – sur ce terrain. Elle a connu un revers. Raison pour laquelle les Français prennent le temps de la réflexion et monteront probablement en puissance en commençant par le traitement des clients professionnels.
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FOCUS - Fullcar Services élargit l’éventail
Pratiquement un an après son grand lancement, Fullcar Services fait évoluer son site Internet de réservation. Il s’agit plus concrètement d’ajouter le transport par camion à son offre multimodale. Jusqu’à présent, il était uniquement question du train et du convoyage. “Des solutions qui présentaient quelques limites, sur le plan géographique, comme l’admet Jean-Charles Armand, le président de Fullcar Services, notamment sur les axes est-ouest. Pour mémoire, en effet, Auto Train, dont le logisticien est partenaire, ne dessert que les villes du Sud méditerranéen.”
La prochaine étape de développement doit conduire à la dématérialisation des factures. Une fois cette étape accomplie, Fullcar Services entend pouvoir faciliter la gestion administrative des dossiers et des ressources humaines.
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