Varroc Lighting Systems : l’Alternative !
Quelques heures après être descendu du petit avion à réacteurs qui dessert la ligne Prague – Ostrava et avoir atteint le site de Varroc, à Novy Jicin, il vient plus à l’envie de s’adonner à un portrait plutôt que de rédiger un reportage. Aussi surprenant que cela puisse paraître, quand un groupe offre un supplément d’âme aussi fort, le portrait s’impose comme la meilleure palette pour en dessiner les expressions. Emanation de plusieurs histoires, fils ou fille de nombreux géniteurs, survivant de quelques avatars de la grande histoire, Varroc Lighting Systems Novy Jicin se redresse fièrement derrière ses dizaines de développements chaque année, dessinés pour la première monte des plus grands constructeurs automobiles, Premium compris. A l’ombre de leurs projecteurs, feux arrière et systèmes des commandes électroniques, ingénieurs, designers, et techniciens revendiquent le droit à la conception la plus innovante dans un univers, où chaque optique devient une signature de marque. De grande marque. Mais revenons à la genèse.
Tchèque puis américain et indien
Trois continents ont eu le privilège de posséder les sites tchèques de Novy Jicin depuis la naissance de la société, fondée en 1879, par Josef Rotter, alors fabricant de lampes pour calèches et autres voitures hippomobiles, la lanternerie, en somme. Appelée “Joro” (pour Josef Rotter) la première entreprise née en République tchèque progresse au gré de ses innovations, jusqu’à sa nationalisation en 1950, date à laquelle elle sera rebaptisée “Autopal”, nom qui la fera largement connaître. La suite met en scène un acteur bien plus identifiable, il s’agit de Ford qui, après avoir créé une usine de systèmes d’éclairage automobiles appelée “Carplastic”, à Monterrey (au Mexique), entend donner à cette division une dimension beaucoup plus importante et rachète “Autopal”, en 1993. Les deux sont, quelques années après, en 2000, intégrées dans le nouveau groupe issu de la division des pièces et composants de Ford, devenu… Visteon Corporation. Un groupe, désormais autonome, et en pleine expansion qui s’entoure de co-entreprises en Inde, à Pune (TVAP, laquelle entre totalement dans le giron de Visteon en 2010) et en Chine, à Changzhou (VTYC). Autopal, à cette époque, végète quelque peu, les investissements ne sont plus à la hauteur des ambitions et le propriétaire bien loin, et très préoccupé comme on sait. Les trois coups qui précèdent le lever de rideau se rapprochent jusqu’à l’année 2012, année faste où le groupe indien Varroc achète la division “Lighting” de Visteon, à savoir les usines de République tchèque, du Mexique, et d’Inde, ainsi que les centres de Recherche et Développement tchèques, français, allemands, indiens et américains. Peu de temps après, usines et centres de R&D de Chine intègrent, aussi, ce qu’on appelle désormais Varroc Lighting Systems, en 2013. Comme s’en émerveille Todd C.Morgan, senior vice-president du groupe, basé à Novy Jicin : “Ce fut une très grosse acquisition, car Varroc Group, dont les activités portaient sur la fabrication de pièces et d’équipements automobiles et 2 roues (pièces de châssis, électriques, polymères, de carrosserie, et systèmes d’éclairage pour VL), essentiellement à Aurangabad (Inde et pour le marché indien) passe grosso modo de 5 000 à plus de 10 000 employés et de 472 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2012, à 1,062 milliard d’euros en 2013 !” Avec, désormais, 33 usines, (après le rachat de Triom, société leader en systèmes d’éclairages pour 2 roues en Europe), 7 centres de R&D et 660 ingénieurs dont une grande partie aux USA, le groupe Varroc joue dans la cour des grands, et ce sont ses clients qui en témoignent le mieux… (La division “Lighting Systems” représentant, dans l’ensemble, 6 centres de R&D, 501 millions d’euros de CA, 4 800 employés et 8 sites de production).
2013, année de la renaissance !
Depuis le rachat par Varroc, l’ensemble du personnel et des cadres dirigeants ne vit et ne respire que par les systèmes d’éclairages, rien n’est désormais considéré comme impossible. Même l’usine de Tatra dans le village voisin, laissée pour compte, semble avoir bénéficié du souffle du renouveau, en étant, elle aussi, rachetée par de jeunes investisseurs (Mais ceci est une autre histoire). Chez Varroc, les investissements en matériels, équipements et, également, en rénovation des bâtiments n’ont pas cessé, donnant à l’ensemble un air de fourmilière bienveillante. Mais qu’on ne s’y trompe pas, sous la bienveillance, couve l’esprit conquérant. Si Varroc n’entend pas faire de l’ombre aux deux grands du secteur, son besoin de briller enfle, dans le bon sens du terme, au fur et à mesure des lancements, dont nous donnons quelques exemples. Pour les feux arrière, citons les Jaguar XF et XF Sportbrake, les Citroën C4, DS3 et DS4, les Ford Focus et Fiesta, la Volkswagen Jetta Hybrid, la Peugeot 208, les Skoda Octavia Combi, Rapid, l’Opel Adam… Grandes ventes, Premium, allemands, français, JLR… les feux se déclinent sur tous les marchés, de même que les optiques avant : Tesla Model S et Bentley Flying Spur ou Continental, Citroën DS 5 et Range Rover Evoque, VW XL1, Ford Fiesta et Focus, Jaguar XK et XF, Opel Adam ou encore Land Rover Discovery Sport, etc. Lorsqu’on demande, un brin taquin, pourquoi les constructeurs automobiles viennent chez Varroc Lighting Systems, Todd Morgan répond par les mots “souplesse, réactivité et services”. Qu’il détaille avec Constantin Nedelcu, le directeur des opérations et Miroslav Staron, le directeur de l’ingénierie centrale.
De l’intégration en toutes choses
L’une des grandes spécificités du site de Varroc Lighting Systems en République tchèque, en effet, c’est d’avoir assemblé en un seul lieu l’ensemble des services permettant de produire un projecteur ou un feu arrière, de sa conception à sa production en grande série, en passant par tous les tests obligatoires. Unité de lieu, de temps et d’espace pour constituer un système complet. Y compris dans le management car, même si tout le “staff” est aux Etats-Unis, à part Todd Morgan, et que le propriétaire réside en Inde, une grande liberté d’action est laissée aux dirigeants de Novy Jicin, officiant dans la plus grosse unité de production du groupe avec 8 millions de pièces fabriquées (les USA n’en réalisant par exemple que 800 000 mais en progression constante et rapide), dont 50 % de projecteurs, 34 % de feux arrière, la petite lanternerie restant aujourd’hui secondaire. La plus grosse production du groupe donc est envisagée du début à la fin, comme le souligne Todd Morgan : “Nous sommes capables de tout produire ici, y compris les boîtiers de projecteurs. Par exemple, toutes les pièces plastiques sur le projecteur sont fabriquées en interne. Ce que l’on ne produit pas ici, ce sont les pièces électroniques, mais elles sont dessinées par nous et entrent dans un cahier des charges que nous adressons à notre sous-traitant.”. En effet, ajoute-t-il, “Ce qu’il y a d’intéressant ici, c’est que nous possédons également notre propre bureau de style et pouvons proposer aux constructeurs des innovations en les montrant soit en 3D soit en prototypes, tout étant réalisé chez nous. Cela nous donne beaucoup de réactivité par rapport aux constructeurs et à leurs changements de cap rapides dans le design global”. De la même façon, les moules et les outillages sont conçus sur le site, cela sert à la fois pour un prototype et pour les moules des pièces plastique en grande série, car l’injection plastique est aussi gérée sur place à l’aide de 42 presses à injecter, de 1 à 4 couleurs. Parallèlement, comme le design est intégré, Varroc invite les constructeurs à des journées technologiques où sont dévoilées toutes les innovations. Souvent, c’est à l’occasion des tests qualité que se font les échanges avec eux, car là encore, tous les équipements de tests sont présents à Novy Jicin. Comme dans les autres unités du groupe. Il ne nous aura pas échappé qu’entre les sites de production et les centres de R&D, Varroc Lighting Systems suit les constructeurs partout dans le monde…
Des contrôles qualité sophistiqués
Chaque marque a son ingénieur qualité référent qui parle la langue de son interlocuteur, simple mais efficace. Varroc a mis en place des interfaces régionales pour accompagner localement chaque client, notamment en France sur le site de Vélizy. Et les ingénieurs travaillent de concert avec les services achats dans le cadre de “costing areas”, afin d’optimiser les coûts et donc de réduire les prix, pour traiter aussi bien le premium que la très grande série. Dans l’usine, chaque pièce est contrôlée individuellement après que les tests aient bien été validés, et ce à l’aide d’instruments sophistiqués. On relève ainsi, pas moins de trois machines chargées de mesurer la résistance aux vibrations, auxquelles on ajoute la variable climatique. Dans des chambres thermiques, les températures les plus élevées côtoient les plus basses et l’on mesure l’impact des chocs thermiques, tout en jouant avec l’humidité, les différents facteurs sont croisés pour prévenir toutes les situations les plus extrêmes. De la même façon, les tests de résistance à la poussière se mêlent à ceux de l’étanchéité. L’une des recherches les plus poussées porte sur le risque de condensation, car, comme il faut que le projecteur soit ventilé, cela devient une problématique à gérer. Les techniciens imposent ainsi aux produits les variations de températures, de pression d’air (vent) et d’eau (pluie) pour voir si la condensation ose se montrer. Des références sont même créées en fonction des régions du monde où les projecteurs et les feux vont être mis en pratique. Les autres éléments sensibles comme les produits électroniques sont également mis à l’épreuve, eux aussi vivent l’expérience des chocs thermiques, quand, sur une autre machine, la résistance des plastiques est soumise à rude épreuve. Mais le cœur de la qualité se situe encore à un autre degré, celui des bancs photométriques : quelle performance, quelle couleur, quelle luminosité, quelle réflexion, à tant de mètres et en fonction des réglementations. Une batterie de bancs est installée dans une chambre noire. Le clou du spectacle étant assuré par un scanner de dernière génération qui scrute les composants puis les vérifie en comparant aux données d’origine. Une opération capitale pour la vérification des surfaces optiques, par exemple. Les produits devenant de plus en plus complexes, les dimensions varient, les spécifications également, et par conséquent les performances. Avec ce scanner, trois éléments différents peuvent être scannés, puis être envisagés dans leur ensemble. Peu de place est laissée au hasard…
Nouvelles contraintes pour plus d’innovations
Entre les contraintes de poids et d’espace, auxquelles il faut ajouter celles des prix notamment pour les petits modèles des constructeurs à grands volumes, le travail des ingénieurs devient de plus en plus difficile mais aussi encore plus passionnant. D’autant que chaque constructeur a des exigences différentes qu’il faut prendre en compte jusqu’à la fameuse signature, désormais un incontournable. Et au-delà de cela, commente, Miroslav Staron, “pour satisfaire aux spécificités première monte des constructeurs, nous devons ajouter de plus en plus de modules, de composants électroniques, et on augmente les spécifications en termes de vibration, de température… alors que nous disposons de moins de poids et d’espace. Ces spécifications doivent par ailleurs s’inscrire dans la sécurité du véhicule et des normes réglementaires internationales. Ce qui implique, pour nous d’innover en permanence et de proposer des solutions techniques avec l’aide, également, des fabricants de lampes et en partenariat direct avec les bureaux de style des constructeurs”. Que le design des systèmes d’éclairage (de jour, avec les feux de circulation de jour ou, bien sûr, la nuit) ait pris une ampleur considérable ces dernières années au point de faire attendre deux ans de plus la sortie d’un modèle totalement renouvelé s’est imposé dans les esprits. Mais qu’il ait, via la signature, endossé – ou presque - le rôle identitaire d’un véhicule, s’avère plus surprenant. Au point que “notre plus gros challenge, précise Constantin Nedelcu consiste à accompagner les constructeurs dans la création de la signature. Sans se substituer, bien entendu à la définition du design. C’est pour nous l’occasion, comme nous l’avons fait avec l’Evoque, de proposer de nouvelles idées via toutes les ressources techniques dont nous disposons en 3 D ou en prototypage. Nous pouvons même simuler le projecteur allumé et le faire figurer de tous les côtés”. Pour y arriver, les LED ont révolutionné le secteur – on travaille sur les effets 3D - mais aussi toutes les technologies de réflecteurs, qui, combinés avec les LED, et même arborant des couleurs semi-transparentes, démultiplient à volonté les possibilités de nouveaux designs. Et l’on peut ajouter des métallisations sombres sur les surfaces non exposées, le design n’excluant pas les contraintes de prix. Chez Varroc, on se félicite, en outre, de la capacité de proposer des LED y compris pour les véhicules en grande série, avec leur système Opti-LED, autrement dit une technologie abordable pour les marchés de grandes séries. Une première étape avait été franchie avec Opti-LED : “Avec l’Opti-LED, nous sommes capables de travailler au même niveau de prix qu’un projecteur Xenon, avec un peu moins de performance, certes, mais une bien meilleure qualité que l’Halogène. Notre challenge le plus délicat, commente Todd C.Morgan, a consisté à optimiser encore plus les performances par rapport au Xénon et à nous positionner juste au-dessus de l’Halogène, tant en performances qu’en prix. C’est-à-dire permettre d’offrir les capacités de design (entre autres) des LED à moindre coût aux constructeurs de grandes séries, comme les Français, par exemple. C’est ce que préfère le consommateur.” OptiLed affiche ainsi de meilleures performances que l’Halogène en feux de croisement (550-650 lm) et une plus grande luminosité.
A côté des LED, les ingénieurs de Varroc travaillent également avec le Xénon, ou avec le laser, en fonction des exigences des constructeurs. Surtout, ils conçoivent les systèmes d’éclairage adaptatifs, entendez par là tout ce qui procure un confort de conduite optimisé pour le conducteur de la voiture et pour celui qui arrive en face. Les différentes technologies envisagées, en effet, permettent de voir mieux, de façon plus large et plus lointaine, tout en n’éblouissant pas l’autre conducteur, le faisceau contournant le véhicule. En fait, des LED s’éteignent dès que la caméra a détecté la présence de l’automobile (ou des automobiles et de leur place), les autres LED continuant de fonctionner. Avec ces innovations, rien ne bouge dans le projecteur, ce sont les sources lumineuses qui s’éteignent individuellement évitant la voiture d’en face, élargissant le faisceau sur les côtés si nécessaire ou réduisant le faisceau à vive allure. En somme, rien d’impossible ! L’éclairage est devenu un produit hautement technologique et aussi terriblement passionnant par les nouvelles fonctions qu’il offre aux designers et aux concepteurs, sur le plan également du confort de conduite et de la sécurité.