S'abonner
Constructeurs

Entretien avec Francois Le Clec’h, directeur Mercedes Car Group (Mercedes-Benz, Maybach, Smart)

Publié le 20 octobre 2006

Par Alexandre Guillet
5 min de lecture
"La Classe B fait mieux que la Classe A !" La marque Mercedes renoue avec le succès commercial et avec une partie de son statut. En chef d'orchestre expérimenté François Le Clech' ne cherche pas à accélérer le tempo, mais s'en tient à sa partition...

...en félicitant les musiciens du réseau.


Journal de l'Automobile. Eu égard à vos bons résultats, confirmez-vous l'objectif initial de 58 000 ventes ou visez-vous plus haut ?
François le Clec'h. Nos ventes sont en progression de 14 % par rapport à l'année passée, une évolution qui correspond à nos objectifs. Nous devrions donc finir l'exercice à 59 000 ventes, voire 60 000 si on intègre les véhicules à TVA récupérable.


JA. Peut-on encore parler d'effet Mondial sur les ventes ?
FLC. On peut parler d'un petit boost, ce qui est naturel. Mais ça ne va pas bien loin, même si on peut jouer avec les chiffres de façon folklorique pour faire croire que…


JA. Les modèles Classe A et Classe B ont-ils le poids attendu dans vos résultats ?
FLC. Tout à fait. En affinant l'analyse, on se rend même compte que la Classe B fait mieux que la Classe A, ce qui est une vraie surprise. Il apparaît que la Classe B se situe vraiment dans le cœur de cible du marché français : une véritable familiale avec un bon positionnement commercial, même si son prix est élevé. Au final, le modèle affiche un taux de conquête de 65 % ! Bien au-delà de nos prévisions qui étaient aux alentours de 55 %. Ce succès se réalise d'ailleurs en légère partie au détriment de la Classe A.


JA. Vous comptiez développer les ventes société, notamment via la Classe A, y parvenez-vous ?
FLC. Nous avons fait beaucoup d'efforts dans ce domaine et ils portent leurs fruits. Dans notre périmètre, nous étions auparavant derrière BMW et Audi et nous avons désormais dépassé BMW pour nous retrouver deuxième derrière Audi. Nos ventes flottes sont ainsi en progression de 49 % et l'objectif est aujourd'hui de réaliser plus de 10 000 ventes sur 2006 !


JA. Contrairement à ce que vous aviez pu craindre, l'effet TVTS n'est donc pas trop pénalisant en termes commerciaux ?
FLC. Finalement, pas de conséquences majeures, en effet. Dans l'état actuel des choses, elle ne concerne que 8 % des voitures. Mais Mercedes en a beaucoup dans ces 8 %… Tous les constructeurs doivent participer à la protection de l'environnement, mais pas dans le cadre d'un protectionnisme français… Ni sous la contrainte de moyens coercitifs qui ne bénéficient pas au consommateur et vraisemblablement pas plus à l'économie française… Mais bon, les dirigeants politiques n'aiment pas l'automobile, peut-être que ça coûtera les élections à certains.


JA. Votre vaste programme de Satisfaction Clients vous gomme-t-il vos récentes difficultés ?
FLC. Nous avons surtout souffert de problèmes de fiabilité sur la Classe E, mais nous avons rectifié le tir, notamment dans le cadre du face-lift. Sur ce modèle, le taux de satisfaction clients est de 100 % depuis le début de l'année. Mais les efforts se poursuivent et le plan "Offensive Client Satisfait" continue de s'intensifier pour toute l'Europe. Il est présenté aux distributeurs avec des possibilités de personnalisation. Ce processus sera encore d'actualité en 2007 et sans doute 2008.


JA. C'est long et c'est coûteux, n'est-ce pas ?
FLC. C'est long ! D'autant qu'il y a souvent un décalage temporel entre l'effectivité du progrès et sa perception par le client final. Le coût du programme est effectivement élevé et nous ne le divulguons pas.


JA. A propos du réseau, l'objectif d'une rentabilité de 2 % est-il maintenu pour 2006 ?
FLC. Oui, c'est le challenge qui nous motive : faire aussi bien qu'en 2005, soit exactement, une rentabilité de 1,97 %. Nous voulons avoir la même rentabilité avec un chiffre d'affaires en hausse.


JA. Vos filiales sont-elle rentables et montrent-elles l'exemple du 2 % de rentabilité ?
FLC. Elles sont rentables, fort heureusement, mais elles n'atteignent pas toutes le cap des 2 %. C'est pourtant l'objectif qui nous est fixé au niveau de l'Europe et chacune des filiales devra atteindre ces 2 % à court terme.


JA. Au niveau de l'après-vente, le centre de réparation de Stains parvient-il enfin à prendre son envol ?
FLC. Le centre de Stains a bel et bien pris son envol, mais il reste encore dans une phase d'apprentissage. Le plus difficile demeurant des problématiques de gestion des RH, et notamment l'embauche en nombre de personnel qualifié. Cela prend plus de temps que prévu. Autrement, le centre est parfaitement en ligne avec ses objectifs, notamment sous l'angle des résultats PR.


JA. D'un point de vue plus général, que vous inspire la médiatisation de l'E85 à l'occasion du Mondial ?
FLC. L'E85, nous en faisons depuis plusieurs années aux Etats-Unis et en Suède, mais cela n'intéressait pas grand monde jusque-là en France. Nous pouvons donc en faire dans l'hexagone, mais ce n'est pas une réponse aussi signifiante et globale que certains veulent bien le faire croire au grand public… En raisonnant au présent, il est sans doute plus fécond de chercher à exploiter le potentiel du diesel. Et en se projetant dans le futur, notamment l'après pétrole, on sait pertinemment que ce n'est pas en fauchant trois champs de colza à droite ou à gauche qu'on va trouver la solution. Ce que laisse entrevoir la pile à combustible me semble plus prometteur.


JA. Les différentes techniques d'hybridation vous semblent-elles pertinentes ?
FLC. D'un point de vue économique, les comparaisons entre hybridation essence et hybridation diesel soulèvent de nombreuses questions. La seconde option me paraît plus viable. Bref, nous proposerons des véhicules hybrides sur le marché, mais en soi, ce n'est pas "La" solution d'avenir.


JA. Pour conclure, quelle analyse portez-vous sur la grande effervescence que suscite la petite percée des constructeurs chinois sur le Salon ?
FLC. Au premier chef, j'estime qu'il faut toujours prendre la concurrence au sérieux. Mais je crois aussi que nous avons du temps devant nous et qu'il faut en tirer profit pour bien nous réorganiser. Il n'y a donc pas lieu de parler de péril jaune. D'autant que le fief de la technologie, c'est toujours l'affaire des constructeurs historiques.


Propos recueillis par
Alexandre Guillet

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager :

Sur le même sujet

Laisser un commentaire

cross-circle