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Industrie

L’industrie va faire un grand écart

Publié le 6 décembre 2010

Par Armindo Dias
4 min de lecture
D’ici à 2020, les constructeurs vont devoir proposer à la fois des véhicules sûrs et efficaces sur le plan environnemental dans les pays développés et des modèles aussi bien bon marché que haut de gamme dans les pays émergents. C’est ce qui ressort d’une étude du cabinet d’audit Deloitte.
Bertrand Delain, associé consulting chez Deloitte.

“Aujourd’hui, nous sommes à un carrefour stratégique majeur comme l’industrie automobile n’en a pas connu depuis des décennies.” Voilà ce dont doivent désormais avoir conscience l’ensemble des constructeurs automobiles selon Deloitte. Le secteur va en effet connaître de profondes mutations d’après sa dernière étude (“Accelarating toward 2020 - An automotive industry transformed”). “Les décisions structurantes à prendre porteront sur les marchés, les produits, les technologies et l’adaptation de l’outil industriel”, poursuit Bertrand Delain, associé consulting chez Deloitte. Et bien évidemment, ces décisions seront presque toutes provoquées par le glissement de la demande vers les pays émergents : ces pays sont encore en phase d’équipement et ils connaissent tous de forts taux de croissance, notamment la Chine et l’Inde. Les grands constructeurs vont donc logiquement devoir adapter leur outil de production s’ils souhaitent être au plus près de leurs nouveaux marchés (la Chine et l’Amérique du Sud sont par exemple appelés à participer à plus de 50 % à la croissance mondiale de production des véhicules légers sur la période 2008-2015). “Pour rester compétitifs, chacun d’eux devra disposer de plates-formes mondiales pouvant traiter de plus larges volumes et reposant sur des centres de conception en réseau”, résume Deloitte. Les constructeurs devront donc plus que jamais maîtriser leurs coûts de production tout en faisant en sorte de répondre à tous les types de demandes appelés à se développer sur les différents marchés, à savoir, dans les pays émergents, une demande de véhicules à bas prix mais aussi de modèles haut de gamme, et dans les pays développés, une demande de modèles très efficients sur les plans sécuritaires et énergétiques (les interventions étatiques sous une forme ou sous une autre continueront à avoir des impacts sur la profession pour l’ensemble des marchés). Il est donc plus que probable que les grands constructeurs poussent leurs fournisseurs à se développer dans les pays émergents tout en cherchant à intensifier leur partenariat avec eux, de nouvelles alliances, notamment avec des entités locales, pouvant toujours voir le jour.

Le facteur déterminant restera le prix

De nouveaux sites de production sont en outre susceptibles d’apparaître au sein même des grandes zones de production actuelles afin de faire la chasse aux coûts, une stratégie qui est déjà en cours sur le Vieux Continent selon le cabinet d’audit avec, par exemple, l’implantation d’une usine Suzuki en Hongrie et l’installation d’une usine d’assemblage Renault au Maroc destinée à la marque Dacia. “Le facteur déterminant restera le prix”, prévient aussi le cabinet d’audit à propos des véhicules plus respectueux de l’environnement et totalement électriques. “Les constructeurs automobiles qui développent des moteurs plus écologiques devront trouver des solutions pour rendre leur prix proche de celui des moteurs thermiques sur la durée d’utilisation des véhicules.” Ils vont donc également devoir batailler ferme pour séduire les talents, une stratégie qui sera d’autant plus difficile à mettre en place que certaines fonctions de l’industrie automobile de demain seront déployées sur plusieurs zones géographiques à la fois (design et ingénierie, notamment) et d’autres pas (les services ventes et après-ventes, pour l’essentiel). Et la tâche sera plutôt ardue dans les pays développés : les étudiants y sont relativement peu nombreux à étudier les sciences ou l’ingénierie (16 % aux Etats-Unis contre 42 % en Chine). Tout n’est pas rose pour autant dans les pays émergents, même si ces derniers sont globalement appelés à combler le manque de talents en ingénierie dans les pays développés. “L’industrie se développe rapidement mais le système éducatif est à la traîne”, relève ainsi un haut responsable de groupe automobile européen à propos du système éducatif chinois. Résultat : certains constructeurs se rapprochent d’universités de pays émergents afin de créer avec elles des programmes centrés sur les nouvelles technologies du monde de l’automobile. “La main-d’œuvre du futur devra non seulement avoir une palette de qualifications plus complexes mais aussi une flexibilité permettant aux entreprises de les employer de la façon la plus productive possible”, estime Deloitte. Un cabinet qui considère au final qu’il n’y aura absolument pas de retour au statu quo dans l’industrie automobile mondiale.

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