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Constructeurs

La démocratisation de la voiture électrique en marche

Publié le 15 février 2008

Par Pierre Millet
5 min de lecture
Le président de l'Alliance Renault Nissan a signé, le 21 janvier dernier, à Jérusalem un protocole d'accord portant sur la commercialisation de voitures électriques sur le territoire Israélien. Ce projet marque un tournant dans l'histoire de l'automobile...
Le président de l'Alliance Renault Nissan a signé, le 21 janvier dernier, à Jérusalem un protocole d'accord portant sur la commercialisation de voitures électriques sur le territoire Israélien. Ce projet marque un tournant dans l'histoire de l'automobile...

...puisque pour la première fois les conditions nécessaires à la commercialisation de véhicules "tout électrique" à grande échelle sont réunies.

"Dans l'automobile, nous avons besoin de volumes pour diminuer le coût de fabrication des véhicules produits. La difficulté avec les véhicules électriques est de trouver des marchés qui permettent de réaliser des économies d'échelle", explique Jean-Christophe Kugler, directeur du projet véhicule électrique de Renault. Les initiatives entreprises dans certains pays pour vulgariser l'utilisation de voitures propres ont d'ailleurs rapidement atteint leurs limites face aux contraintes économiques. L'accord signé entre Carlos Ghosn, Project Better Place et l'état Israélien, vient ainsi de créer les conditions d'un système économique favorisant les véhicules électriques.

Davos 2007, point de départ du projet

Shai Agassi, ancien numéro deux de l'éditeur de logiciel SAP, est à l'origine du projet. A l'occasion du Forum de Davos en 2007, il réussit à convaincre le gouvernement Israélien de l'intérêt de changer les habitudes de consommation et de développer les transports propres. Ehud Olmert, Premier ministre de l'état Hébreu, est intéressé mais souhaite que Shai Agassi trouve l'appui d'un grand constructeur automobile. L'alliance Renault Nissan est le seul groupe à répondre positivement à la sollicitation de l'entrepreneur. Shai Agassi fonde la société Project Better Place en octobre 2007 et lève 200 millions de dollars pour réaliser son projet.

Une entente tripartite

L'état Israélien joue un rôle central dans l'avancée et la concrétisation du projet. Grâce à des avantages fiscaux importants, l'état hébreu crée le marché. En Israël, tous les véhicules commercialisés sont importés et taxés à hauteur de 72 %. Dans le cadre de véhicules propres n'émettant aucun CO2, l'état s'est engagé à ce que cette taxe ne dépasse pas 10 %. "La voiture coûtera au maximum le même prix, sinon moins, qu'une voiture essence équivalente", assure Carlos Ghosn. Par ailleurs, Renault a réalisé des études qui ont mis en évidence un fort intérêt des Israéliens pour ce type de véhicules. Ainsi, Jean-Christophe Kugler affirme que "les habitudes de déplacement des israéliens devraient favoriser le développement des voitures électriques, puisque 90 % d'entre eux parcourent moins de 70 km par jour". Project Better Place construira le réseau électrique permettant la recharge des véhicules. A terme, Shai Agassi prévoit d'implanter 500 000 bornes sur tout le territoire et pallier ainsi le manque d'autonomie des véhicules.
Enfin, Renault apportera son savoir-faire industriel pour la production des voitures. "Renault a une grande expérience dans la production de voitures électriques et une maîtrise de la technologie", affirme Jean-Christophe Kugler. Dans le cadre de ce partenariat Renault produira une voiture tricorps encore inédite de gamme moyenne. "Cette nouvelle voiture fait partie des 26 modèles du plan Renault et sera produite en version thermique classique et en version électrique", ajoute Jean-François Kugler. Cette version électrique sera alimentée par des batteries lithium-ion fabriquées par une filiale commune de Nissan et Nec. La voiture ainsi équipée offrira des performances similaires à celles d'un moteur thermique 1,6 litre pour une autonomie de 160 km. Commercialisée en 2011, la production sera réalisée dans un premier temps en Europe et l'investissement "très raisonnable", selon Carlos Ghosn, devrait être compris entre 50 et 100 millions d'euros.

Shai Agassi, maître d'œuvre

Outre la construction du réseau de distribution d'électricité, Shai Agassi est responsable de la commercialisation des véhicules électriques. "Notre client est Shai Agassi", affirme Jean-François Kugler. Plusieurs chiffres ont été annoncés par la presse quant aux objectifs de ventes. Carlos Ghosn a évoqué un chiffre compris entre 10 000 et 20 000 ventes par an alors que Shai Agassi prévoit de vendre rapidement 100 000 véhicules. "Nous avons réalisé plusieurs hypothèses afin de bâtir notre rentabilité, explique Jean-François Kugler, nous sommes partis sur une hypothèse basse. Avec 10 000 à 20 000 ventes par an, nous trouvons notre rentabilité", poursuit-il avant de conclure, "néanmoins, nous serions enchantés si Shai Agassi nous achetait 100 000 unités et nous lui fournirons sans aucun problème".
Le mode de distribution des véhicules électriques est encore à l'étude. Des discussions entre Shai Agassi, Renault et Moses Carasso & Sons, l'importateur de la marque au losange, sont en cours. "Soit Shai Agassi développera son propre réseau, soit il s'appuiera sur le réseau de notre importateur", précise Jean-François Kugler.

Un modèle économique novateur

Le coût des batteries et ses répercussions sur le prix des voitures électriques constituent un des freins à l'achat. L'idée de Shai Agassi est alors de dissocier la propriété de la voiture et celle de la batterie. "Il s'agit de considérer que la batterie et l'électricité constituent le carburant du véhicule", précise Jean-François Kugler. Ainsi la batterie reste la propriété de Project Better Place qui fournit l'électricité. La start-up teste actuellement différents modes de paiement auprès des consommateurs. Shai Agassi souhaite s'inspirer du secteur de la téléphonie mobile en proposant des abonnements ou des paiements à la consommation. Néanmoins, le coût d'utilisation, actuellement 5 000 dollars pour des voitures thermiques en Israël, devrait rester très inférieur pour les motorisations électriques.

Le cas Israélien ne restera pas isolé

Renault ambitionne de développer la voiture électrique à plus grande échelle. A Jérusalem, Carlos Ghosn avait d'ailleurs annoncé "Israël ne sera pas le seul pays où nous lancerons des véhicules électriques". Jean-François Kugler ajoute : "Nous sommes ouverts à toutes propositions".

Photo : Shai Agassi, Président de Better Project Place, Ehud Olmert, Premier ministre israélien et Carlos Ghosn, Président de Renault Nissan.

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