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Constructeurs

Grande Panda, la sauveuse de Fiat ?

Publié le 27 mars 2025

Par Christophe Bourgeois
7 min de lecture
Après des années de dépendance à la 500, la marque italienne espère reconquérir le marché européen grâce à cette nouvelle Grande Panda. Un défi de taille dans un environnement concurrentiel intense, où Fiat devra retrouver sa place au sein du groupe Stellantis.
Fiat Grande Panda
La Fiat Grande Panda est le premier des cinq modèles annoncés par la marque d'ici 2027. ©Fiat

L'avenir de Fiat passera par la Grande Panda. Ou ne passera pas. As­similée depuis bientôt 20 ans à un seul modèle, la 500, la marque italienne n’est pas en grande forme. "La 500 a été pen­dant des années l’arbre qui cachait la forêt", résume Jamel Taganza, fon­dateur du cabinet Inovev.

 

Car bien que Fiat soit la première marque du groupe Stellantis avec une part de marché de 21 % du portefeuille du constructeur franco‑italo‑amé­ricain, elle n’est plus l’ombre que d’elle‑même.

 

En 2024, ses ventes mondiales de voitures particulières ont reculé de 8 % pour atteindre 1 142 264 unités* (source Inovev), soit près de 100 000 véhicules de moins qu’en 2023. À part au Brésil, qui est son principal marché, avec une pénétration de près de 50 %, soit 521 325 unités (source Stellan­tis), pays dans lequel les ventes ont progressé de 9,6 %, la marque a dévissé sur les dix principaux mar­chés mondiaux où elle est présente.

 

 

Rien qu’en France, qui est pour Fiat le troisième marché en Europe et le sixième au niveau mondial, les ventes ont recu­lé de 18,8 % à 32 770 unités (source AAA DATA), un résultat qui fait passer la marque sous la barre fatidique des 2 % de marché, seuil en dessous duquel les experts en mar­keting estiment qu’elle n’est plus na­turellement visible sur un marché.

 

 

Un résultat qui repousse Fiat dans le ventre mou des marques auto­mobiles, alors que le constructeur a été pendant des décennies dans le top 10. "Les difficultés que rencontre aujourd’hui Fiat sont les consé­quences de la politique de son ancien président Sergio Marchionne, lâche Jamel Taganza. Pendant des années, la marque a surfé sur le succès de la 500 et ses dérivés, dont certains ont plus ou moins fonctionné, comme le 500X, ou beaucoup moins comme le 500L."

 

"Les investissements pour renouveler la gamme ont été réduits au strict minimum, avec l’abandon par exemple du premier segment en Europe, le segment B, avec l’arrêt de la Grande Punto depuis 2013", com­plète de son côté Bernard Jullien, maître de conférence en économie à l’université de Bordeaux.

 

Une gamme exsangue

 

"Au fil de la dernière décennie, la marque a, en effet, abandonné qua­siment tous les segments pour se concentrer presque exclusivement sur le A, avec la 500 et la Panda", sou­ligne Jamel Taganza.

 

Et ce n’est pas le rebadgeage de certains modèles, comme le Dodge Journey transformé pour le marché européen en Fiat Freemont pour combler le manque de produits sur un segment aussi important que le C, qui a changé la donne.

 

 

"La marque Fiat n’a jamais été abandonnée, mais sur les dix dernières années, FCA et Stellantis ne lui ont jamais donné les moyens de travailler", poursuit‑il. À tel point qu’il se murmure que lorsque Carlos Tavares a intégré FCA, ses équipes ont découvert des cartons vides. "Et nous n’avons pas vraiment eu l’impression que Fiat a été la prio­rité de Carlos Tavares lorsqu’il a fon­dé Stellantis", glisse le consultant.

 

 

"Nous avons effectivement connu un passage à vide, reconnaît Olivier François, directeur de Fiat. Et ce passage à vide a été encore plus mar­quant l’année dernière car nous avons dû arrêter la commercialisation d’une partie de la gamme, comme le 500X ou la Tipo à cause des normes GSR2. Nous avons donc be­soin de développer notre portfolio de produits pour revenir en Europe."

 

Sur le continent, la gamme s’est, en effet, réduite comme peau de cha­grin : il ne reste plus que la Panda et la 500e, qui semble avoir épuisé son potentiel commercial, sans oublier la petite Topolino ou le retour de la Tipo en version diesel au der­nier trimestre 2024.

 

"La situation de Fiat en 2024 est le résultat d’une stratégie passée, admet de son côté Guillaume Clerc, chef de produit Fiat et Abarth. Nous avons souffert d’un manque d’investissement qui nous a pénalisés."

 

Un avenir pas remis en cause

 

Si le passé de Fiat n’est donc pas très glorieux, à part le coup de génie de la 500, son avenir semble avoir été repris en main. "Avec la Grande Panda, nous revenons à nos fondamentaux, à savoir proposer une petite voiture, sym­pa, astucieuse et économique, souligne Olivier François. Nous voulons revenir en force sur le segment B, où nous avons toute la légitimi­té. Nous revenons avec un plan pro­duits sain et robuste, parfaitement adapté à notre image de marque et aux besoins de nos clients."

 

Olivier François, la patron de Fiat. ©Fiat

 

La Grande Panda est la première pierre de cet édifice et il est à noter qu’elle remplit parfaitement le cahier des charges. Mais si l’on prend de la hau­teur, le nouveau positionnement de Fiat avec la Grande Panda soulève un autre problème dans la galaxie Stellantis. Car ses caractéristiques sont, en effet, assez proches de celles de… Citroën.

 

"La marque Fiat comme d’autres du groupe vont rapi­dement être confrontées à un pro­blème de taille : leur survie au sein de Stellantis, commente Bernard Jul­lien. Car contrairement à la fusion entre Fiat et Chrysler qui s’est notam­ment appuyée sur la disparition de marques, Stellantis a fait tout l’in­verse : en conserver le plus possible voire en faire renaître comme Lancia. Une stratégie qui fonctionne quand les marques sont fortes. Mais dans le cas de Stellantis, trop de marques ont des parts de marché très faibles dans des pays clés, ce qui plombe la renta­bilité. En outre, les voitures n’ont plus assez de personnalité, tout comme les marques, pour vraiment se démar­quer. Stellantis n’a pas su hiérarchiser ses marques comme le groupe Volk­swagen l’a fait en son temps, même si cela évolue aujourd’hui avec une forte dynamique chez Skoda."

 

"Même s’il s’agit d’un produit bien positionné pour le marché européen, avec un capital sympathie indéniable, la Grande Panda arrive sur un mar­ché très concurrentiel, extrêmement tendu et en concurrence directe avec des modèles de chez Stellantis, ana­lyse Jamel Taganza. Il y a trop de marques sans véritable image qui se chevauchent."

 

Revenir dans la course

 

Si Fiat est probablement l’une des marques les moins en danger du groupe Stellantis, de par sa forte présence sur des marchés impor­tants, comme, outre l’Italie, le Brésil et la Turquie, il lui faut encore déve­lopper une gamme pour revenir en force sur le marché européen, son deuxième marché après l’Amérique du Sud.

 

"La Grande Panda est le premier modèle d’une nouvelle of­fensive qui nous permettra de re­venir notamment sur le segment C avec une offre en adéquation avec notre image", indique Guillaume Clerc.

 

"Avec notre offensive pro­duits, nous souhaitons revenir à une part de marché de 5 % en Europe d’ici deux à trois ans", pose Oli­vier François. Reste à savoir si les clients européens suivront. Car avec les actuelles parts de marché très faibles, penseront‑ils à Fiat pour leur prochain achat ? La Grande Panda a donc cette lourde tâche de replacer la marque au cœur des choix des clients et d’ouvrir le chemin pour les modèles à venir.

 

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