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Constructeurs

L’Opel HydroGen3 à l’épreuve de la route

Publié le 11 juin 2004

Par Alexandre Guillet
7 min de lecture
Le 24 mai dernier, lors de son escale parisienne, l'Opel Zafira alimenté par hydrogène, l'HydroGen3 (prototype de troisième génération), avait parcouru sans encombres 5 000 km. Mais si les ingénieurs de GM maîtrisent le fonctionnement de cette motorisation, bien des difficultés seront à résoudre...
Le 24 mai dernier, lors de son escale parisienne, l'Opel Zafira alimenté par hydrogène, l'HydroGen3 (prototype de troisième génération), avait parcouru sans encombres 5 000 km. Mais si les ingénieurs de GM maîtrisent le fonctionnement de cette motorisation, bien des difficultés seront à résoudre...

...avant d'envisager son industrialisation.


Le "Fuel Cell Marathon" organisé par GM - 10 000 km entre le Cap Nord et Lisbonne - avait pour but de valider les recherches entreprises depuis plusieurs années par le constructeur américain dans la mise au point de la pile à combustible. A bien des égards, la démonstration fut convaincante. L'Opel Zafira HydroGen3 que nous avons pu voir à Paris à mi-parcours conserve les qualités "ordinaires", pourrait-on dire, d'un véhicule, en particulier son habitabilité (même nombre de passagers et un volume de coffre équivalent au véhicule de série). C'est banal, mais essentiel.




En chiffre

10 000 km

à travers l'Europe Parti de Hammerfest en Norvège (Cap Nord) le 3 mai dernier, l'Opel Zafira HydroGen3 aura traversé 14 pays. Successivement, il aura fait escale à Oslo, Gothenburg, Copenhagen, Hamburg, Amsterdam, Bruxelles, Londres, Paris, Russelsheim, Zurich, Salzburg, Turin, Madrid, Lisbonne.

Ce sont les solutions techniques trouvées par les ingénieurs au cours des sept dernières années qui ont permis de réduire l'encombrement lié à l'utilisation de l'hydrogène en tant que carburant. "La réduction du nombre et du volume des organes de propulsion pour être contenus sous le capot est une prouesse. La suppression de la batterie d'appoint était également un challenge supplémentaire", explique Lars Peter Thiesen, manager public affaires Europe Fuel Cell Activities. Au final, le véhicule n'accuse que 200 kg supplémentaires. Sur les quelques kilomètres que nous avons faits à bord, l'Opel HydroGen3 se conduit comme un véhicule électrique avec une accélération très progressive. Mais la conduite sportive en ville n'étant pas un modèle d'avenir, ce ne devrait pas être un handicap ! Par ailleurs, l'H3 n'est pas une bombe et remplit les standards européens - ainsi que ceux, plus sévères, internes au groupe GM - en matière de crash test. C'était d'ailleurs une condition indispensable pour que le véhicule puisse rouler sur route ouverte dans le cadre de ce marathon. "L'hydrogène est très léger et s'échappe très vite. En cas de fuite, même dans un tunnel, il est improbable d'avoir une concentration explosive", explique Hans Weidner, Staff Engineer Deployment Strategy and Hydrogen Infrastructure Fuel Cell Activities.

L'avenir automobile passe par l'hydrogène

"Le moteur a explosion n'est pas une situation durable" : cette conviction, exprimée par John Bereisa, director strategy commercialization GM Fuel Cell Activities, a conduit le constructeur américain à investir plus d'un milliard de dollars sur ce projet pour lequel




FOCUS

Caractéristiques

  • Carburant : hydrogène liquide
  • Puissance : 60 kW, 82 ch
  • 0 à 100 km/h : 16 s
  • Vitesse maximale : 160 km/h
  • Autonomie : 400 km
  • travaillent 600 personnes (réparties sur cinq sites aux Etats-Unis, en Allemagne et au Japon). Deux faits illustrent cette conclusion. "Les réserves de pétroles actuelles correspondent exactement à ce qui a déjà été consommé." Or, depuis le réveil des pays émergents et notamment de la Chine, la demande croît de manière exponentielle. "A ce jour, 88 % de la population mondiale n'a pas de véhicules, rappelle John Bereisa. On ne peut pas leur dire : "Vous n'en aurez pas"." Dans ce contexte, l'hydrogène apparaît comme une énergie "idéale" : indépendante du lieu de production, elle s'obtient par diverses techniques. Plusieurs études dites "du puits à la route" démontrent également que la pile à hydrogène garantit le meilleur bilan énergétique. Elle est de plus totalement propre puisque l'eau en est le seul sous-produit. Concrètement, la combinaison de l'hydrogène et de l'oxygène (d'où l'eau en sortie) à l'intérieur de la pile produit une réaction électrochimique qui génère de l'électricité. La prouesse réside dans la réalisation de cette pile à combustible où deux cents cellules (0,8 volt chacune) fonctionnent ensemble pour fournir la puissance. L'hydrogène étant - entre autres - un sous-produit de l'industrie chimique, les ingénieurs de GM ont calculé que l'utilisation de 50 % de l'hydrogène actuellement produit permettrait d'alimenter 4,5 millions de véhicules en Europe (sur un parc total de 200 millions).

    Maîtriser l'industrialisation

    Pour les ingénieurs, la faisabilité de cette technique étant démontrée, il faut désormais maîtriser la production en série et que "cela soit profitable". Un obstacle de taille. Pour le résoudre, GM doit désormais élargir la base de ses fournisseurs (50 % des fournisseurs dont 33 hors de l'industrie automobile), travailler à l'élaboration de normes et de standards, et trouver des solutions pour le stockage de l'hydrogène. "Un problème qui nous fait travailler la nuit", a souligné Lars Peter Thiesen. A température ambiante, pas d'hydrogène liquide. Pour cela il faut descendre à - 253°C. Or, impossible de tenir longtemps une telle température et, au bout de quelques heures, l'hydrogène "bout" et s'échappe. Dans le cadre d'une utilisation habituelle, impossible donc de généraliser une motorisation dont le carburant s'évapore. "Nous étudions la possibilité de stocker l'hydrogène à l'intérieur de la structure de certains métaux et de le libérer en augmentant la température. Nous espérons trouver la meilleure solution, mais ce n'est pas encore fait", explique Lars Peter Thiesen. Outre la fiabilité et la longévité de cette motorisation, les ingénieurs doivent en travailler le coût de production. L'objectif est de descendre en dessous de 50 $ par kW de puissance, chiffre atteint aujourd'hui par le moteur 4 temps. Pour l'heure, le constructeur américain annonce un coût 10 fois supérieur pour une production de 100 000 unités, soit 30 000 euros par moteur (500 $ x 60 kW). En attendant, GM approfondit l'expérience avec des entreprises ou des administrations. Ainsi, dans trois villes (Washington, Tokyo et Berlin), plusieurs Zafira H3 circulent. Il y en a notamment six en circulation à Washington DC en collaboration avec le pétrolier Shell et un à Tokyo avec le transporteur FedEx. L'impulsion politique pourrait s'avérer décisive pour une véritable concrétisation. Ainsi, les ingénieurs de GM demandent "une aide à l'investissement pour les infrastructures, des aides financières pour les "early adopters" et une taxation - voire même une exonération - du carburant". Côté clients, GM a dressé la liste des structures dont les flottes pourraient accueillir des véhicules de ce type.

    2010 en ligne de mire

    La pile à combustible deviendra-t-elle réalité ? Pour l'heure, le constructeur américain semble assez seul à promouvoir ce type de technique. Or, sans généralisation à l'ensemble de l'industrie, point de salut. La date de 2010 pour une industrialisation est-elle réaliste ? Elle figure en tout cas dans les objectifs du constructeur. Une chose est sûre, le pétrole est un bien rare, limité, et il est indispensable que les constructeurs, et notamment le premier groupe mondial, mettent en œuvre les moyens considérables dont ils disposent pour le préserver. Même aux Etats-Unis, le gaspillage n'est plus de mise.


    Florence Lagarde


     





    FOCUS

    Quel prix au litre ?

    Outre la maîtrise du coût de production, le prix à la pompe de l'hydrogène et l'équipement en infrastructure de distribution sont deux données clés pour l'avenir de cette motorisation. Pour GM, l'équipement de 10 % des 135 000 stations-service de l'Europe des 25 (soit 13 500) coûterait 10 à 12 milliards d'euros. A titre de comparaison, le pipeline construit entre l'Alaska et les Etats-Unis a coûté 7 milliards de dollars. A partir de quel prix de vente l'hydrogène peut-il rivaliser avec le Diesel ? Avec une consommation de 6,5 l aux 100 km, le coût en carburant d'un Zafira Diesel est de 6 euros aux 100 km. Rapporté au Zafira HydroGen3 qui consomme 1,2 kg aux 100 km, cela met le prix de l'hydrogène à 5 euros le kg. Or, selon les calculs de GM, avec une fréquentation de 500 voitures consommant de l'hydrogène, une station-service pourrait le vendre 4 euros le kg. Un ordre de grandeur qui apparaît réaliste et pourrait donc en justifier l'équipement.

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