L'arrêt des véhicules thermiques en 2040 coûterait 500 milliards d'euros sur 20 ans
En juillet 2017, Nicolas Hulot, alors ministre de la Transition écologique annonçait la fin de la commercialisation des véhicules thermiques pour 2040. Lors des discussions de la loi d'orientation des mobilités, en cours de discussion à l'Assemblée nationale, un amendement a été déposé pour que cet objectif soit également inscrit.
Un rapport parlementaire, effectué en commun par l'Assemblée et le Sénat a également été demandé afin d'étudier les scénarios technologiques permettant d'atteindre l'objectif d'un arrêt de cette commercialisation. Présenté ce mardi 28 mai 2019, ce rapport a mis en lumière trois hypothèses se basant sur les connaissances actuelles de remplacement des énergies fossiles.
"Dans le monde, les ventes de véhicules électriques sont passées de 47 000 unités en 2011 à 2 millions en 2018. La hausse atteint 34 % en Europe entre 2017 et 2018 et 25 % en France", explique Stéphane Piednoir, sénateur et co-auteur du rapport. "80 milliards d'euros ont été investis en Europe en 2018, et 265 milliards d'euros dans le monde dont la moitié en Chine. Les constructeurs français ont de leur côté investi 9 à 10 milliards d'euros."
La question reste donc : quelle technologie choisir pour répondre à un coût minimal, selon Huguette Tiegna, député et co-auteur de ce rapport.
Trois scénarios ont été envisagés, basés tous les trois sur la technologie électrique : 100 % à batterie, hybride (rechargeable ou non) et hydrogène.
Scénario médian : dans ce scénario médian, à court terme les hybrides non rechargeables vont émerger du fait du faible surcoût à l’achat et du gain en consommation immédiat. A partir de 2025/2030 les BEV et PHEV (selon la taille du véhicule) intègrent de façon importante le parc français. Leur part passe ainsi de 12% en 2025 à 78% en 2040. Au final, en 2040 les véhicules électriques à batterie représenteraient 59 % du parc en 2040, contre 19 % pour les PHEV et 22 % pour les hybrides non rechargeables. Le parc ne comporterait donc plus aucun véhicule 100% thermique à ce même horizon.
Scénario probatteries : Le scénario probatterie prend en compte une amélioration plus rapide des batteries, autant d’un point de vue technique (poids, encombrement) qu’économique. On passe ainsi d’un prix de 120 €/kWh du pack batterie en 2040 (scénario médian) à un prix de 50 €/kWh. Mais au final le scénario pro-batterie donne des résultats sensiblement identiques au scénario médian à l’horizon 2040. La seule différence réside en une accélération des ventes de véhicules électrifiés plus rapide (dès 2025 au lieu de 2030). Les gains supplémentaires sur les émissions de CO2 restent toutefois marginaux. Ce résultat tend à montrer que, avec des mesures d’accompagnement identiques, l’essentiel des gains pourrait être atteint avec les progrès techniques introduits dans le scénario « médian » confortant la vision d’une électrification rapide du parc, qui commencerait par les véhicules hybrides.
Scénario pro-hydrogène : l’étude montre que le déploiement des véhicules électriques à hydrogène à l’horizon 2040 dépend au premier ordre du prix de l’hydrogène à la station de remplissage et du prix d’achat. En effet, dans le scénario médian, qui utilise un prix de l’hydrogène à la station de 5 €/kg en fin de période et des véhicules de taille moyenne coûtant 32 800 € en 2040, la vente des véhicules à hydrogène ne décollerait toujours pas en 2040. En revanche dans le scénario pro-H2, avec un prix à la station de 3 €/kg en 2040 (aligné sur les prospectives du plan hydrogène de fin 2018), et un véhicule de taille moyenne à 27 200 €, les ventes de véhicules à hydrogène décolleraient dès 2030. Il convient toutefois de noter que ces faibles prix de l’hydrogène à la station sont conditionnés à une production massive et bas coût de l’hydrogène, en premier lieu pour des usages industriels et de gestion de réseau, telle que définie dans le plan national. Dans ce scénario, les véhicules électriques à hydrogène représenteraient 37% du parc en 2040, contre 14% pour les véhicules électriques à batterie et 31% pour les PHEV.
Quelle que soit la technologie retenue, le rapport conclut à une convergence des coûts totaux de possession d'un véhicule particulier à horizon 2040 dans une fourchette de 1 à 1,4 environ. Dans les trois scénarios les émissions de CO baissent fortement mais les rapporteurs reconnaissent que pour obtenir une neutralité carbone en 2040, il faudra substituer des biocarburants aux carburants fossiles.
Pour autant, le rapport répond bien aux problématiques de possibilités technologiques mais les réponses quant à l'impact économique et financier ne sont pas abordées. Les auteurs préconisent un maintien du bonus écologique jusqu'en 2040, tout comme une aide pour l'achat d'un véhicule à hydrogène de l'ordre de 10 000 euros mais aucune piste n'est envisagée, mise à part la hausse de la taxe carbone, à l'origine de la création du mouvement des Gilets jaunes, pour compenser une perte abyssale pour les caisses de l'Etat : la disparition de la TICPE. Évaluée à 37,7 milliards d'euros en 2019, cette taxe revient à 45 % au budget de l'Etat, 32,6 % aux collectivités territoriales et environ 20 % dans un compte d'affectation spéciale transition énergétique.
Cette question est pourtant cruciale car sur 20 ans, le coût total de la décarbonation du parc automobile est estimé à 500 milliards d'euros.
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