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Distribution

Opel, Chevrolet, Suzuki Bassussarry

Publié le 1 décembre 2010

Par David Paques
11 min de lecture
Humain et pragmatique, indépendant et politique, Bruno Lafontaine mène ses affaires avec une philosophie qu’il partage sans mal avec ses troupes. Un état d’esprit qui tend vers un unique dessein : une quête d’amélioration permanente pour mieux satisfaire le client.
Outre ce site de Bassussarry, Bruno Lafontaine possède un point à Dax. Une affaire qui a écoulé 228 VN, 151 VO pour un chiffre d’affaires de 6 ME et un résultat net de 23 000 euros après impôt.

Historiquement, Opel affiche un manque de notoriété au Sud de la Loire. Pourtant, à l’extrême sud du pays, à 30 km de la frontière espagnole, Bruno Lafontaine représente la marque au Blitz en faisant fi de ces considérations. A particuliers, l’opérateur affiche 4,34 % de parts de marché sur l’exercice 2009, contre 3,9 % pour la marque au niveau national. Une belle performance. Très belle, même, si l’on considère de surcroît l’impact négatif des concessionnaires frontaliers. Car, à quelques encablures de la concession, les distributeurs espagnols demeurent attractifs. “Depuis 1993 et la dévaluation de la peseta, 15 % des immatriculations VN de notre marché proviennent d’Espagne”, explique Bruno Lafontaine. La prime à la casse a récemment permis d’atténuer cette influence néfaste sur le business. Mais ça ne saurait durer. Alors à Bassussarry, depuis toujours, on travaille pour demeurer incontournable sur l’agglomération. Au cœur de l’axe B-A-B, Biarritz, Anglet, Bayonne, qui compte près de 130 000 habitants, l’investisseur sait depuis longtemps travailler tous les métiers. Plus qu’ailleurs, la seule activité VN ne peut faire vivre une concession. Raison pour laquelle dans la maison Lafontaine, il n’est pas de business additionnel. Tous les métiers sont complémentaires et contributeurs. Le financement, par exemple, pour lequel la concession affiche un taux de pénétration de 45 % sur le VN et de 25 % sur le VO. L’extension de garantie, les contrats d’entretien, les cartes privilèges… autant de périphériques pour lesquels tout le personnel de première ligne est motivé à la vente. La location courte durée apporte également son écot. Opérateur Opel Rent depuis 2007, l’activité est devenue indispensable. Comme le VO, bien entendu. Et si en 2009, l’affaire a vu cette activité plombée par la prime à la casse, mais surtout par d’importants retours de buybacks, impactant un taux de rotation VO structurellement bon, l’activité est tout de même restée profitable. Le site est même en train de régénérer ses marges. Rien de comparable toutefois à ce qu’apporte l’après-vente à l’entreprise. Pièces, mécanique, carrosserie, l’atelier est le véritable poumon de la concession.

Toujours en pôle sur les programmes constructeurs

“Aujourd’hui, le souci majeur des distributeurs est d’améliorer la couverture des charges fixes. C’est essentiel et cela le sera de plus en plus”, répète Bruno Lafontaine, qui sensibilisait déjà le constructeur à ce sujet en 2004, lorsqu’il était président du groupement des concessionnaires Opel. La concession basque affiche aujourd’hui un taux de couverture des frais fixes par l’après-vente de 78 %. Soit 15 points au-dessus de la moyenne nationale du réseau Opel (63 %). Une performance que l’opérateur explique notamment par son attrait pour les différents programmes du constructeur.

Depuis fin 2008, par exemple, la concession est site pilote de la réception personnalisée, qui consiste à recevoir le client dans une aire dédiée pour, pendant 20 minutes, réaliser un précontrôle technique gratuit devant lui, avant l’entrée de son véhicule à l’atelier. “Cela permet de visualiser avec le client les anomalies qu’il ne voit pas habituellement. Le devis est d’autant plus transparent et accepté. Et notre chiffre d’affaires augmente”, commente le distributeur.
De la même manière, SAS Lafontaine est également site pilote pour le programme Oreca, un complément de la réception personnalisée pour la carrosserie. La carrosserie est, elle aussi, l’un des centres névralgiques de la concession. Avec ses 850 m2, ses 10 postes de travail, dont trois pour la peinture, l’atelier dédié est plus vaste que celui de l’activité mécanique. Le service enregistre 25 entrées par semaine. A elle seule, et afin d’aller chercher les voitures chez le client, tout en lui laissant un véhicule de remplacement, l’activité carrosserie dispose de 13 véhicules de courtoisie. “Là encore, nous pouvons faire mieux. Mon souhait serait de faire les deux 8 à la carrosserie. C’est possible”, assure Bruno Lafontaine. Dans sa bouche, ce n’est pas un vain mot. Lui, qui ne laisse rien au hasard et qui suit l’évolution des affaires au quotidien, est on ne peut plus terre-à-terre.

Les captives en partenaires minoritaires, à tout point de vue

Bruno Lafontaine est la plus stricte illustration de l’entrepreneur familial. Le pragmatisme est chez lui une véritable profession de foi. Pas un dogme, ni une frilosité. Plutôt une simple vision du business. Celle qui vise la pérennité des affaires et la liberté d’entreprendre. C’est par exemple la froide logique économique qui explique son parti pris en faveur d’une minimisation de la sous-traitance. Le nettoyage, le débosselage, la réparation de pare-brise… sont traités en interne. “C’est une rentabilité directe pour l’entreprise”, explique-t-il. Sa dernière initiative en la matière est à ce titre saisissante.

Depuis janvier, l’opérateur ne fait plus porter son stock par GMAC et Cetelem (le partenaire de Suzuki). “C’est un choix que j’ai fait l’an dernier. GMAC nous facturait à des coûts prohibitifs”, se justifie-t-il. En finalisant de nouveaux contrats avec ses partenaires bancaires (Fortis BNP, Société Générale, Caisse d’Epargne) pour le financement des stocks, cette charge financière ne représentait plus que 70 000 euros pour le distributeur à fin juin, contre 120 000 euros un an auparavant. “A la fin de l’année, j’aurais fait une économie de 70 000 euros sur ce poste”, prévoit Bruno Lafontaine, finalement habitué à distribuer lui-même le jeu.

En effet, l’opérateur ne fait pas de la captive un recours systématique pour ses clients non plus. GMAC ne représente que 22 % de son chiffre d’affaires financement, juste devant Cetelem-Cofica (15,3 %) et Viaxel (13,6 %), mais loin derrière CGI et ses 49 %. Une singularité qui passerait pour une fronde si le concessionnaire ne savait pas se montrer politique, notamment vis-à-vis des process constructeurs et si la démarche se montrait hasardeuse pour ses bilans. Ce n’est pas le cas. La trésorerie du site se porte bien. Et même mieux qu’il n’y paraît. Car le patron des lieux est précautionneux jusqu’au bout des ongles sur ce sujet. “J’estime que je ne peux pas faire apparaître dans mes bilans des sommes que je n’ai pas encore touchées et dont je n’ai pas la facture. Cela revient à provisionner du conditionnel”, explique-t-il. Au résultat net avant impôt 2009 déclaré de 278 000 euros, l’entrepreneur aurait ainsi pu ajouter 332 320 euros à percevoir, principalement du constructeur. Ce qui lui donne une profitabilité théorique de 3 % de son chiffre d’affaires. Des performances financières remarquées dans le réseau. D’autant que le ratio de ses fonds propres sur le bilan d’exploitation approche les 35 %, alors que la moyenne est de 12 %, chez les distributeurs Opel.
C’est avec ce même pragmatisme qu’il a récemment engagé la concession dans une démarche de certification, avec l’appui du groupement. Le site est aujourd’hui ISO 9001. Pas une fin en soi, évidemment. Mais davantage une manière d’identifier les manques et de réduire les dysfonctionnements potentiels. Bruno Lafontaine le reconnaît lui-même. “Nous avons une meilleure organisation et des process plus aboutis. Notamment en termes de communication entre les services. L’état d’esprit du personnel et la culture de l’entreprise ont évolué et cela se ressent sur la satisfaction de la clientèle”, explique-t-il.

“Une marque de fabrique Lafontaine”

Cette rigueur de gestion et cette quête de perfectionnement permanent ne l’empêchent pas de se montrer souple et transparent. Bien au contraire. Notamment avec ses collaborateurs, à qui il transmet cette philosophie et qu’il n’a de cesse d’impliquer. “Nous avons des outils de reporting quotidiens. Chaque collaborateur peut les consulter librement, depuis un poste informatique en salle de réunion. Ils savent en permanence où nous en sommes dans tous les domaines et savent même ce que la concession gagne comme argent. Cela valorise et responsabilise tout le monde”, détaille Bruno Lafontaine. Et même s’il aime à garder l’opérationnel en main, le chef d’entreprise tient à ce dernier point. “Il y a l’argent, bien sûr. Parce qu’on ne donne pas tout à une entreprise pour qu’elle soit déficitaire. Mais il n’y a pas que le profit qui compte. Il faut savoir être humble et humain”, se livre Bruno Lafontaine, dont la propension à capitaliser sur les forces vives de sa société tout en les faisant évoluer est reconnue des siens. A commencer par les apprentis, qui représentent 10 % des effectifs.

Du turnover ? Il y en a peu. A l’après-vente, certains affichent plus de 20 ans d’ancienneté, voire davantage. “Quand on a un élément de valeur, nous faisons ce qu’il faut pour le garder chez nous. Il faut savoir s’entourer de compétences”, estime l’entrepreneur. Chez Bruno Lafontaine, ce n’est pas un vain mot. L’opérateur cherche toujours à cultiver cette compétence, tout en valorisant le collaborateur. Là où Opel demande, par exemple, un CMDA (technicien supérieur), la concession en compte trois, parmi ses six productifs, et un de plus parmi ses conseillers clientèle.

“Il y a une marque de fabrique Lafontaine. C’est que chacun peut faire partager ses idées. Cela a été vrai pour la construction du bâtiment, quand tout le monde a été consulté de manière à optimiser le fonctionnement des lieux, mais pas seulement. La direction s’appuie vraiment sur ses collaborateurs”, estime Loïc Claude, ancien chef de l’après-vente. Ou presque. Depuis juillet 2009, Isabelle Larre occupe en effet les fonctions précédemment occupées par Loïc Claude pendant 40 ans. Trop peu enclin à l’oisiveté, ce dernier souhaitait revenir humer l’air du garage deux jours par semaine “Nous n’avons pas hésité une minute. Il fait bénéficier à tout le monde de son expérience et cela améliore la courroie de transmission”, reconnaît Bruno Lafontaine. Ultime preuve que la mécanique basque est décidément bien huilée. 

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FOCUS - Opel Chevrolet, Suzuki Bassussarry en 2009

• CA : 20,12 M€(- 5 %)
• Profitabilité du CA : 1,38 % (+ 160 %)
• Volume VN : 1 026 (+ 9,6 %)
• Part de marché VN : 4,34 %
• Marge nette moyenne par VN (hors prime) : 997 €
• Moyenne des primes reçues par VN : 194,30 €
• Volume VO : 639
• Rotation stock VO : 127 jours
• Marge nette moyenne par VO : 194,30 €
• IS Vente : 79,8 %
• IS Après-vente : 76,9 %
• Effectifs : 51

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ZOOM - Le mot du constructeur

Bruno est un amoureux de son pays. Il est Basque, avec tous les traits de caractère que cela comprend. Il est extrêmement franc. Mais sa franchise est réellement constructive. Il dit les choses. Qu’il s’agisse de bonnes ou de mauvaises. Côté commerce, il fait preuve de beaucoup de professionnalisme. Il a une bonne vision du business et une fine connaissance de son marché. Il est très impliqué et gère son affaire au quotidien. Il anime par exemple lui-même le rapport des ventes chaque matin. Ce n’est pas pour autant un despote. Il sait déléguer et a su fédérer une bonne équipe autour de lui. Un effectif stable et dévoué. Il a donc de très bons résultats à beaucoup de niveaux. Notamment sur les trois piliers essentiels que sont le VN, le VU et l’après-vente. Il est par ailleurs très impliqué sur nos programmes. Il en saisit toujours l’impact pour lui et ses clients. Ce qui génère de la rentabilité. Il est dans le réseau un élément moteur.

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ZOOM - Une famille basque de l’automobile

Du haut de ses 57 ans, Bruno Lafontaine incarne la 4e génération de l’histoire que vit sa famille avec l’automobile. Car l’entreprise familiale est née en 1917, à Bayonne, où le commerce a d’abord été celui du vélo, puis rapidement celui de l’auto. Distributeurs DAF véhicules de tourisme, Salmson, Rosengart, Ariès, NSU, Santana… les Lafontaine ont aussi implanté Toyota dans le Pays Basque, avant de prendre le panneau Opel en 1982, Suzuki en 1986, puis Daewoo en 2003, sur la demande de General Motors.
Entré dans l’affaire en 1979, après deux ans d’études de pharmacie qui n’ont semble-t-il pas fait naître de vocation, Bruno Lafontaine a souhaité perpétuer l’histoire familiale. Lui qui servait de l’essence dès l’âge de 5 ans. Les grandes familles basques de l’automobile ont en effet de plus en plus de mal à exister face aux grands groupes qui ont gagné la zone. PGA, Sipa… sont là. Les Forgues et autres Gambade ont passé la main. Avec les Durruty, les Lafontaine sont les derniers à exercer. A résister même. A demi-mots, Bruno Lafontaine reconnaît avoir été approché. Mais ce n’est pas à l’ordre du jour. Difficile de tirer un trait sur une telle histoire. D’autant que la 5e génération a déjà mis la main dans l’engrenage. Depuis 14 ans, Mathieu, neveu de Bruno, a en effet rejoint l’équipe. André, père de Bruno, ne l’a pas tout à fait quittée.

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