Comment le Citypod ouvre Renault à la mobilité futuriste

Et si Renault devenait un constructeur de véhicules au service de tiers opérateurs ? Cette piste fait partie de celles étudiées au Square, la structure d'innovation ouverte du groupe. C'est en tout cas le message qu'ont tenu à faire passer trois responsables de Renault, ce 18 juin 2018, à l'occasion d'une conférence dédiée à la mobilité de demain, organisée par nos confrères de Silex ID.

Tout est parti du Twizy. Les ingénieurs qui se sont essayés à le transformer en véhicule de livraison, adapté aux milieux urbains contraignants, ont poursuivi l'expérience en le faisant évoluer vers une structure "ouverte à la créativité" en interne. Ce sur quoi l'idée a émergé de proposer un véhicule "châssis", doté d'intelligence pour circuler en toute autonomie, mis à la disposition de la créativité de tiers. Un projet qui répond au nom de code de "Citypod".

Partager les règles de conception et ouvrir le système

Une vision qui ose poser la question de la légitimité de Renault sur une partie de la chaîne de valeur, notamment la délivrance du service. "Nous nous sommes interrogés sur la manière d'ouvrir proprement un système à des partenaires extérieurs, a expliqué sur le projet Guillaume Tilquin, cadre de la stratégie des nouvelles mobilités de Renault, durant la conférence. Nous avons aussi réfléchi à la manière de partager nos règles de conception, c'est-à-dire des informations que nous gardons habituellement cachées." Le Citypod bouscule l'ordre établi.

S'il venait à exister, le Citypod proposerait donc une base matérielle et un kit de développement. Le logiciel comme la configuration de la carrosserie appartiendraient à l'opérateur du service, qui pourrait le modeler en fonction de ses besoins. "Il vaut mieux être Foxconn que Nokia", ont-ils utilisé comme point de comparaison. Pour les non-initiés, cette image fait référence au monde de la téléphonie. Il vaut mieux être le fabricant en marque blanche de l'iPhone qu'un constructeur qui paye de sa disparition sa volonté d'avoir voulu tout maîtriser. Une évolution de la perception qui renvoie à faire des constructeurs des fournisseurs de carrosserie.

Souvenir du Toyota e-Palette

Ce concept n'est pas sans rappeler l'e-Palette de Toyota, dévoilé lors de l'édition 2018 du CES de Las Vegas. Pour mémoire, il s'agit d'imaginer un véhicule de transport autonome de biens et personnes "Lorsque nous avons pris connaissance du projet, nous avons éprouvé la frustration de l'ingénieur qui a été pris de vitesse", confie Guillaume Tilquin. Ce dernier soutient toutefois l'argument de la profondeur du projet : "Toyota n'a montré que des vidéos de cas d'usage. Nous avons été plus loin en dessinant les croquis d'une approche systémique, d'un modèle économique de partage de la valeur et en imaginant les interactions possibles." Précisons néanmoins qu'Amazon, Pizza Hut, Uber et Didi Chuxing ont manifesté leur intérêt auprès du constructeur japonais.   

Le Citypod impose moult challenges. Il y a celui de l'IT, évidemment, mais aussi le défi de la sécurité. Avec les partenaires, il faudra également aborder les problématiques industrielles et servicielles, avant d'envisager la moindre commercialisation. "Nous avons la volonté de réaliser des expériences, a lancé Guillaume Tilquin. Nous attendons des manifestions d'entreprises, de logisticiens et surtout de villes, sans qui ce ne sera pas réalisable." Au Square, Renault profite d'un bassin fourni. En dix-huit mois, le nombres de partenaires a plus que triplé, passant de 7 à 25. "La construction de l'écosystème est partie d'une base simple, mais forte", se félicite Guillaume Tilquin.