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Constructeurs

Nouveau coup dur pour le diesel en Allemagne

Publié le 10 octobre 2018

Par Christophe Jaussaud
4 min de lecture
Après les symboliques 2 km interdits aux diesel non Euro 6 à Hambourg, la ville de Berlin se voit contrainte par la justice à une interdiction de la sorte sur une quinzaine de kilomètres. Au-delà du cas allemand et de la légitime nécessité à réduire la pollution dans les villes, faut-il encore que le remède ne soit finalement pas pire que le mal.
Après Hambourg, la ville de Berlin va mettre en place des interdictions, sur une quinzaine de kilomètres, pour les diesel non Euro 6.

 

Après les deux rues interdites aux diesel non Euro 6 à Hambourg, soit environ 2 180 mètres, voilà que la justice berlinoise a ordonné à la ville d'interdire les diesel non Euro 6 de circuler sur environ 15 km de rues de la capitale fédérale. Une décision qui devrait être appliquée à partir du 1er avril 2019.

 

Une fois encore, cela va faire beaucoup de bruit pour pas grand-chose tant il y aura des dérogations, notamment pour les résidents, les livreurs et autres taxis. Une fois de plus, cette décision est plus symbolique qu'efficace d'un point de vue environnemental. Mais un symbole qui fait mal à l'industrie automobile du pays et au gouvernement d'Angela Merkel, qui s'échine à empêcher ces interdictions depuis un an afin de préserver ce secteur stratégique qui emploie 800 000 personnes.

 

Au total, onze tronçons des artères majeures du centre élargi de Berlin, dont la célèbre Friedrichstrasse, sont concernés, selon une décision du tribunal administratif de Berlin, qui oblige ainsi la ville à se conformer au droit fédéral sur la pollution d'air qui fixe un seuil maximal de 40 mg/m3 annuel de NOx. Berlin affiche actuellement 49 mg/m3. La décision pourrait concerner jusqu'à 200 000 automobiles, selon des estimations de la presse allemande.

 

"C'est une bien belle journée pour l'air que nous respirons", a réagi Jürgen Resch, président de l'ONG écologiste DUH à l'origine de cette procédure, cité par l'agence dpa. Mais, signe du degré de sensibilité du sujet dans la capitale allemande, pourtant dirigée par une coalition de gauche, gauche radicale et d'écologistes, cette interdiction n'aurait dû être qu'un "dernier recours", selon la ministre en charge de l'Environnement du Sénat de Berlin, Regine Günther.

 

Le gouvernement local a fait valoir qu'il préférerait avoir recours à d'autres solutions comme la promotion du vélo et des transports en commun, la mobilité électrique et une gestion plus efficace du trafic avec plus de routes limitées à 30 km/h. D'autant que les interdictions de ce type, appelées en Allemagne "Fahrverbote", sont difficiles à faire respecter en l'absence de vignettes. A Hambourg, la première ville à avoir mis en place une telle mesure, les contrôles sont occasionnels, et l'amende est de 20 euros pour les contrevenants. Néanmoins, Stuttgart et Francfort doivent emboîter le pas à Hambourg et Berlin.

 

Pour tenter d'éviter une généralisation de ces interdictions, le gouvernement allemand a annoncé il y a quelques jours un plan de sortie de crise. Ce compromis a minima propose des adaptations techniques aux frais du constructeur ou des primes à l'achat pour rajeunir les modèles. Mais ce plan a été perçu comme une opération désespérée de sauvetage du diesel. "Le diesel et l'essence n'ont plus leur place dans les centres-villes modernes", a commenté dans un communiqué l'ONG Greenpeace, qualifiant la décision berlinoise de "gifle pour le gouvernement" de Merkel.

 

Toujours est-il que ces multiples décisions en Allemagne, mais aussi en France, en Italie ou en Espagne ont l'effet escompté puisque les ventes de diesel sont en fortes baisses. Ainsi, en France, sur le mois de septembre 2018, certes un peu aidée pour les problèmes liés aux homologations avec le nouveau cycle WLTP, la part du diesel dans les ventes s'est limitée à 36 %. Un chiffre spectaculairement bas pour un pays où le gazole animait encore 67 % des véhicules en 2013.

 

Le diesel a donc du plomb dans l'aile. Mais les premières conséquences de cette "chasse" sans discernement se font déjà sentir puisqu'en 2017 le niveau moyen de CO2 est déjà en augmentation (118,5 g/km, +0,4 g/km). Une première depuis dix ans. La montée en puissance des SUV, plus gourmands, explique cela, comme la progression des ventes de moteurs essence qui rejettent plus de CO2. Ainsi, selon l'Agence européenne de l’environnement (EEA), les modèles à moteurs essence vendus en 2017 affichaient une moyenne de 121,6 g/km contre 117,9 g/km pour les modèles diesel.

 

Certes, les VE et autres hybrides rechargeables se profilent pour faire baisser ce niveau. Mais combien de temps faudra-t-il pour avoir un réel effet sur le parc roulant de plus en plus vieillissant ? Quant au 100 % électrique, s'il est indéniable que ses bienfaits immédiats peuvent séduire, à plus long terme des questions se posent encore. Et que dire de la dépendance stratégique de l'Europe vis-à-vis de la Chine sur la question des batteries. Mais ça, c'est un autre débat dont l'UE devrait rapidement s'emparer.

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