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Constructeurs

Nissan : "Un concessionnaire de notre marque qui fait son travail ne peut être déficitaire"

Publié le 8 juin 2016

Par Gredy Raffin
7 min de lecture
La tendance est amorcée chez Nissan West Europe. Bernard Loire, le président de la filiale, décrypte les mouvements qui s'opèrent, notamment l'introduction dans le programme Fleetbox.

JOURNAL DE L'AUTOMOBILE. Au mois de mai, le marché a artificiellement progressé de 23%, quelle est votre analyse de cet état de fait ?

BERNARD LOIRE. Le marché est dans une phase positive. En regardant de plus près, il apparaît être tiré davantage par les ventes à loueurs qu'à particuliers. Il faut donc le nuancer. Certes, l'investissement des entreprises est un bon signe, mais l'abus de ventes aux loueurs et les immatriculations de démonstration révèlent par ailleurs une surchauffe. La vente à particuliers n'est, en réalité, pas à la hauteur de ce qu'on peut espérer.

JA. En isolant Nissan, qui croît de 2,2%, sous quel signe placez-vous ce dernier mois écoulé ?

BL. Effectivement, nous sommes en progression. Si je prends l'ensemble de l'année, nous avons totalisé 35600 unités, considérant les VP et VU, soit 0,2% de croissance. Nous affichons une stabilité après avoir progressé fortement de manière linéaire pendant sept ans. Nous nous satisfaisons donc de rester à des niveaux de ventes proches de nos records.

JA. L'âge de la Micra et la concurrence sur le segment SUV sont-ils les principales raisons de ce tassement ?

BL. Il y a deux éléments à regarder : nous sommes stables sur le segment des crossovers. Le Juke recule légèrement, mais Nissan conserve le leadership, avec une base de clients forte. Nous sommes toujours en phase de conquête, même si l'offre se diversifie. L'autre secteur sur lequel nous travaillons est bien entendu l'électrique, soit un segment plein d'opportunités, avec un environnement moins concurrentiel. On pourrait ajouter un troisième élément, la version VU du Navarra. Au cours des trois mois écoulés, le rythme de livraison oscille entre 350 et 400 unités par mois et le carnet de commandes enregistre de très bons volumes, au point d'impacter les délais de livraisons.

JA. Quel est le mix de ventes après cinq mois ?

BL. Nous avons choisi de ne pas aller sur des segments trop coûteux. La part des ventes à particuliers doit toujours rester majoritaire. Mais il est vrai que nos ventes à loueurs progressent, notamment parce que notre gamme est appréciée pour sa technologie et sa bonne valeur résiduelle.

JA. Vous notiez récemment une progression des moteurs essence dans les immatriculations. De quoi se compose le mix de vente au cumul 2016 ?

BL. Tout dépend des segments. En dix-huit mois, Juke est passé d'une répartition de 75/25 à l'avantage du Diesel à un équilibre presque parfait. Nous pensons que, dans un avenir très proche, nous allons vendre plus de Juke essence que Diesel. La reconsidération de la motorisation, chez les particuliers, est très claire. Si je prends Qashqai, nous sommes à 80/20 pour le Diesel, mais nous étions à 90/10 avec la précédente version. Tendance qui se vérifie sur le XTrail, où le Diesel est passé de 100% à 94%, voire 92%, en quelques mois.

JA. Quel est l'impact sur le prix ?

BL. Chez Nissan, les clients VN achètent avant tout les hauts de gamme, N-Connecta et Tekna, à plus de 80%. Le prix moyen facturé s'élevait à 26438€ en 2015, et nous ne constatons pas de variation en corrélation avec le changement de mix motorisation.

JA. Quel est l'état de santé du réseau ?

BL. Ils sont dans une situation saine. La base est solide, avec ce mix produit riche et un taux de pénétration de 40% des solutions de financement de notre captive. Le montant moyen financé est de 15700€. Des avantages dont nous tirons profit après trois ans avec des valeurs résiduelles plus hautes et un taux de fidélisation intéressant.

JA. Au bout du compte, quel est le niveau de rentabilité ?

BL. Les chiffres font état d'une profitabilité de 1,22%. Ce qui place Nissan dans le haut du panier des généralistes. Très peu sont déficitaires, il s'agit de cas isolés. Or, à ce jour, un concessionnaire de notre marque qui fait son travail ne peut être déficitaire. D'ailleurs, certains dépassent les 2% de rentabilité du chiffre d'affaires.

JA. Avez-vous des projets pour le réseau ?

BL. Nous sommes en ligne avec nos objectifs de couverture territoriale. Là encore, il n'y a que des cas isolés. Nos réflexions vont à la protection de nos partenaires, il n'est donc pas question de multiplier les points de vente ou de réclamer des cathédrales. Au-delà du quantitatif, nous nous concentrons sur la qualité. En douze mois, 25% des concessions ont adopté la norme Nissan Retail Environment, soit un très bon rythme. L'intégralité aura migré à fin 2017.

JA. Quel est le montant investi ?

BL. Tout dépend des dossiers. Les rafraîchissements se chiffrent à environ 150000€. Les profondes refontes du lieu de vente nécessitent forcément des sommes bien supérieures, mais elles auraient été réalisées quoi qu'il en soit. Nous voulons accueillir les clients dans un environnement qui reflète l'univers de la marque. Nissan a besoin de distinguer et de créer une relation unique.

JA. A chacun sa méthode de calcul, mais quel est l'ISC de Nissan en France ?

BL. A la vente de VN, nous récoltons 8/10. A l'après-vente, la note est de 6 à 6,5. Nous avons identifié une problématique : le délai de prise de rendez-vous à l'atelier. Avec les concessionnaires, depuis le début du mois d'avril, nous menons donc une campagne de recrutement de 300 personnes qui, en grande majorité, renforceront nos équipes après-vente, en plus des forces de vente société.

JA. Quel est le volume du parc roulant ?

BL. Depuis 2010, nous avons augmenté de 40%. On l'évalue aujourd'hui à 320000 unités. Raison pour laquelle nous prenons des mesures pour absorber les demandes de passages à l'après-vente.

JA. Quels sont les autres programmes à venir ?

BL. Nous allons être la première marque importée à rejoindre le programme Fleetbox. Nous allons ainsi améliorer notre méthode de gestion des clients professionnels. Nous souhaitons apporter des réponses rapides, changer l'expérience et faire gagner du temps aux concessionnaires qui n'auront plus à contacter les loueurs ou les entreprises au moment du règlement de la facture.

JA. Quel est l'état du marché VO de Nissan ?

BL. Depuis que nous avons comblé notre retard avec des programmes VO bien ficelés, nous conservons le dynamisme. Nous avons la chance de profiter d'une fluidité grâce à l'appétence pour nos produits. Désormais, il nous appartient de lancer le label VO électrique. Nous allons concentrer notre énergie sur ce sujet.

JA. Comment la technologie doit-elle améliorer l'expérience client, notamment à bord des véhicules ?

BL. Comme chacun le sait, nous allons doter le Qashqai de fonctionnalités le rendant partiellement autonome dès l'an prochain et avons pour ambition de rendre la voiture autonome accessible à chacun d'ici 2020. A côté de cela, il y a l'essentielle connectivité. Mais jusqu'où pouvons-nous aller ? Comment protéger la donnée ? Autant de thèmes sur lesquels nous restons prudents.

JA. Une récente étude de TNS Sofres-Bearing Point déplore un manque d'explication et de valorisation des technologies en concession, allez-vous mettre des process en place ?

BL. Sujet très intéressant. Aujourd'hui une mise en main prend jusqu'à deux heures au commercial. En face, il y a un client qui, dans l'excitation, n'est pas toujours attentif. Il y a donc un décalage avec la norme. Les concessionnaires sont prêts à faire des présentations de longue durée, mais pas toujours le client. Réfléchissons donc à une solution de deuxième mise en main ou de formation après quelques milliers de kilomètres.

JA. A quelques mois des élections présidentielles et des débats qui les accompagnent, quelles sont vos revendications ?

BL. Après tout ce qui a été déployé, ce dont nous nous félicitons, que peut-on faire de plus pour aider la mobilité propre ? Je pense qu'il faut se concentrer sur le marché du véhicule électrique d'occasion. En le fluidifiant, les dernières barrières psychologiques tomberont. Les gouvernements ont le bon état d'esprit. Il ne faut pas relâcher la pression. 

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