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Constructeurs

Dakar : L’avenir en question

Publié le 18 janvier 2008

Par Marc David
5 min de lecture
Au-delà de l'annulation à Lisbonne de la 30e édition du "Dakar", se pose le problème de l'avenir des rallyes-raids sur le continent africain.L'événement a fait grand bruit, et a même été sur-médiatisé ; au grand dam des éternels "anti-Dakar",...

...sans doute (qui néanmoins, ont dû apprécier). Opportunité nous a été donné de le vivre en direct. Ambiance quelque peu surréaliste à Lisbonne, ville de départ de la grande classique africaine. Inutile de revenir sur les tenants et aboutissants qui ont conduit à l'annulation de l'épreuve, seul le résultat compte. Ainsi que le titrait, certes de façon quelque peu brutale, le journal portugais Record, "al-Qaida a vaincu le Dakar !". Une 30e édition symbole d'anniversaire, donc de fête… et aussi de fiasco.

Au-delà du préjudice subit par les concurrents, tant sur le plan moral que sur le plan financier (en particulier, les privés qui ont économisé durant de nombreuses années pour assouvir leur rêve, et les préparateurs-loueurs guettés par la faillite), sans oublier le manque à gagner des populations locales (notamment, en Mauritanie et au Sénégal), se pose la question de l'avenir des rallyes-raids au Maghreb et plus globalement sur le continent africain. A la question que chacun se posait à Bélem (le site des vérifications administratives et du podium de départ), "y aura-t-il un Dakar 2009 ou son équivalent ?", Etienne Lavigne, le directeur de l'épreuve, répondait en "bottant en touche". "Il y aura un grand événement en 2009, assurait-il laconiquement. On travaille depuis de nombreux mois sur d'autres événements. On a beaucoup d'idées et on va se remettre au travail tout de suite. Nous allons essayer de faire une annonce à la fin du mois de février, après avoir dégrossi quelques terrains".

En dépit des événements, l'Afrique semble demeurer prioritaire aux yeux d'ASO

Aussi surprenant que cela puisse paraître, l'Afrique demeure prioritaire pour Amaury Sport Organisation (ASO), en charge de l'épreuve. "L'âme du Dakar, c'est l'Afrique !". Or, sauf à se replier vers la Lybie, où la sécurité intérieure serait assurée, le terrain d'investigation demeure restreint après la (trop) longue liste de drames et autres problèmes liés aux éditions précédentes. Entre autres, on rappellera la guerre du Tchad en 1992 qui avait conduit les organisateurs à neutraliser la course entre Nguimi et N'Djamena, ou encore l'incroyable pont aérien établi entre le Niger et la Lybie en 2000, du fait d'une menace terrorisme au Niger (déjà). Et puis, après être passée près de 15 ans en Algérie, la grande classique (prenant même l'appellation officielle de "Paris-Alger-Dakar") n'a-t-elle pas dû rompre avec son point d'entrée en Afrique du Nord suite à une série d'attentats perpétrés dans la région ? Bref, au contraire, l'Amérique du Sud (où se dispute déjà le Rallye Por Las Pampas) où encore l'Asie centrale, où va naître cette année à l'initiative de René Metge et Gilles Martineau une Transorientale reprenant la philosophie des anciens Paris-Pékin, représentent des terrains alléchants pour des équipages en quête d'aventure. De toutes façons, pour ce qui est de l'Afrique, le cœur n'y est plus pour bon nombre de concurrents. Pour les autres, l'heure est à la réflexion. "Il est certain qu'un tournant vient d'être pris au niveau de l'Afrique, pense Bruno Saby, pilote BMW X-Raid. Aujourd'hui, je ne pense pas qu'un organisateur quel qu'il soit, prenne le risque de retourner sur ce continent. La situation est dramatique. Il faut savoir que l'Afrique est un continent abandonné, et qu'il le sera de plus en plus au point de ne même plus y aller pour une cause sportive, avec la notion d'humanitaire en toile de fond. En dépit de ce que certains avancent, nous en faisions vraiment, ce n'était pas de l'utopie".

Pour beaucoup, faire repartir le Dakar sous le même format est inenvisageable

Dominique Serieys, le directeur du Team Mitsubishi victorieux à 12 reprises dont sept consécutives, donne également sa vision des choses. "Le fait d'avoir cédé à la menace terroriste, qui n'est pas discutable sur le plan de la sécurité, ouvre la porte demain à une autre annulation de ce type. Je veux dire par là que, si dans 12 mois, pour des raisons qui sont propres à l'organisateur, le Dakar repartait sous le même format, je ne suis vraiment pas certain que la crédibilité de ce format puisse permettre aux concurrents de s'engager en toute sérénité. Pourquoi, dans un an, nous n'aurions pas de nouveau les mêmes risques géopolitiques dans ces pays ? Mitsubishi Motors ne peut répondre à la place d'ASO, mais peut-être faut-il laisser le temps à la situation de s'apaiser, et développer entre-temps un nouveau format d'aventure". Et celui-ci d'ajouter : "Avant de prendre la moindre décision, nous allons laisser tranquillement ASO envisager les différentes options et nous les présenter. Ensuite, je les proposerais à ma direction générale au Japon et en fonction de l'offre, nous aviserons".
Dernier avis, celui d'André Dessoude, le très connu concessionnaire Nissan de Saint-Lô, qui engageait neuf voitures sur lesquelles il avait travaillé durant près d'un an. "Le futur du Dakar semble désormais compromis en Afrique, pense-t-il. ASO devra sans doute envisager une autre destination, l'Amérique du sud par exemple. A mon sens, partir de Lisbonne et arriver à Dakar, c'est malheureusement terminé. Reste que, il faut prioritairement sauver la discipline malgré cette annulation qui conditionne les autres épreuves. Maintenant, à mon niveau, le problème financier va être difficile à gérer. A l'atelier de Saint-Lô, il n'y aura pas beaucoup de travail… Pour les clients, nous pouvons envisager de reporter les budgets sur une autre épreuve, mais cette solution n'est pas forcément la meilleure". Certes.

Photo : Face au Monastère de Geronimo, le parc fermé a soudain été plongé dans l’incompréhension…

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