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Distribution

"Nous devons nécessairement évoluer"

Publié le 1 juillet 2011

Par David Paques
10 min de lecture
Guy Bouvier, directeur général du groupe Vulcain - Partenaire indéfectible des constructeurs qu’il représente, le groupe Vulcain est entré dans une phase d’évolution qui va révolutionner son fonctionnement, mais également sa place dans la distribution hexagonale.

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. On connaît votre réputation et vos affaires, mais un peu moins la manière dont s’est créé le groupe Vulcain. Pouvez-vous nous en faire un rapide historique ?
Guy Bouvier.
Jean-Pierre Rinaudo et moi nous connaissons depuis vingt ans. Nous travaillions ensemble au sein du groupe Sofco. Jean-Pierre a quitté le groupe avec trois concessions et fondé Talas, sa propre holding. Je l’ai suivi. Nous avons ensuite créé, en 2003, le groupe Vulcain, de manière à ce que j’entre au capital. Vulcain est en réalité une sous-holding de Talas, qui détient l’immobilier. Au départ, la stratégie était de se concentrer sur Lyon (69) et sur une zone s’étendant jusqu’à une heure maximum de la ville par la route. Nous voulions rester opérationnels.

JA. Et finalement, vous êtes à Paris…
GB.
En 2004, nous avons racheté l’affaire Opel de Lyon au groupe Summit Motors. Cela s’est très bien passé. Tellement bien qu’au Japon, où était basé l’actionnaire du groupe Summit, ils se sont tournés vers nous quand ils ont souhaité vendre leurs autres marques par appartement. Ils nous ont proposé la reprise des affaires de Paris (75) et de Clermont-Ferrand (63). Nous nous sommes posé beaucoup de questions. Nous étions vraiment face à un choix difficile puisque cela allait à l’encontre de notre politique. Mais les affaires proposées paraissaient vraiment intéressantes. Nous avons donc repris le site Opel du 17e arrondissement de Paris, le 1er janvier 2007, puis le site Volkswagen du 13e arrondissement deux ans plus tard. Depuis, nous nous sommes développés avec Kia à Villejuif (94) et Paris (17e) en octobre 2009, avec Honda (13e) fin 2009 puis, plus récemment, avec Mitsubishi (1er juin 2011) dans le 17e arrondissement. Nous sommes d’ailleurs le seul représentant de la marque à Paris. Désormais, notre stratégie est donc de n’être implantés que dans des grandes villes. Les deux plus grandes de France, en l’occurrence.

JA. Officier à Paris et à Lyon, c’est un peu l’inverse de ce que font les autres aujourd’hui. Pourquoi ce parti pris ?
GB.
C’est effectivement un choix risqué, mais c’est aussi un positionnement clair par rapport aux marques que nous représentons. A Paris, le business est différent. Il y a une notion d’image bien plus importante. Et les conditions immobilières font qu’il est difficile d’exploiter rentablement une concession sans le soutien des constructeurs. Nous avons besoin des marques et elles ont besoin de nous. Kia, puis Honda nous ont récemment fait confiance dans des structures où nous sommes sous-locataires et exploitants. Après, quand nous ne pouvons pas avoir l’aide du constructeur, l’objectif est de prendre le contrôle du foncier. Ce n’est pas toujours facile.

JA. Comment fonctionne votre binôme avec Jean-Pierre Rinaudo ?
GB.
Je m’occupe des affaires parisiennes et Jean-Pierre des sites lyonnais. Quant à Clermont-Ferrand, que nous ne voulions pas garder initialement pour des raisons précisément opérationnelles, mais que nous avons gardé eu égard à la qualité du personnel et des résultats qu’il dégage, Jean-Pierre s’y rend une fois par semaine. Nous avons une réunion du comité de direction chaque lundi, en compagnie de Stéphane Abate, directeur général de Félix Faure Automobiles (Volvo à Lyon et Seyssinet (38), Volvo, Jaguar, Land Rover et Suzuki à Saint-Etienne (42), puis Suzuki à Lyon) et Claude Winckler, directeur général d’Atlantic Automobiles (Opel, Chevrolet, Saab, Corvette et Camaro à Vénissieux (69), puis Opel et Chevrolet à Lyon, Vienne et Bourgoin-Jallieu (38)).

JA. Avez-vous la capacité d’encore vous développer ?
GB.
La distribution évolue rapidement. Et chacun sait que les grands groupes de distribution pèsent de plus en plus lourd. Avec un volume annuel de 6 500 à 7 500 VN, nous ne sommes pas un gros, mais nous ne sommes pas non plus petits. Nous devons donc nécessairement évoluer. Nous estimons que pour peser face à un constructeur, le chiffre fatidique est de 10 000 VN. Notre volonté est de continuer à nous développer à Paris intra-muros et première couronne, puis dans la Région Rhône-Alpes de manière à atteindre notre ambition à moyen terme. Car nous souhaitons atteindre 15 000 VN dans les cinq ans qui viennent.

JA. Comment allez-vous y parvenir ?
GB.
La priorité est de nous développer avec les marques que nous représentons déjà. Mais nous sommes totalement ouverts aux opportunités. Notamment avec les marques généralistes. Il nous manque, en effet, une notion de volume. Mais, de manière générale, la stratégie a plusieurs pans. Nous misons sur une croissance interne de nos affaires, et sur le développement avec nos marques, mais nous n’excluons pas des acquisitions.

JA. Justement, vous êtes un des rares de notre top 100 à ne pas avoir de panneau “français”. Pourquoi ?
GB.
Cela n’a rien de volontaire. Nous n’avons jamais vraiment eu d’opportunité. Mais là encore, nous ne sommes pas fermés du tout. Bien au contraire.

JA. Doubler ses volumes en cinq ans peut-il fragiliser le groupe ?
GB.
Notre objectif n’est pas non plus une obsession. Nous ne souhaitons pas faire du volume pour faire du volume. Cela n’a pas de sens. Nous sommes peu endettés et rentables. Nous souhaitons le rester. Aussi, nous sommes tout à fait raisonnables et sereins par rapport à cet objectif. Nous ne l’atteindrons pas à n’importe quelle condition.

JA. Lorsque l’on regarde votre portefeuille de marques, on se dit qu’il y a une place sans doute plus importante à donner au Premium. Est-ce que cela vous intéresse ?
GB.
Pourquoi pas ? Nous sommes toujours partenaires des réseaux Jaguar et Land Rover, mais nous pouvons également aller plus loin dans ce sens. Il n’y a rien de figé. D’autant que cela a souvent un intérêt en matière de rentabilité. Mais aujourd’hui, ce n’est pas une priorité.

JA. Qu’estimez-vous être une rentabilité satisfaisante dans la distribution automobile ?
GB.
On dit souvent que, pour faire une petite fortune dans l’automobile, il faut commencer avec une grosse fortune. C’est un secteur dans lequel nous gérons des chiffres d’affaires considérables. Et il faut donc faire attention aux ratios. Personnellement, j’estime que dégager une rentabilité entre 1,5 et 2 % de son chiffre d’affaires est assez raisonnable.

JA. Avec les objectifs que vous annoncez, le groupe Vulcain s’apprête-t-il à être moins discret que par le passé ?
GB.
Complètement. Nous sommes traditionnellement très discrets. Depuis dix ans, nous n’avons même jamais communiqué sur le nom du groupe. Vulcain n’apparaissait nulle part sur nos communications. Depuis la fin de l’année dernière, nous avons décidé de changer de cap, de manière à soutenir la croissance du groupe. Nous avons ainsi recruté une directrice du marketing et un webmaster pour le groupe. D’ici quelques mois, notre communication se fera quasi exclusivement sur Internet. Nous serons très présents sur la toile avec de nouveaux sites pour nos concessions, peut-être même un site groupe, mais nous aurons aussi un blog et nous agirons sur les réseaux sociaux. D’où la nécessité de communiquer sur notre nom. Pour Jean-Pierre Rinaudo et moi, qui étions étrangers à ce monde-là, c’est une révolution complète.

JA. Cela vous ouvre-t-il des perspectives de business supplémentaire ? Notamment sur le commerce VO, avec une possible mutualisation des stocks ?
GB.
Internet touche le VN, comme le VO. Mais pour l’occasion, le Web est incontournable. Notamment dans les grandes villes. Aujourd’hui, notre activité VO est gérée depuis Lyon. Et le souci que nous avons, c’est que la donne est totalement différente à Paris qu’en province. A Paris, notre taux de reprise oscille entre 10 et 15 %. Cela s’explique par le fait que beaucoup de loueurs nationaux sourcent en région parisienne, mais pour nous, c’est dérisoire. A Clermont-Ferrand, le taux de reprise peut parfois dépasser les 50 % ! Alors mettre en commun les stocks VO du groupe sur Internet peut être une parade. C’est d’ailleurs un projet que nous avons. Mais nous y allons étape par étape. Et actuellement, pour le véhicule d’occasion, notre principal problème n’est pas là.

JA. Quel est-il ?
GB.
Comme beaucoup de professionnels, nous manquons cruellement de véhicules à recommercialiser. Récemment, nous avons fait une expérience d’achat chez un loueur à l’étranger. Cela ne nous a pas convaincus. Particulièrement par l’état des voitures que nous avons récupérées. Nous ne le ferons plus car nous tenons à préserver une certaine qualité d’image à ce niveau. Nous privilégions d’autres pistes d’approvisionnement. Nous avons notamment la volonté d’accentuer notre présence chez les loueurs courte durée de manière à récupérer nos propres buybacks. Nous venons de commencer à mettre cela en place avec Europcar.

JA. Est-ce que la nouvelle stratégie du groupe va également vous permettre d’aller plus loin en matière de gestion de la relation client ou sur les offres de services ?
GB.
Aujourd’hui, nous n’avons pas la taille pour mettre en place certains outils. Nous avons essayé, marque par marque, de vendre des cartes de fidélité. Cela n’a pas fonctionné car nous n’étions pas professionnels. Le développement d’Internet va changer tout cela. Mais pour ce qui est de la CRM, nous suivons à 100 % les initiatives de nos constructeurs. C’est notre credo.

JA. La notion de partenariat est-elle centrale dans le fonctionnement du groupe Vulcain par rapport à ses concédants ?
GB.
Oui. Notre volonté a toujours été de jouer à fond la carte des constructeurs. Nous nous inscrivons donc totalement dans la politique des marques que nous représentons. Sans exception. C’est-à-dire, par exemple, que nous n’avons aucun achat extérieur sur les pièces de rechange, les huiles, les accessoires… Nous tenons à cette forte notion de partenariat.

JA. Jusqu’où peut aller cette notion de partenariat ?
GB.
Nous venons d’en avoir un exemple concret. Au début du mois de juin, GM France est entré au capital d’Atlantic Automobiles, notre société qui commercialise Opel, Chevrolet, Corvette et Camaro sur Lyon et sa région. Ils sont entrés à hauteur de 5 %. C’est tout à fait symbolique de notre état d’esprit. Pour General Motors, c’est l’occasion de déployer sa politique d’interdépendance capitalistique avec ses opérateurs français, comme cela se fait déjà en Angleterre, en Allemagne ou en Belgique.

JA. Le groupe est résolument en mouvement…
GB.
Ce n’est pas terminé. Physiquement, nous sommes aussi en phase d’évolution. A Vénissieux, dans la zone automobile, nous venons d’acquérir un terrain très convoité de 12 000 m2, juste en face de notre concession Opel, Chevrolet, Saab d’Atlantic Automobiles. Nous allons y construire une structure pour Volvo, dont nous déménagerons l’actuelle exploitation lyonnaise, et sommes en pourparlers pour implanter également Suzuki. Par ailleurs, nous sommes également en discussion avec deux distributeurs lyonnais pour leur louer une partie du terrain. Le début des travaux commencera courant 2012. A Clermont-Ferrand, nous avons fait l’acquisition de nouveaux locaux dans la zone automobile d’Aubière pour y construire une nouvelle structure Opel-Chevrolet. Nous profiterons alors des futurs anciens locaux pour reprendre la distribution de Honda et y commercialiser leurs produits de manière provisoire. Tout se met en place.

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FOCUS

Répartition des points de vente du groupe par marque

Opel = 6
Suzuki = 2
Chevrolet = 5
Saab = 1
Volvo = 4
Honda = 1
Kia = 3
Volkswagen = 1
Corvette = 2
Skoda = 1
Camaro = 2
Jaguar = 1
Mitsubishi = 2
Land Rover = 1

Total : 32 points de vente sur 14 sites
 

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