Subir ou choisir l’hybride ? Il s’impose aussi à nos organisations
Même si certaines organisations semblent encore hésitantes à se projeter dans ce "nouveau normal", l’expression elle-même laisse clairement entendre qu’on ne reviendra pas forcement à la situation antérieure. Mais la nouvelle normalité ne sera pas non plus la simple continuation de la situation que nous connaissons aujourd’hui, notamment s’agissant de l’articulation entre le travail en présentiel et distanciel, et donc le travail hybride.
Le télétravail est plébiscité, désiré même, par une grande majorité des collaborateurs comme des managers (même s’il y a des entreprises et des managers réticents). Avec un rythme souhaité, selon les enquêtes réalisées, de 2 jours et davantage côté collaborateurs, et de moins de 2 jours pour les managers. En résumé, c’est en moyenne 40 % du temps de travail qui est concerné par le distanciel. Aussi, ne pas tenir compte des conditions d’installation des télétravailleurs, c’est se priver probablement d’une productivité dans la durée pourtant accrue de 20 %, quel que soit le secteur d’activité, selon les estimations des experts.
La mise en place des organisations phygitales (ou hybrides), n’est pas sans enjeux. Pour les collaborateurs mais pas uniquement, elle pose évidemment des problèmes spécifiques aux managers, qui peuvent être tiraillés entre leur intérêt (les managers sont aussi des collaborateurs) et les impacts dans la façon de manager des équipes pour partie physiquement présentes et à distance. En outre, pour les salariés, le télétravail a créé de nouvelles habitudes et de nouvelles demandes, voire de nouvelles exigences. Mes expériences d’accompagnement à la transformation comme conseil le montrent bien.
C’est au retour en nombre des collaborateurs que les problèmes apparaissent, il faudrait donc pouvoir les anticiper. C’est dans ce contexte qu’il va falloir faire de l’hybride un levier de transformation et de performance. Le faux rythme du moment, imposé par le renforcement des mesures sanitaires est très opportun pour poser les sujets et y réfléchir avec les équipes managériales.
Faire évoluer les espaces et les pratiques de travail
Parallèlement, le télétravail est propice à la refonte des espaces physiques et la mise en place de "flex-office". En effet, pourquoi ne pas en profiter pour "agiliser" aussi les espaces de travail et ce, d’autant plus quand on se projette demain avec des espaces physiques dont les taux d’occupation vont nécessairement baisser. Mais pour repenser les espaces physiques comme la mise en place de flex-office, il est clairement recommandé de repenser les lieux en fonction du travail, mais aussi le travail en fonction des lieux (l’un étant l’extension naturelle de l’autre).
Les open-space ont montré leur limite et le première demande exprimée par les collaborateurs quand ils imaginent leur retour à une certaine normalité est de pouvoir s’isoler sur leur lieu de travail (pour téléphoner, par exemple) et préserver le bien-être dont ils ont pu bénéficier en travaillant depuis leur domicile. Attention donc, au moment où les entreprises sont tentées de réduire les coûts et les surfaces !
Les attentes évoluent également s’agissant des réunions, et leur organisation. Elles devront sans doute s’envisager en fonctions davantage des objectifs que des agendas. Entre réunions présentielles et à distance, il y a des choix d’objectifs à réaliser. Les différents modes présentent leurs propres avantages : l’un pour informer, l’autre pour créer, réfléchir, brainstormer et décider et un troisième mode hybride qui reste à inventer.
Un "flex-office" à animer
Mais pour que fonctionne les organisations hybrides, avec recours au flex-office ou non, le présentiel de demain, pour qu’il soit une réussite pour l’ensemble des collaborateurs, devra être porté par les animateurs du présentiel de demain : les managers, les grand oubliés de la période. Je suis convaincu qu’il est possible et probablement nécessaire de pouvoir tenir compte des attentes et des besoins propres aux managers (au-delà de ceux qu’ils partagent avec les collaborateurs) pour les embarquer vraiment et éviter leur résistance. Au-delà de la mobilisation, l’agilité dont ils ont dû faire preuve depuis plus d’un an maintenant, la perte de l’unité de temps, de lieu et d’action dans la pratique managériale est réelle, sans même évoquer la perte statutaire comme la suppression des bureaux individuels.
Au-delà du projet de réagencement de l’espace physique ou la mise en place d’un flex-office, il est nécessaire de redéfinir les pratiques managériales pour un contexte phygital. Pour éviter le fiasco, mieux vaut co-construire le "prochain normal" avec le management intermédiaire comme de proximité. Se priver de faire des managers les ambassadeurs voire des experts du flex-office, sans promouvoir des nouvelles pratiques de travail est probablement voué à l’échec. Faire d’une contrainte organisationnelle une opportunité d’optimisation des modes de collaborations mais aussi donner les clés de réussite à ceux qui animeront l’hybride de demain sont sans nul doute autant de facteurs clés de succès.
Accompagner les managers
Le nouveau présentiel, ce n’est pas seulement la cohabitation de deux espaces de travails distincts, c’est une refonte complète des modes d’organisation et donc des pratiques managériales. Ne pas accompagner les managers pour davantage et mieux piloter par les livrables, informer en virtuel, animer en présentiel, "formaliser l’informel", organiser et planifier les tâches à fournir individuellement et collectivement, évaluer la performance et même s’assurer de la santé morale des équipes, c’est aller au-devant de difficultés au moment même l’on pourra réaccélérer. Pis encore, certaines études montrent que les managers, eux même, sont demandeurs de soutien dans cette période de transformation. Des solutions existent, que cela passe par la refonte des pratiques managériales, l’élaboration d’une charte managériale ou bien la redéfinition des modèles de leadership. Parce que les managers ont besoin de se préparer dès maintenant à un monde hybride dont ils demeurent les principaux moteurs.
Sans soutien, ni préparation au nouveau normal, il est fort à parier qu’une crise des vocations managériales est à envisager sous peu... Je vous donne rendez-vous le mois prochain pour tâcher de répondre à cette autre problématique.
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