Entretien avec Jochen Funk, directeur Seat France : "La rentabilité du réseau sera une priorité"
...Le Journal de l'Automobile : Vous venez d'arriver à la tête de Seat France, comment s'est déroulée votre prise de fonction ?
Jochen Funk : Mes prédécesseurs m'ont laissé un bel héritage en France puisque la marque Seat est bien installée entre les 30 000 et 40 000 immatriculations. Hervé de Labriffe notamment a bien intégré la marque au sein du groupe Volkswagen France. Désormais, Seat se situe à sa place sur le marché français, avec sa propre identité. A ma prise de fonction en septembre 2003, le marché était dans une période difficile marquée par la baisse des ventes de voitures neuves et l'entrée en vigueur du nouveau règlement européen. Nous en sommes aujourd'hui à la troisième génération de Seat en France et il faut continuer à nous y positionner dans notre rôle de marque jeune et sportive au sein du groupe Volkswagen. Par ailleurs, Seat en est, aujourd'hui, à une nouvelle étape de son développement : couvrir petit à petit le plus de segments possibles tout en conservant une identité propre. Enfin, nous tâcherons de garder une relation encore plus étroite avec notre maison mère à Barcelone.
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J. A. : L'année 2003 s'est terminée à 34 608 immatriculations pour Seat alors que l'objectif initial était de 39 600 immatriculations. Comment expliquez-vous cet écart ?
J. F. : Deux analyses sont possibles au regard des résultats de l'année 2003. D'un côté, l'année ne fut pas si négative puisque nous reculons du même niveau que le marché (- 7,5 % pour Seat, sur un marché à - 6,2 %). D'autant plus qu'aucune nouveauté n'est venue enrichir notre gamme en 2003. En outre, nous avons traversé l'année 2003 en nous aidant des performances d'un modèle, l'Ibiza, avec 18 705 immatriculations, dont 70 % de ventes aux particuliers. D'un autre côté, nous reconnaissons que Seat est à 5 000 immatriculations en deçà de ses objectifs initiaux, ce qui constitue une contre-performance.
J. A. : Douzième marque (part de marché à 1,72 % en 2003) sur le marché français, est-ce un rang qui vous convient ?
J. F. : Une marque comme Seat pourrait atteindre la 10e place. Lorsque l'on vient de l'étranger comme c'est mon cas, on se rend compte que le marché français est extrêmement compétitif. Au-delà des trois constructeurs nationaux, les 5 premiers importateurs (Opel, Volkswagen, Ford, Toyota et Fiat) réalisent chacun plus de 55 000 immatriculations. Autrement dit, les 8 premières places sont inaccessibles pour Seat, mais nous arrivons juste derrière, "dans la bagarre". Si notre volume de ventes progresse, comme nous l'espérons, nous resterons au contact juste derrière ces grands importateurs.
J. A. : Justement, en termes de volume, des marques qui ne sont pas vos concurrents directs comme BMW, Audi ou Nissan réalisent à peu de chose près le même nombre d'immatriculations. Avec votre gamme actuelle, qui restent vos principaux concurrents ?
J. F. : L'Ibiza et la Leon, respectivement sur les segments B et C, concurrencent directement les marques françaises. Ensuite, en termes d'image, de positionnement et de design, nous nous positionnons en face d'Alfa Romeo. Enfin, en termes de prix, nous concurrençons des marques comme Opel ou Fiat.
J. A. : Sur un marché 2004 qui s'annonce meilleur, même si le début d'année a mal démarré (- 36,5 % en janvier pour Seat sur un marché à - 10,2 %), quels sont les objectifs de Seat France ?
J. F. : D'une part, tout dépendra du comportement du marché. D'autre part, nous misons énormément sur l'Altea qui sortira au mois de juin prochain, qui sera une nouveauté et viendra se positionner à mi-chemin entre le segment M1 et le segment des monospaces. Il est vrai que le marché a très mal démarré en ce début d'année de manière générale et pour Seat en particulier. La tendance reste inquiétante pour nous tous, tout dépendra du second semestre pour lequel nous attendons une reprise de la croissance, pour arriver à un marché en fin d'année à 2,05 millions d'unités. En ce qui concerne Seat, nous devrions réaliser 38 000 immatriculations dans ce contexte et au mieux 40 000 immatriculations, pour une part de marché située aux alentours de 1,8 %/1,9 %.
J. A. : Quelle devrait être en termes d'immatriculations la composition de la gamme Seat en 2004 ?
J. F. : Un lancement réussi de l'Altea se situerait à 5 500 unités. Ensuite, l'Ibiza restera notre fer de lance avec des ventes aux alentours de 20 000 unités, suivie des 6 500 immatriculations de la Leon et des 3 500 immatriculations de la Cordoba. Le reste des ventes concerne les Toledo, Alhambra et Arosa.
J. A. : Quelle place occupe Seat France par rapport à ses voisins européens ?
J. F. : L'Espagne reste de loin le marché le plus important pour la marque puisqu'elle y commercialise 150 000 unités. Ensuite, l'Allemagne arrive en deuxième position avec 52 000 unités, mais avec une part de marché atteignant seulement 1,2 %. Le podium est complété par le marché italien où Seat a atteint les 43 000 immatriculations dont 30 000 Ibiza. Ensuite, le marché français se situe en volume au même niveau que le Royaume-Uni (1,4 %).
J. A. : A plus long terme, avez-vous déjà établi une stratégie de développement pour Seat France ?
J. F. : En matière de produits, Seat va découvrir un nouveau positionnement avec l'Altea qui lancera une nouvelle génération de style pour la marque. Un style résolument moderne, axé sur le design et la technologie, et alliant sportivité et jeunesse, avec également un bon rapport qualité/prix. L'an prochain, Seat lancera la nouvelle Toledo et enfin la nouvelle Leon dès 2005.
En termes de volume, les dix dernières années étaient consacrées à viser la barre des 38 000 immatriculations. Désormais, grâce à une gamme qui va s'enrichir au fur et à mesure, nous espérons voir plus loin mais de manière progressive et prudente. Nous nous sommes fixé un objectif de 42 000 unités à l'horizon 2006. Un objectif qui représente une croissance légère mais réaliste, en espérant atteindre les 1,9 %, voire les 2 % de parts de marché à terme. On ne peut pas non plus espérer arriver aux 50 000 unités d'emblée. Le passé nous a démontré qu'il fallait rester prudent. En outre, nous allons nous consacrer à faire de la rentabilité du réseau une priorité. Si celle-ci a certes été mauvaise en 2003 (0,7 %), à cause des circonstances, nous souhaiterions cependant qu'elle atteigne les 1,5 %, voire même les 2 %. Pour l'instant, la croissance en volume reste secondaire et nous donnons la priorité à notre réseau.
J. A. : Justement, avez-vous, depuis votre arrivée, rencontré le réseau et dans quel état celui-ci se trouve-t-il ?
J. F. : Après les résultats de l'année 2003 et l'entrée en vigueur du nouveau règlement, je ne m'attendais pas à rencontrer un réseau aussi confiant et professionnel. J'ai, de plus, été étonné de voir autant de concessions Seat respectant les normes visuelles. J'ai également découvert des partenaires sachant allier la passion pour la marque et du professionnalisme pour leurs affaires. Le réseau a toujours été important pour notre marque et j'aimerais d'ailleurs continuer ce travail de proximité et d'écoute. Depuis mon arrivée, j'ai déjà rencontré 75 de nos partenaires et écouté leurs problèmes, ce qu'ils avaient à dire. Il est essentiel de rencontrer les hommes sur le terrain, de faire la tournée des régions pour savoir dans quel état d'esprit se trouve notre réseau.
J. A. : Comment s'est déroulée l'élaboration des nouveaux contrats ?
J. F. : Lors de ma prise de fonction, les contrats étaient déjà élaborés. Le travail entre le constructeur d'un côté et le réseau d'un autre a été réalisé en partenariat, basé sur une confiance mutuelle. Ainsi, 98 % de nos opérateurs ont adhéré à ces nouveaux contrats. Seuls, à ma connaissance, deux distributeurs n'ont pas signé à l'heure actuelle. De manière globale, les contrats proposés n'ont pas été exigeants pour nos partenaires.
J. A. : Comment le réseau Seat se compose-t-il aujourd'hui ?
J. F. : Nous disposons de 122 distributeurs agréés, de 37 relais, soit 159 points de vente. A ceux-ci, il convient d'ajouter 165 points service et un centre service.
J. A. : La taille de ce réseau vous paraît-elle suffisante ou êtes-vous toujours en phase de développement ?
J. F. : Notre réseau couvre aujourd'hui 90 % du territoire français. Notre marque est présente dans toutes les villes de France et nous souhaiterions encore nommer à l'avenir une dizaine de distributeurs supplémentaires, pour être définitivement complets. Mais à l'heure actuelle, vu le niveau de Seat en France, le nombre de 159 points de distribution reste suffisant à mes yeux.
J. A. : Le développement du réseau Seat doit-il passer par les réseaux du groupe Volkswagen France ?
J. F. : Ce n'est pas une priorité pour notre marque. Notre réseau est à 50 % exclusif, à 25 % basé sur des opérateurs du groupe GVF et à 25 % détenu par des opérateurs d'autres marques. Si s'appuyer sur des opérateurs du même groupe peut être un avantage, cela peut à l'inverse être également un inconvénient dans la mesure où une marque pourrait être privilégiée par rapport à une autre.
J. A. : Comment voyez-vous l'évolution de la marque Seat au sein du groupe Volkswagen ?
J. F. : Son positionnement est on ne peut plus clair aujourd'hui. Installée dans le pôle sportif du groupe aux côtés de la marque Audi, l'image de Seat est définitivement bien ancrée dans un style jeune et sportif au design osé et moderne. Nous devons d'ailleurs persévérer dans ce sens pour nous affirmer encore plus.
Propos recueillis par Tanguy Merrien
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