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DaimlerChrysler change de tête

Publié le 9 septembre 2005

Par Christophe Jaussaud
7 min de lecture
A la surprise générale, le 28 juillet dernier, Jürgen Schrempp, le patron de DaimlerChrysler, a annoncé son départ. Il sera remplacé, à partir de 2006, par celui qui a redressé le groupe Chrysler, Dieter Zetsche. Une passation de pouvoir qui a fait des dommages collatéraux avec le départ,...
A la surprise générale, le 28 juillet dernier, Jürgen Schrempp, le patron de DaimlerChrysler, a annoncé son départ. Il sera remplacé, à partir de 2006, par celui qui a redressé le groupe Chrysler, Dieter Zetsche. Une passation de pouvoir qui a fait des dommages collatéraux avec le départ,...

...dans la foulée, d'Eckhard Cordes, pourtant considéré comme le dauphin de Jürgen Schrempp.


Alors que son mandat lui accordait encore deux années à la tête de DaimlerChrysler, Jürgen Schrempp a annoncé son départ le 28 juillet dernier. Il quittera effectivement la tête du groupe le 31 décembre prochain. Son dauphin naturel, Eckhard Cordes, président de Mercedes Car Group (Mercedes, Maybach, Smart), devait s'attendre à une promotion mais c'est le sauveur de Chrysler, Dieter Zetsche, qui a été désigné comme nouveau big boss.
Officiellement, Jürgen Schrempp a indiqué que son départ était "le fruit d'une décision collégiale". "Nous en discutions depuis longtemps", commentait-il encore. L'annonce a en tout cas été appréciée par le marché financier puisque le cours n'a depuis cessé de grimper. Une embellie boursière qui a fait le bonheur de six cadres de la société qui ont liquidé leurs stocks-options encaissant, au passage, un bénéfice de 1,5 million d'euros. Ce fut notamment le cas d'Ulrich Walker, le patron de Smart, mais aussi d'Eckhard Cordes qui aurait empoché dans l'opération une plus-value de 497 150 euros, plus un capital de 500 000 euros.

"Renouer avec un niveau de rentabilité cohérent pour une marque de luxe"

A l'image de Jürgen Schrempp, le conseil de surveillance a été tout aussi discret sur ses motivations. On peut légitimement penser que ce départ sanctionne la politique de ce patron au caractère entier et notamment ses options stratégiques en Asie, comme l'illustre le cas Mitsubishi. Surtout, le "mariage du siècle", celui de Daimler et de Chrysler en 1998, est loin d'avoir dégagé les synergies espérées. Chrysler en a tiré profit en bénéficiant de produits plus attrayants, basés techniquement sur des Mercedes. Mais aussi grâce à la suppression de plus 26 000 emplois. Des efforts, menés par Dieter Zetsche, avalisés par Jürgen Schrempp, qui ont forcément eu des conséquences financières et humaines sur l'ensemble du groupe et qui ont peut-être privé les autres marques, comme Mercedes, d'une partie des moyens habituels et d'une attention suffisante. Jürgen Schrempp a peut-être trop privilégié Chrysler au détriment de Mercedes, la "vache à lait" du groupe.  Quoi qu'il en soit, depuis cette période, Mercedes a effectivement perdu de sa superbe notamment en termes de fiabilité. Le constructeur a su réagir depuis sur ce point mais il n'empêche que les ventes se sont érodées de 75 000 unités dans le monde entre 2000 et 2004, passant de 1,150 million à près de 1,075 million d'unités. Toutefois, Dieter Zetsche a déjà annoncé que la course au volume ne serait pas une priorité pour la marque Mercedes. Il veut "renouer avec un niveau de rentabilité cohérent pour une marque de luxe." La qualité des produits sera son autre cheval de bataille.
Et que dire du cas Smart ? Cette marque du groupe est déficitaire depuis sa création et bien que les chiffres n'aient jamais été officiels, certains analystes financiers ont estimé que Smart perdait environ 700 millions d'euros par an ! Bien que le groupe germano-américain ait lancé un vaste plan de restructuration pour assainir sa filiale, dont une partie des charges (311 millions d'euros) a plombé le résultat d'exploitation du deuxième trimestre, Smart n'est pas pour autant assuré d'un avenir radieux.

Les fonds d'investissements spéculatifs de plus en plus pressants

Les fonds d'investissements spéculatifs, qui détiennent aujourd'hui environ 20 % du capital de DaimlerChrysler, mettent la pression sur le groupe pour "liquider" cette filiale. Selon un banquier proche du dossier, cité par le Frankfurter Allgemeine Zeitung, "ils vont tout mettre en œuvre pour que le groupe ferme Smart." De plus, certains de ces "hedge funds", comme le britannique CVC, n'excluent pas de prendre le contrôle du groupe afin de le vendre par appartements. Jürgen Schrempp a-t-il tenu tête à ces fonds d'investissements précipitant son départ ? On attendra son autobiographie pour en savoir plus ! Quoi qu'il en soit, Dieter Zetsche dès son arrivée à la tête du groupe, le 1er janvier 2006, devra composer avec ces acteurs et il n'est pas dit que le sauveur de Chrysler puisse les rassurer. Et d'autres défis l'attendent. L'emploi en sera un. En effet, le groupe réfléchit à la suppression de 5 000 emplois en Allemagne. Toutefois il n'y aurait pas de licenciements secs car ces derniers sont interdits outre-Rhin jusqu'en 2012.
Dieter Zetsche devra aussi faire face à un large volet judiciaire. DaimlerChrysler est au centre de plusieurs enquêtes : l'une diligentée par le Bafin, le gendarme de la Bourse allemande pour délit d'initié ; une autre se déroule aux Etats-Unis, où l'homologue américain du Bafin, la SEC et le département de la justice enquêtent sur d'éventuels pots-de-vin versés par le groupe mais aussi sur une violation du programme "pétrole contre nourriture" en Irak. L'ONU mène également sa propre enquête sur le sujet. Dans cette affaire lancée par le congrès Américain, le groupe germano-américain est soupçonné d'avoir livré, via une société Russe, des camions au régime de Saddam Hussein. C'est sûr, Dieter Zetsche va avoir du boulot ! 


Christophe Jaussaud





Bio Express...

A la tête de Daimler-Benz depuis 1995 puis de DaimlerChrysler en 1998, où il avait succédé à Edzard Reuter, Jürgen Schrempp passe le relais à Dieter Zetsche.


Jürgen Schrempp :


Né le 15 septembre 1944 à Fribourg en Allemagne. Il entre chez Daimler-Benz en 1961 comme apprenti tout en poursuivant ses études d'ingénieur à l'Université de Sciences Appliquées d'Offenburg de 1964 à 1967. Après sa dernière année d'études, il rejoint Stuttgart. En 1974 il part en Afrique du Sud. Il dirigera cette filiale du constructeur de 1985 à 1987. Il prend ensuite la tête de Daimler-Benz Aerospace AG jusqu'en 1995 date à laquelle il devient président de Daimler-Benz AG. En 1998, il partage la présidence de DaimlerChrysler avec Robert Eaton, le président de Chrysler, jusqu'en 2000. Depuis cette date, il était seul à la tête du groupe germano-américain.



Fidèle lieutenant de Jürgen Schrempp, Eckhard Cordes, longtemps présenté comme son successeur, a quitté la direction du Mercedes Car Group (Mercedes, Smart, Maybach) le 31 août dernier.

Eckhard Cordes :

Né le 25 novembre 1950 à Neumünster, en Allemagne. Après un MBA en économie à l'Université de Hambourg, il entre chez Daimler-Benz dès 1976. Fidèle lieutenant de Jürgen Schrempp, il mettra en œuvre la stratégie d'expansion internationale de ce dernier. Spécialiste des restructurations, il sera nommé en 2000 à la tête de la division VU lourdement déficitaire. Il inversera la tendance en trois années. Une spécialité qui le conduira à la tête de la division Mercedes Car group (Mercedes, Maybach, Smart) le 1er octobre 2004 pour la redresser. Dès janvier 2005, il a lancé un large plan d'économie. Il a quitté DaimlerChrysler le 31 août dernier après 29 ans passés dans l'entreprise.



Le souriant patron de Chrysler, Dieter Zetsche, prendra les rênes de DaimlerChrysler le 1er janvier 2006. De plus, il a déjà repris la direction du Mercedes Car Group après le départ d'Eckhard Cordes le 31 août dernier.


Dieter Zetsche :


Né le 5 mai 1953 à Istanbul en Turquie, il obtient un diplôme d'ingénieur en 1976, après un parcours universitaire à Francfort puis à Karlsruhe, avant de compléter ce diplôme avec un doctorat en 1982 à l'Université de Paderborn. Il entre chez Daimler-Benz AG dès 1981. Son parcours chez le constructeur le conduira de la division recherche au directoire de Daimler-Benz en 1995, en passant par la filiale Mercedes en Argentine en 1989. A l'automne 2000, il devient président du groupe Chrysler alors en difficultés. Le 1er janvier 2006, il succédera à Jürgen Schrempp à la tête de DaimlerChrysler. De plus, le 1er septembre dernier, il a également pris la tête du Mercedes Car Group suite au départ de Eckhard Cordes.



Dans ce jeu de chaises musicales transatlantiques, Thomas LaSorda devient le numéro un du Groupe Chrysler, après avoir été n°2 de la marque suite au départ de Wolfgang Bernhard chez Volkswagen.


Thomas LaSorda :


Né le 24 juillet 1954 à Windsor en Ontario, au Canada. Diplômé de l'Université de Windsor en 1980 (MBA), Thomas LaSorda a débuté sa carrière professionnelle chez GM où il introduira un système de production hautement efficace, notamment dans une usine allemande d'Opel. Il rejoint le groupe Chrysler en 2000. Nommé numéro deux de Chrysler en mai dernier, suite au départ de Wolfgang Bernhard chez Volkswagen, il est devenu numéro 1 de Chrysler le 1er septembre dernier. Eric Ridenour est devenu numéro 2.

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