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Constructeurs

Les constructeurs chinois à la conquête de l'Europe avec des VE

Publié le 10 juin 2020

Par Christophe Jaussaud
4 min de lecture
Longtemps inatteignable, le marché européen en pleine mutation technologique devient une terre promise pour les véhicules électriques. Les constructeurs chinois l'ont compris et comptent bien s'y faire une place.
La montée en puissance des véhicules électriques en Europe est un atout pour les constructeurs chinois qui maîtrisent cette technologie.

 

Depuis le salon de Francfort 2005 et l'arrivée promise de Landwind, il n'y a pas un grand salon sans une annonce visant l'Europe. Plus récemment, il y a eu notamment Qoros, pilier du salon de Genève pendant plusieurs années, mais sans véritable suite. Aucune marque chinoise n'a pour l'heure réellement attaqué le marché ouest européen. Car à l'Est c'est fait, et notamment en Russie, où une marque comme Haval fait une jolie percée.

 

Mais les choses pourraient vite changer avec l'émergence des véhicules électriques. Trois exemples le montrent : Aiways, MG et BYD. La start-up chinoise Aiways sera en juillet la première à livrer des voitures en Europe. Quelque 500 unités de son SUV U5 seront acheminées vers la Corse et proposées aux touristes cet été dans le réseau Hertz de l'île. Avec l'U5, présentée l'an dernier au salon de Genève, Aiways entend concurrencer les véhicules de grandes marques établies, suivant l'exemple de l'américain Tesla, mais avec des tarifs réduits. "Nous fabriquons un véhicule comme l'Audi e-tron mais pour la moitié du prix", a affirmé auprès de l'AFP Alexander Klose, vice-président chargé de l'international. Son usine de Shangrao (nord-est de la Chine) lui assure une base de production à bas coûts, pour une capacité initiale de 150 000 unités qui pourra être doublée.

 

Aiways, BYD, MG ouvrent le bal

 

Aiways, qui vise quelques milliers de livraisons annuelles en Europe, a ouvert les commandes en Allemagne et Norvège au printemps. Suivront à l'automne le Danemark, la France, les Pays-Bas et la Suisse. Son véhicule familial, doté de 5 places et d'une autonomie de plus de 400 km, est proposé entre 35 000 et 40 000 euros. "Sans doute y a-t-il une méfiance envers les produits chinois", reconnaît Alexander Klose, "mais regardez les téléphones mobiles utilisés aujourd'hui en Europe, la grande majorité est fabriquée en Chine". La start-up entend vendre ses produits sur internet, en s'appuyant sur des distributeurs locaux pour faire essayer les véhicules.

 

Début mai, un autre groupe chinois, BYD (Build Your Dreams), a annoncé qu'il commercialiserait cette année un SUV électrique en Norvège, avec l'ambition de s'étendre à d'autres pays européens. Peu connu sur le vieux continent, BYD est pourtant l'un des leaders mondiaux du véhicule électrique grâce à son immense marché intérieur. Il était à l'origine un simple spécialiste des batteries, domaine où il a acquis un savoir-faire crucial. Sur le marché des bus électriques, le groupe a déjà remporté de gros appels d'offre en Europe et construit deux usines, en Hongrie et en France (à Beauvais, dans l'Oise). Il y a aussi MG qui vient d'ouvrir sa première concession en France dans le 11e arrondissement de Paris et débute la commercialisation du SUV MG ZS EV.

 

Un tsunami chinois à venir

 

Adossés au premier marché automobile mondial, les constructeurs chinois étaient jusqu'ici quasiment absents d'Europe, même si des conglomérats de l'Empire du milieu contrôlent des marques européennes, notamment Geely avec Volvo. Les constructeurs établis redoutent ces nouveaux acteurs, après avoir pendant des années transféré leur savoir-faire en construisant des usines en Chine. Le président de Renault, Jean-Dominique Senard, a plusieurs fois mis en garde contre un "tsunami chinois" imminent. Sur le marché des pneumatiques, la part des marques chinoises en Europe est passée de 5 % à 30 % en six ans seulement, entre 2012 et 2018. "Dans l'automobile, attendons-nous maintenant à quelque chose qui pourrait être équivalent", avertit l'ancien patron de Michelin.

 

L'arrivée en Europe des premières voitures chinoises intervient au moment où entrent en vigueur des normes environnementales draconiennes, notamment un plafond de 95 grammes de CO2 par km qui contraint les constructeurs à électrifier leur gamme à marche forcée. Objectif : réduire la pollution de l'air et le réchauffement climatique. La Chine s'est dotée très tôt d'une puissante filière de batteries, un composant qui représente un tiers de la valeur des voitures électriques. Avec la fin annoncée du moteur thermique tombe la principale barrière qui protégeait les constructeurs historiques, au moment où ils sont affaiblis par l'effondrement du marché lié à la pandémie de Covid-19.

 

"Dans la mobilité électrique, il y a une réouverture du marché. Finalement, les marques historiques se retrouvent à devoir faire la preuve de leur pertinence", estime Guillaume Crunelle, responsable automobile au sein du cabinet Deloitte. Selon lui, "une industrie chinoise qui aujourd'hui sait fabriquer des voitures, qui a une légitimité et une chaîne de valeur intégrée sur la batterie doit être regardée avec très grand sérieux". (avec AFP)

 


 

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