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Constructeurs

PGO attaqué par Porsche

Publié le 5 mars 2004

Par Christophe Jaussaud
6 min de lecture
Suite à une action menée par Porsche AG, la société PGO a été condamnée, le 18 février, pour acte de contrefaçon et concurrence déloyale entraînant l'interdiction pour la société cévenole de construire des répliques de Porsche 356. PGO interjette appel. PGO, l'invraisemblable...

...pari. En titrant ainsi le reportage illustrant l'activité du petit constructeur français, dans le JA n° 862 du 6 février dernier, nous qualifions "d'invraisemblable" le travail fourni par l'équipe d'Olivier Baudouin, président du directoire de PGO depuis 1998, pour réussir dans cette entreprise. Mais depuis le mercredi 18 février le mot invraisemblable peut prendre un tout autre sens. En effet, ce jour-là, le tribunal de grande instance de Paris, saisi par Porsche AG, a interdit à PGO la construction de répliques de Porsche 356 et 356 Speedster et a condamné la société pour acte de contrefaçon et concurrence déloyale. Cette interdiction, avec exécution provisoire, est assortie d'une astreinte de 5 000 € par infraction constatée passé un délai de trois mois après la signification du jugement. De plus, le tribunal a condamné PGO à verser une provision de 100 000 € (50 000 € au titre de la condamnation pour contrefaçon et 50 000 € au titre de la condamnation pour concurrence déloyale) et la 3e chambre du tribunal parisien a également nommé un expert qui devra évaluer le préjudice total subi par la marque de Stuttgart. PGO ne peut donc plus fabriquer, offrir à la vente et promouvoir des voitures reproduisant les caractéristiques des automobiles Porsche. Le jugement ordonne également PGO de supprimer de son site Internet toute information destinée à assurer la promotion de sa voiture reproduisant la 356. PGO va s'exécuter car bien que l'entreprise interjette appel, ce dernier ne peut être suspensif.





Chiffres

  • 100 unités, environ, de la 356 classic ont été produites depuis 1998

  • 37 c'est la production du modèle en 2003

  • 25 c'était l'objectif pour 2004 !
  • Porsche France a alerté le siège

    Mais qu'est-ce qui a donc décidé Porsche à agir, d'autant que fabriquer des copies de Porsche 356 est devenu un sport quasi planétaire ? En effet, la 356 est répliquée dans nombre de pays par notamment les sociétés Chesil en Angleterre, L&B en Belgique, Chamonix au Brésil, Vintage en Californie, etc. Selon la firme de Stuttgart, cette procédure contre PGO est la seule en cours aujourd'hui. Par le passé, en 1995, Porsche avait engagé des poursuites, et gagné, contre des répliqueurs de la Porsche Spyder 550 en Allemagne et en Amérique du Sud. Les motivations juridiques sont donc claires pour Porsche, PGO a reproduit sans autorisation la Porsche 356 Speedster qui est à l'origine du mythe même de Porsche, posant les bases stylistiques et techniques du développement de la marque. En reproduisant les principales caractéristiques de ce modèle, PGO s'est donc rendu coupable d'acte de contrefaçon, violant ainsi les articles 111-1, 112-2 et 113-5 du Code de la propriété intellectuelle. Ce droit de propriété artistique, le droit d'auteur en fait, est protégé, selon les textes français, pendant 70 ans après la mort du créateur ou après la sortie de la première voiture si ce droit appartient à une personne morale. C'est le cas ici, Porsche étant la personne morale propriétaire des droits artistiques de la voiture créée par Ferry Porsche en 1948. Mais si la demande de Porsche rentre dans ce cadre légal français, on peut légitimement se demander pourquoi agir aujourd'hui ? PGO existe depuis les années 80 et Olivier Baudouin pensait que les droits industriels de la 356 étaient tombés dans le domaine public. Selon Immo Dehnert, responsable presse économique et relations fournisseurs de Porsche AG, "en avril 2002, notre filiale française a attiré notre attention sur l'activité de PGO, notamment au travers de son site Internet et par leur présence au Mondial de Paris 2002. Nous avons considéré que leur offre produit était agressive et, qui plus est, qu'elle était présentée comme une alternative à Porsche. De plus, ils avaient l'intention de fortement développer la production et la commercialisation".

    Une centaine de répliques produites en 6 ans

    Depuis 1998, PGO a produit une centaine de répliques de 356 Speedster, sous l'appellation 356 Classic. Ainsi, 37 exemplaires de ce modèle sont sortis de l'usine de Saint-Christol-lez-Alès en 2003 et, pour 2004, l'estimation plafonnait à 25 unités. Le fort développement relatif concerne en fait le Speedster II avec 500 unités prévues en 2004. Y a-t-il un risque pour ce produit ? Non, selon Olivier Baudouin qui explique que "ce véhicule a totalement été développé par les équipes de PGO et qu'il n'est pas touché par la procédure actuelle". En ce qui concerne la condamnation pour concurrence déloyale et détournement de clientèle, PGO met en avant que le 356 Speedster n'est plus produit et que la 356 Classic n'est en rien en concurrence avec les produits actuels du constructeur allemand.
    Pour Olivier Baudouin, "le but n'est vraiment pas de faire du tort à Porsche, il faut plutôt voir cela comme un hommage. De plus, nous n'avons jamais envisagé cette production dans un esprit de contrefaçon, nous ne nous sommes jamais cachés d'autant que le moule de la 356 faisait partie des actifs lors du rachat de la société". Un hommage qui n'est donc pas du goût du constructeur allemand : "C'est et cela restera un plagiat, affirme Immot Dehnert, plus on verra ce genre de répliques dans la rue, plus cela nuira à l'image de Porsche et à la valeur des originaux."
    Ce dossier soulève bien des questions. D'une part, pourquoi attaquer PGO seul, alors qu'au moins une dizaine d'entreprises font le même commerce ? D'autre part, pourquoi attaquer maintenant un business qui dure depuis près de vingt ans ? Surtout qu'il ne s'agit que d'une vingtaine d'exemplaires par an. Le préjudice est-il si grand ? 


    Christophe Jaussaud





    ZOOM

    Des précédents avec la Porsche Spyder 550


    Le Spyder 550 est en fait la version course de la 356. Il doit son nom à son poids, 550 kg, et c'est avec celui-ci que James Dean a trouvé la mort en 1954. Produite à une soixantaine d'exemplaires, cette automobile est aujourd'hui très rare, en témoigne les 500 000 _ atteints récemment lors d'une vente aux enchères. Comme la 356, la 550 est également répliquée. Dans les années 90, Porsche a fait condamner deux sociétés en Allemagne et en Amérique du Sud. Pourtant, au Brésil, une société propose toujours des répliques du 356 Speedster et du Spyder 550 d'une manière beaucoup plus agressive que PGO. On peut lire sur leur site : "Notre réplique du Spyder 550 est considérée comme la meilleure du monde." Ou encore : "Maintenant vous pouvez conduire une voiture de sport allemande au look authentique pour une fraction du prix de l'originale." Vendues au prix de 24 650 _ hors taxes, ces répliques de Spyder 550 sont, en plus du continent américain, disponibles en Europe via des distributeurs en Hollande, en Italie et au Portugal.

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