Bosch : le long terme comme viatique
S’il est important de se soucier de la solidité du plus grand systémier automobile au monde, il s’avère tout aussi intéressant de valider la bonne santé de l’un des grands employeurs de France (8 210 personnes), dont une quinzaine de sites industriels témoignent de l’activité. Mieux encore, on sera tenté de s’attarder sur la réussite de transfert d’activité au cœur d’un bassin d’emplois. C’est en effet Bosch qui, ayant dû arrêter pour obsolescence une usine dans le freinage, a su implanter un site dédié au photovoltaïque et ainsi préserver le travail de nombreux salariés. Une démarche qui révèle d’ailleurs des éléments de la philosophie du groupe : innover sur des secteurs porteurs, même si cela coûte de l’argent au démarrage, maintenir des savoir-faire en mettant en avant sa responsabilité d’industriel et savoir investir, y compris en Europe, et plus particulièrement en France (pour un chiffre d’affaires de 3 milliards d’euros et 1,3 milliard à l’export). L’un des membres du directoire s’attardant à dire qu’en France, le groupe était monté en productivité et en compétitivité, et qu’en cela, l’Allemagne pouvait apporter quelque chose…
Mais revenons, sans remords, à la publication des chiffres, puisque nous retrouverons, fin mai, une position France plus détaillée par Guy Maugis, président du groupe Bosch France. Et d’abord, la confirmation de ce qui avait été évoqué : le groupe Bosch s’ancre plus que jamais dans une croissance forte et pérenne après avoir su gérer la crise mondiale (et les efforts qui ont dû être réalisés en 2008 et 2009), les hausses brutales des matières premières et les événements du Japon. En 2011, en effet, son chiffre d’affaires a atteint les 51,5 milliards d’euros, soit une hausse de 9 % par rapport à l’année précédente, avec un bénéfice inférieur à celui attendu, soit 2,6 milliards d’euros au lieu des 3,5 initialement prévus. Ce “décevant” 5,1 % de résultats avait d’ailleurs été déjà annoncé lors de la présentation des chiffres provisoires, du fait des hausses des matières premières, des fluctuations des taux de change et surtout du montant des investissements sur les secteurs comme l’électro-mobilité et les nouvelles énergies. “Nous misons sur les différentes technologies automobiles en poursuivant nos efforts sur celles existant actuellement et en investissant sur les autres modes. Nous ne pouvons pas savoir quelles seront les évolutions les plus rapides”, avait ainsi rappelé Franz Fehrenbach, président de Bosch. Il avait ouvert son discours sur ce constat : “L’électro-mobilité arrive. Mais comme nous l’avons déjà signalé, elle mettra plus longtemps à venir que beaucoup le pensaient. L’utilisation de nouvelles formes d’énergies renouvelables, bien sûr, est en marche. Mais dans beaucoup de pays, le chemin pour atteindre ce but est bien moins clair que l’objectif lui-même. Aujourd’hui, pendant cette conférence de presse, la question que nous devons nous poser s’énonce ainsi : comment Bosch va-t-il gérer cette situation ?”
Des perspectives de croissance sereines
Tout en craignant une croissance mondiale ralentie, le groupe Bosch compte sur une augmentation des ventes se situant entre 3 et 5 %, et un bénéfice meilleur qu’en 2011, ce qui exigera “beaucoup de souplesse et d’adaptabilité” pour s’adapter aux aléas politiques et économiques tels que le monde le laisse prévoir. Des aléas qui ne sont pas pour rien dans la diminution de la croissance de 2011 de la production d’automobiles, à + 4 % pour 80 millions d’unités. Néanmoins, Bosch a vu ses ventes en technologies automobiles grossir de 8,2 % (Ebit à 2,3 milliards d’euros, soit 7,7 %) : “La demande en produits de performance énergétique, sécurité active et passive, confort et commodité, s’est particulièrement bien portée, c’est-à-dire l’injection directe Diesel, nos systèmes de réduction de consommation du Diesel, le Stop & Start et les systèmes de navigation. Au niveau mondial, s’accroissent très bien également les produits d’assistance à la conduite, comme le “Park Pilot”, l’ACC ou les systèmes de freinage d’urgence automatiques.” Côté technologies industrielles, les ventes du groupe ont augmenté de 21 %, et ce malgré un sévère désenchantement des revenus du photovoltaïque, lié aux hausses des coûts. Ce qui n’entravera en rien la politique de développement dans ce secteur, puisque Franz Fehrenbach assure “poursuivre ses investissements de manière à descendre encore les coûts”, ce qui ressort de la stratégie à long terme déjà évoquée. A savoir continuer à travailler sur un secteur jusqu’à ce qu’il perce sur le marché : confer l’ABS et, à un degré moindre si l’on peut dire, l’ESP. Autre aspect de la stratégie du groupe : s’assurer une plus grande indépendance vis-à-vis des fluctuations des taux de change et des coûts de matière première “en achetant et en produisant localement”, “sans pour autant transplanter des usines” a-t-il été précisé ! A noter qu’en 2011, les résultats du groupe en Europe ont aussi performé en affichant une augmentation des ventes de 9,6 % (ce qui est donc possible…), à 30,4 milliards d’euros, même si les autres régions du monde se tiennent bien : + 8,9 % en Asie-Pacifique (11,9 Mds), + 11 % en Amérique du sud (2,2 Mds) et + 5,7 % en Amérique du Nord (7 Mds).
Bosch recrute et investit l’avenir !
302 500 collaborateurs : c’est le nombre actuel “d’associés” que le groupe compte, puisqu’au 1er janvier 2012, 19 000 personnes en plus faisaient partie des effectifs, dont – précisons-le, c’est important – 9 800 en Europe (5 200 en Allemagne). Et à la fin de l’année 2012, Bosch devrait atteindre les 315 000 salariés. Parmi les recrutements, 4 500 sont déjà dédiés aux développeurs du secteur Recherche & Développement, qui devrait comprendre 43 000 chercheurs et développeurs à la fin de l’année. Et entrent dans le plan d’investissements en la matière, de 4 milliards d’euros (!), 3 milliards en immobilisations corporelles. Nul doute que, dans cette manne allouée à la R&D, une grande part soit dédiée à l’informatique puisque “un développeur sur quatre travaille déjà dans le développement de logiciels. Bosch mise avec détermination sur ce secteur afin de développer de nouveaux modèles commerciaux découlant des possibilités offertes par le Web 3.0, l’Internet des biens et des services”. L’idée phare étant que “tous les produits de Bosch soient connectables à Internet”, même si, jusqu’à présent, ils bénéficiaient de logiciels intégrés. Un objectif cher à Volkmar Denner, qui prendra la succession de Franz Fehrenbach (qui part à la tête du Conseil de surveillance) au poste de président du directoire, en juillet : “Bosch continuera à l’avenir à renforcer ses compétences clés en associant mécanique de précision et électronique, tout en étendant ses compétences logicielles. Nous ouvrons ainsi de nouvelles perspectives pour l’avenir.”