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Constructeurs

Stéphane Radut, Renault : "Vouloir fabriquer un VN avec un VO n'est pas pertinent"

Publié le 14 juin 2023

Par Gredy Raffin
5 min de lecture
Le directeur de l'usine Renault de Flins (78) revient sur les premiers mois d'activité de la Factory VO et les enseignements tirés. Stéphane Radut évoque également les développements structurels : le nouveau contrat avec Nissan, ou encore les réflexions en cours sur d'autres modèles économiques.
usine de reconditionnement de voitures d'occasion de Renault Flins (78)
Stéphane Radut, directeur de l'usine Renault de Flins (78), fait le point sur l'activité de reconditionnement des VO. (©Renault)

Journal de l'Automobile : L'usine de reconditionnement de Renault tourne depuis un an et demi environ, pouvez-vous nous partager des statistiques d'activité ?

Stéphane Radut : Tout d'abord, il faut retenir qu'en 2022, la Factory VO a reconditionné autour de 16 000 voitures d’occasion. Ce qui portait le total à 22 000 voitures d'occasion depuis le démarrage du projet. Un volume qui en a fait le premier site de traitement en Europe. Nous sommes toujours dans cette phase de montée en régime. Actuellement, notre rythme oscille entre 80 et 100 unités par jour.

 

J.A. : Quelle est la typologie des voitures ?

S.R. : Il y a 95 % de Renault et 5 % de modèles d'autres marques. Pour la petite histoire, il y a quelques semaines, nos équipes ont reconditionné leur première Porsche. D'ailleurs, cela m'amène à préciser que nous faisons appel à des prestataires extérieurs qui sont des concessionnaires partenaires pour certaines marques, puisque les interventions mécaniques impliquent du matériel et des compétences spécifiques.

 

J.A. : Avec le temps, qui sont vos clients ?

S.R. : Ils proviennent majoritairement du Bassin parisien. Il s'agit bien évidemment de Renault Retail Group (RRG), mais aussi de distributeurs privés parmi les grands groupes de la région. Depuis le mois de mars, nous travaillons aussi pour Nissan qui a validé la période d'essai. Il nous est arrivé d'œuvrer ponctuellement pour un assureur sur un contrat de voitures à débosseler, après l'épisode de grêle à Châteauroux en 2022.

 

Nous réfléchissons à l'ouverture de l'usine aux particuliers

 

J.A. : Quels enseignements tirez-vous ?

S.R. : Nous avons une mentalité d'industriel. Nous respectons scrupuleusement plusieurs étapes bien définies. Mais nous avons compris que reconditionner un VO ce n'est pas fabriquer un VN. Tout comme il n'est pas pertinent de vouloir fabriquer un VN avec un VO. Nos clients ne sont pas preneurs de telles prestations, car cela doit pouvoir se défendre auprès de l'acheteur final. Notre savoir-faire nous invite cependant à nous interroger sur des évolutions du schéma imaginé initialement.

 

J.A. : Parmi lesquelles ?

S.R. : Nous réfléchissons à l'ouverture de l'usine aux particuliers. Cela implique une évolution du modèle économique. Nous pourrions, par exemple, imaginer que notre prestation devienne un service vendu par les distributeurs qui veulent capter une partie de la valeur du marché CtoC en proposant une remise en état.

 

J.A. : Il y a quelques temps, Renault a fait l'annonce de l'ouverture prochaine d'un autre bâtiment… Qu'en est-il ?

S.R. : Oui, la Bodywork Factory, en effet, ouvrira en septembre. Elle va couvrir une nouvelle plage du métier. Cette structure se concentrera sur les voitures récentes mais accidentées. Le bâtiment va s'étendre sur 12 000 m2 et jouxtera celui de 11 000 m2 de la Factory VO. Certains postes, comme le lavage et le diagnostic, pourront alors être mutualisés.

 

J.A. : Et qu'en est-il des ressources humaines ?

S.R. : Certains métiers, tels que les marbriers, sont en formation pour 42 semaines. Ils obtiendront un diplôme à l’issue de ce programme. Pour être transparent, une partie des équipes a rejoint le réseau pour mettre en pratique leurs nouvelles connaissances jusqu'au mois de juillet. À terme 250 à 300 salariés travailleront à la Bodywork Factory.

 

Nous ouvrons un magasin de pièces de rechange sur site

 

J.A. : Quelles seront exactement les prestations ?

S.R. : Nous allons signer un accord avec un gros cabinet d'expertise indépendant. Il fera la passerelle avec les assureurs et ses experts réaliseront les rapports. Ensuite, nous pourrons diagnostiquer et démonter les éléments pour les remplacer. Il y aura même un poste de rénovation de jantes. Autrement, les véhicules hors d'usage (VHU) pourront être démontés et réemployés sur les chaînes de reconditionnement de la Factory VO.

 

J.A. : Revenons à la Factory VO, dans quelle mesure parvenez-vous à tenir les engagements pris auprès des clients ?

S.R. : Là, vous touchez à une vraie difficulté. Il est difficile de respecter à 100 % les devis en termes de délais ou de coûts de remise en état. Sur le papier, il était prévu quatre jours de transport au total et six jours d'intervention, dont 24h à attendre les pièces de rechange. En réalité, nous ne sommes pas à dix jours, mais à quatorze jours de travaux, hors phase de transport. Notre but consiste donc à court terme de fiabiliser le circuit, ensuite nous raccourcirons les délais.

 

J.A. : Qu'est-il prévu pour améliorer le service ?

S.R. : Nous ouvrons un magasin de pièces de rechange sur site. Nous dépendrons alors moins du stock livré quotidiennement. Il y aura 600 références au début et davantage par la suite. Ce stock tampon servira aux deux activités, celle de la Factory VO et celle de la future Bodywork Factory.

 

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J.A. : La performance tient également aux compétences des équipes…

S.R. : Chez nous, la polyvalence est reine ! Un salarié doit savoir couvrir trois postes. Au départ, nous avons eu du mal à attirer les volontaires vers ces nouvelles activités. Mais les premiers venus ont fait passer le mot et les autres ont vu leur intérêt à nous rejoindre. En ce moment, nous réduisons la voilure. Nous avons d'abord fonctionné avec trois équipes pour faire face à un pic d’activité et nous sommes ensuite revenus à deux équipes. La polyvalence est le levier idéal pour ajuster les rotations.

 

J.A. : Reconditionner des véhicules, est-ce une activité rentable désormais ?

S.R. : Nous sommes rentables et le fait que des groupes privés nous confient des voitures d'occasion montre que nous sommes fiables. Le délai va se raccourcir et la qualité ira en augmentant. La Factory VO a prouvé son intérêt. Les concessionnaires qui ont pu réallouer les espaces dégagés à des activités commerciales ne diront pas le contraire.

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