S'abonner
Services

Waze, Coyote et consorts sous la menace d'un décret

Publié le 28 avril 2017

Par Gredy Raffin
4 min de lecture
Les assistants d'aide à la conduite sont en alerte depuis qu'un décret proposé par la France, dans l'entre-deux tours présidentiel, à la Commission européenne pourrait mettre à mal leur modèle de fonctionnement.

 

Tous les voyants se sont allumés. Les assistants d'aide à la conduite sont dans le viseur du gouvernement français, qui, le 24 avril dernier, a déposé une proposition de décret auprès de la Commission européenne visant "à interdire la diffusion au sein de tout service électronique d’aide à la conduite ou à la navigation tout message ou indication permettant aux usagers de ce service de connaître la localisation des forces de l’ordre dans certains périmètres et susceptible de nuire à l’efficacité des opérations de police administrative de sécurité routière ou des opérations de police judiciaire réalisées".  

 

Entre les lignes, les professionnels ont compris que les applications smartphone, GPS, sites Internet, réseaux sociaux vont devoir réviser leur modèle de fonctionnement, au risque de se rendre coupables de fraude. En effet, un article R. 131-1 est créé par le projet de décret dans le Code de la route. Une sanction (contravention de la cinquième classe) est prévue pour les exploitants qui ne respecteraient pas ces nouvelles dispositions.  

 

Dans les faits, ce décret prévoit que le Gouvernement indique les périmètres à respecter. Ceux où auront lieu certains contrôles sensibles, notamment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ou la criminalité organisée, d’actions de sécurité routière, de la recherche de détenus évadés ou de personnes enlevées. Le ministère de l'Intérieur, à l'origine de cette proposition de décret, estime donc que ces périmètres ne couvriront donc que les contrôles les plus sensibles et entend limiter les zones à vingt kilomètres pour une durée ne pouvant dépasser vingt-quatre heures.

 

Dangereuse exposition technique

 

Mais l'objectif manque de clarté. Entre enjeu de sécurité nationale et enjeu de sécurité routière, le spectre très large met à mal l'intérêt des services d'aide à la conduite tels que Waze, Coyote et autre TomTom. "Cela fait des mois que nous discutons des mesures à adopter de manière automatique dans les périodes suivant un attentat, nous avons proposé de couper le service, mais au lieu de poursuivre la consultation constructive, le Gouvernement accouche d'un décret irréalisable", déplore une source interne à un fournisseur de service.

 

Irréalisable sur le plan technique d'abord : "Il s'agit pour le Gouvernement de renseigner toutes les opérations de police sur un serveur, auquel nous allons nous connecter pour mettre à jour notre service. Ce qui implique des passerelles d'une grande réactivité et une précision la plus fine des informations", nous explique-t-il. "Ce qui veut dire qu'une personne malveillante peut également y avoir accès", s'étonne-t-il.

 

Des zones "brouillard"

 

Irréalisable sur le plan économique, ensuite, puisque les assistants d'aide à la conduite devront alors définir une zone de "brouillard" sur leur cartographie pour couvrir un barrage de police. Autrement dit, cela revient à arrêter de diffuser des informations sur le trafic, les accidents, la météo et tout autre événement impactant le comportement de conduite. Pour Waze, ajoutons que cela aurait aussi une incidence potentielle sur la diffusion de contenu publicitaire. Dans tous les cas, les fournisseurs s'exposent à une perte sèche de valeur produit et un risque de désengagement des clients et partenaires.

 

Irréalisable sur le plan juridique, enfin, comme l'a prouvé le verdict de la Cour de cassation en septembre dernier. Elle avait jugé que les pages Facebook sur lesquelles les internautes s'informent de la localisation de contrôles de police sur les routes ne sont pas illégales, au regard de l'état actuel du Code pénal, qui interdit néanmoins les avertisseurs radars.

 

"Ce décret a peu de chance d'aboutir, croit savoir un responsable chez un fournisseur de service. Il faut se remettre autour de la table et parvenir à un accord encadré sur les comportements post-attentats. Les tragiques expériences de Paris et Bruxelles ont prouvé la réactivité de plateformes. Quinze minutes après les premières annonces, leurs informations avaient été suspendues de manière spontanée jusqu'à indication des forces de l'ordre.

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager :

Sur le même sujet

Laisser un commentaire

cross-circle