Quelle réforme pour la formation professionnelle ?

Au mois de juin, lors de la conférence sociale, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, annonçait un projet de loi concernant la formation professionnelle pour la fin de l'année. L'objectif pour le gouvernement : mettre en œuvre des formations prioritaires pour l'emploi. Il n'en fallait pas plus pour lancer une négociation nationale interprofessionnelle.

Ce 24 septembre, le patronat et les syndicats ont entamé les discussions. Sur son site, la CFDT pointe l'un des écueils que le projet de loi, espéré dès 2014, devra corriger : les cadres et salariés des grandes entreprises bénéficient largement de la formation, beaucoup plus que les salariés les moins qualifiés, jeunes ou chômeurs. "Cette négociation doit être centrée sur les besoins des salariés et des demandeurs d'emploi, deux publics qu'il ne faut pas opposer, en adéquation avec les mutations de l'économie et du marché du travail", explique Marie-Andrée Seguin, secrétaire nationale chargée du dossier de la formation professionnelle.

Pour mener à bien la réflexion, le gouvernement a mis à disposition un document d'orientation, en donnant trois principaux objectifs. D'une part, il souhaite sécuriser les parcours professionnels au moyen d'un compte personnel de formation, transférable d'une entreprise à une autre, pour disposer de 20h de formation annuelle. D'autre part, l'objectif est de "faire de la formation professionnelle un investissement de compétitivité au sein de l'entreprise", les compétences et les qualifications des salariés étant considérées comme élément clé de la compétitivité. Enfin, le document d'orientation propose de rendre plus simple et plus efficace la gouvernance des politiques de formation professionnelle, chacun devant clarifier son rôle et mieux se coordonner avec les acteurs du territoire.

Opacité des dépenses

Mais l'idée d'un consensus à court terme est mise à mal par la complexité du dossier. Comme l'explique le rapport "Réformer vraiment la formation professionnelle" de l'Institut de l'entreprise, il y a d'abord la difficulté liée à l'appareil de la formation, "qui compterait plus de 50000 prestataires". A cela s'ajoute la complexité des mécanismes de financement : "Les dépenses annuelles de formation professionnelle dépassent actuellement 30 milliards d’euros, dont plus de 40% à la charge des entreprises, les autres financeurs étant l’Etat, les régions et autres collectivités locales, l’Unédic et les ménages", indique le rapport, qui relève que, dès 2008, la Cour des comptes dénonçait une opacité des dépenses et du gaspillage.

En cas de mésentente à l'approche de la date butoir, le gouvernement reprendra la main, libre de tenir compte ou non de l'avis des partenaires sociaux. Le 11 septembre, lors des entretiens de la cohésion sociale, Michel Sapin, ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, déclarait que "recruter des personnes qualifiées est une des préoccupations majeures des entreprises. La puissance publique a une responsabilité : mieux orienter les demandeurs d'emploi vers la formation, développer l'alternance pour les jeunes, construire des formations en lien avec les besoins de recrutement". Tant de volontarisme accouchera-t-il d'une souris ? Les précédentes tentatives de réforme (2004, 2009) ne parlent pas en sa faveur.