GM, coupable de pratiques restrictives de concurrence ?
Le 11 décembre dernier, le constructeur automobile annonçait publiquement la résiliation de ses contrats de concession, dernièrement reconduits en juin 2013, avec ses distributeurs Chevrolet en Europe de l’Ouest. Selon le CNPA, les mesures d’indemnisation proposées aux distributeurs ne constituent pas une contrepartie suffisante au regard du droit de la concurrence, et notamment au niveau de la compensation de l’absence de préavis et du préjudice subi par le concessionnaire monomarque.
Absence de préavis effectif
GM a indiqué ne pas souhaiter respecter le préavis de deux ans prévu dans les contrats conclus avec son réseau de distribution. L’exigence d’une motivation de la résiliation des CDI avec préavis de deux ans avait été insérée dans le Règlement 1400/2002. Néanmoins, la Commission a constaté que ces règles étaient contre-productives et devaient davantage relever du droit national.
Alors que le nouveau règlement (330/2010) ne le requiert plus, de nombreux constructeurs se sont pourtant engagés à respecter cette durée de préavis via des codes de bonne conduite, ou même via leur législation nationale, comme c’est le cas dans l’ordre interne français avec l’article L-442-6, I, 5° du Code de commerce.
Selon cette disposition d’ordre public, le fait de rompre brutalement une relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, engage la responsabilité de son auteur. L’indemnité réparatrice se calcule, d’une part, sur la marge semi-brute réalisée avant la rupture et, d’autre part, sur la durée du préavis dont le distributeur aurait dû bénéficier, soit deux ans selon les contrats. L’indemnité offerte par Chevrolet France à ses distributeurs est dégressive dans le temps : 600 euros par VN jusqu’au 31 mars 2014, 400 euros jusqu’en juin 2014 et, enfin, 200 euros jusqu’en août 2014. Or, il s’avère que, par an et par voiture, la marge semi-brute de la marque serait bien supérieure au montant maximal offert ! Les distributeurs Chevrolet, soutenus par le CNPA, invitent donc GM à revoir sa politique d’indemnisation de fin de contrat.
Validité des clauses de monomarquisme
Une autre problématique est celle des clauses de non-concurrence imposées par Chevrolet à ses distributeurs lors de la signature des derniers contrats. Le constructeur a profité du passage au règlement général 330/2010 pour insérer dans les contrats une clause de monomarquisme, imposant aux distributeurs de couvrir plus de 80 % de leurs besoins en s’approvisionnant auprès de lui pendant une période de cinq ans. Mais qu’en est-il de la validité de cette clause ?
Après l’expiration du contrat, les clauses de non-concurrence sont en principe exclues par le Règlement – ce qui permet alors au distributeur de remplir son showroom avec des véhicules d’autres marques – SAUF si (1) ces clauses sont limitées au point de vente à partir duquel le distributeur a exercé ses activités pendant la durée du contrat ; (2) elles sont indispensables à la protection d’un savoir-faire transféré par le constructeur et (3) leur durée n’excède pas un an.
Si ces conditions s’avéraient réunies, les distributeurs Chevrolet seraient tenus de ne pas acheter et/ou vendre de véhicules de marques concurrentes pendant une période d’un an après l’expiration du contrat, moyennant toutefois le paiement d’une indemnité pour réparation de leur préjudice, encore à négocier.
“Le constructeur doit assumer les conséquences financières de ses choix et prendre en considération l’intégralité de leurs impacts négatifs sur des entreprises qui ont développé la marque Chevrolet sur le marché français”, a déclaré Olivier Lamirault, président de la branche concessionnaire du CNPA. Des pourparlers à suivre de près, donc.
Stéphane Willemart et Elisabeth Fontaine
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